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À la mémoire du Radnicki : la leçon des Maîtres du Danube (épisode 2)

Le Radnicki Belgrade s’affirme comme le club des communistes auprès desquels il combat durant la guerre. Après 1945, il connaît ses années de gloire malgré les réticences du régime du maréchal Tito qui lui préfère l’Étoile rouge et le Partizan.

Auteur : Predrag Ducic le 26 Jan 2017

 

 

Publié dans Mozzartsport le 1er octobre 2016. Traduction: Guillaume Balout.

 

 

* * *

 

L’histoire d’Aleksandar Karovic, l’une des premières légendes du club, redoutable buteur d’après ce qui se disait dans les auberges d’avant-guerre, illustre le mieux la façon dont le Radnicki vivotera et ce qu’il deviendra. Une partie de ce récit fait la part belle au dogme et à l’idéologie. Karovic se trouvait à Veliki Bork, dans la municipalité de Barajevo, un jour de match important du Radnicki. Il rendait visite à sa sœur… Lorsque, en attendant à Umka, il prit conscience que le bateau qui devait le conduire à Belgrade ne viendrait pas, il ne perdit pas espoir. Il se mit en marche. Plus de trente kilomètres… Comme il réussit à arriver juste avant le coup d’envoi du derby contre le Slavija, ses camarades l’installèrent dans les buts afin qu’il se reposât de tous ses efforts. Il encaissa trois buts. En deuxième mi-temps, il reprit sa place en attaque et fit trembler autant de fois les filets adverses. Score final: 4-4.

 

 

À cette époque, porter le maillot rouge du Radnicki était plus qu’une simple pratique footballistique. Athlètes et sympathisants du nouveau club étaient soumis à une sorte d’endoctrinement. Ils imprimaient des brochures sur les droits des travailleurs, tenaient des conversations politiques et, si nécessaire, organisaient des grèves. Tout cela dans le but de valoriser le statut de la classe ouvrière dans la société. À Belgrade, les premiers supporters du Radnicki se déplaçaient, comme Karovic, à pied. À l’extérieur, ils parcouraient des centaines de kilomètres pour supporter les leurs mais aussi pour entonner des chansons à la gloire des travailleurs, bravant les autorités. Et c’est ainsi qu’avec le temps, l’inoffensive bande de la cour abandonnée en face du Roi de Roumanie est devenue un élément significatif au sein du parti, incomparablement plus important que celle qui jouait aux billes…

 

 

Interdiction d'activité

La publication illégale du journal Jeune bolchevik scella définitivement les liens entre le Radnicki et le parti. Elle conduit aux premières arrestations de footballeurs. Le roi avait déjà mené une grande offensive contre des communistes qu’il voyait comme une menace sérieuse pour sa couronne après leurs succès électoraux. Les réunions du club étaient une façade pour les réunions du parti. Les rencontres amicales entre les équipes A et B étaient organisées de sorte que les citoyens mécontents se servent des tribunes pour tenir des meetings interdits. Dans la société, l’atmosphère changeait radicalement. Il n’y avait plus de pitié pour les membres du PCY. Fin 1920, après l’Obznana [1], le club fut donc brièvement interdit. La deuxième offensive contre le Radnicki allait être plus violente encore. La police plaça ses hommes dans la direction pour essayer de semer la discorde. Sans succès. Pas plus que n’y est parvenu l’arbitre-policier qui dirigea intentionnellement le match contre le Sloga de manière malhonnête afin de provoquer des incidents dans le public et permettre à ses collègues d’intervenir. On dut frapper par décret. L’interdiction de toute activité dura pratiquement deux ans en 1931 et 1932.

 

Vint ensuite un coup de massue. C’était le 6 septembre 1932 dans le cadre de l’inauguration officielle du nouveau terrain à Bara Venicija. Depuis sa fondation, le Radnicki évoluait là-bas, sur une prairie bosselée à tout instant exposée aux crues de la Save… Lorsqu’un nouveau terrain a finalement été aménagé, un ordre des autorités municipales déclarait: "Conformément au nouveau plan d’urbanisme, le bord de la rivière, des bouches de Topcider vers la ville, doit être labouré pour y planter des arbres." À ce moment précis, la Save cessa de déborder.

 

 

Le petit rouge qui fait tache

Durant l’entre-deux-guerres, le Radnicki dispute le championnat de la Ligue fédérale de Belgrade où il obtient des résultats moyens, finissant généralement dans le ventre mou du classement. Il en découd avec l’Osvetnik, l’Olimpija, le Karadjordj, le Graficar, le Viktorija… Predrag Tomic, Dragoljub Pacic, Ilija Krstic, Bora Kosic, Selimir Simic, Stojan Vasiljevic, Branislav Gavrilovic, Marko Simic figurent parmi les footballeurs les plus expérimentés de ces premières années. À l’aube de la Seconde Guerre mondiale, il cesse d’exister pour la troisième fois: la direction décide de dissoudre le club. Toutes les archives des deux dernières décennies sont brûlées pour ne pas qu’elles tombent entre les mains des Allemands ou d’agents de la police spéciale. La liste des membres avec leur photo et leurs données personnelles, les trophées, les comptes-rendus, les équipements, tout est parti dans les flammes. Le Radnicki devient une espèce d’organisation secrète de combat et continue de fonctionner clandestinement au service des communistes. Les adhérents qui ont fait la guerre d’Espagne sont envoyés au front du mont Kosmaj ou au bataillon de partisans de Valjevo. Ceux qui restent sont surnommés "les clandestins de la ville". En une nuit, l’association sportive Radnicki devient l’un des bras armés du PCY en lutte contre les fascistes et les "traîtres" de l’intérieur.

 

Ayant évidemment toutes les qualités requises pour être un club à restaurer dans un pays communiste libéré, il devient une structure sportive dominante et pense obtenir la place à laquelle le prolétariat aspire. Or, le nouveau pouvoir rompt complètement tout lien avec le passé. Il souhaite bâtir sa propre genèse, depuis le commencement, et il n’est donc pas rare qu’il néglige ses anciens serviteurs. La disparition dans les flammes, en 1941, de l’histoire du Radnicki dans l’entre-deux-guerres a définitivement représenté un point final. Comme si elle n’avait jamais existé. Le BSK et le Jugoslavija, premiers véritables géants belgradois, ont coulé après avoir exprimé des sympathies envers Nedic durant la guerre [8]. Leurs places ont été prises par le CDJA (Quartier général de l’armée yougoslave) et l’OFD (Organisation sportive et culturelle de la jeunesse): du premier sigle naîtra le Partizan, en octobre 1945, au retour du général Tempo d’un séjour en Union soviétique expliquant à ses camarades Peko Dapcevic et Otmar Kreacic comment fonctionne le CSKA Moscou sous la direction de l’armée, et de l’autre, l’Étoile rouge.

 

 

Dans un premier temps, cette dernière s’appelle l’USAOS (Union de la jeunesse socialiste et antifasciste de Serbie), fondée par des membres du Skoj et des étudiants sous le contrôle de quelques hauts responsables de la police secrète. Il existe une histoire selon laquelle Slobodan Penezic Krcun a assisté en personne à l’assemblée fondatrice de mars 1945, où elle a reçu son nom actuel, alors que des éclats d’obus criblaient encore le sol sur le front du Srem.

 

Ces dernières décennies, les sociétaires de l’Étoile rouge ont tenté de se défaire de l’image des "rouges". Ils ont présenté leur club comme réactionnaire, comme celui qui appelait, dès 1948, aux premières manifestations d’opposition à l’instar du grand capitaine Rajko Mitic, après la victoire en coupe de Yougoslavie, prononçant un discours où il remerciait une foule conquise sans citer le camarade Tito. Avec le recul, une chose est pourtant claire: si nous faisons abstraction du "fait" que le Dinamo Zagreb et l’OFK Belgrade sont les successeurs respectifs du Gradjanski et du BSK, le Radnicki arrive immédiatement derrière l’Étoile rouge et le Partizan comme le meilleur produit footballistique de l’ancien système. S’il ne l’est pas sur le plan du football, il l’est au moins en tant qu’association sportive. Cela ne fait aucun doute.

 

 

Maître Spitz et ses élèves

Le FK Radnicki connaît ses heures de gloire dans les années 1950. Ce fut court mais romantique et savoureux. Les nouveaux pontes de la ville offrent une parcelle de terrain pour un nouveau stade à Vilinim vodama et là-bas, près du Danube, une magnifique génération de footballeurs émergera. En raison du don hors du commun qu’ils ont dans les pieds, on les surnomme les Maîtres. Les Maîtres du Danube…

 

Le Radnicki est monté en Division 1 en 1953 après s’être défait, en barrage, de "l’Uruguay de province", ainsi qu’on désignait le Macva Šabac. Deux ans plus tôt, cette jeunesse danubienne avait montré un énorme potentiel après avoir tourmenté, comme sociétaire de deuxième division, le Hajduk des Vukas, Matošic, Beara, Mladinic et autre vedette de la "Vieille place" en quart de finale de la coupe de Yougoslavie à Split (3-4). Pourtant, il faudra du temps à ces jeunes perdreaux pour s’imposer comme de vrais as qui empoisonneront, dans la durée, l’existence des vieux routiers du football yougoslave.

 

En 1955/56, leur troisième saison dans l’élite sera celle de leurs rêves. L’Étoile rouge finit championne, le Partizan deuxième et le Radnicki immédiatement derrière, à seulement quatre points. Avec, dans son rétroviseur, le Dinamo, le Hajduk, le Vojvodina, le Željeznicar, le FK Sarajevo, le nouveau BSK… La plus célèbre génération des Maîtres du Danube est alors formée de Blagoje Vidinic, Jovan Jezerkc, Djura Cokic, Aleksandar Petakovic, Zoran Prljincevic, Marcel Žigante, Milan Ljubenovic, Ljuba et Rade Ognjanovic, Zlatan Ljujic, Radmilo Ristic, Milorad Diskic, Tihomir Markovic, Paškovic, Petrovic, Pavlovic, Pfalander, Josipovic. Un juif de Hongrie [9], Illés Spitz, inlassable voyageur, dirigeait l’équipe depuis le banc.

 

"Bon, voici un objet en cuir. On appelle ça un bollon", se débattait constamment ce grand professeur avec notre langue. "Est-ce que ce bollon a des yeux pour voir?"
Alors, les joueurs s’écrièrent: "Non!
- Et est-ce que ce bollon a un cerveau pour penser?
- Non!
- Eh bien, vous dites vérité. Voilà pourquoi vous devoir regarder à la place du bollon et penser à la place du bollon.
"

 

 

Héritage et appétit

Illés Spitz, fameux gaucher du FC Újpest, a enseigné le football aux Yougoslaves pendant plus de deux décennies. Il a évolué à de nombreux endroits, laissant son plus bel héritage au Partizan. Plus tard, les enfants noir et blanc naîtront de l’école de Spitz et du cœur de Florijan Matekalo. À l’automne de sa carrière, il viendra au Radnicki pour monter une équipe pour le titre avec un groupe de gamins particulièrement talentueux. Il lui en a fallu de peu. À deux reprises, les Maîtres terminent à la troisième place d’une ligue alors relevée, le quatrième championnat européen selon certains observateurs, et une fois à la quatrième. Et il faut voir la concurrence durant ces années…

 

Sans sortir de Belgrade. Miša Pavic conduit le Graficar en troisième division avec les frères Vragovic, Anicic, Koškanac, Kidric… Il y a le Radnicki Obrenovac, où le docteur Obradovic a envoyé Bora Kostic à l’Étoile rouge. Il restait son frère jumeau Voja. Les gens de la région de Kolubara, jusqu’à Valjevo, affirmaient que Voja avait un talent plus grand. Les Turcs de Fenerbahçe l’ont approché et voulaient l’emmener en Allemagne. Il a refusé de quitter sa vieille mère et est resté un éternel joueur de troisième division. Il y a le BASK de Vladanka Stojakovic avant qu’il devienne un commentateur célèbre. Et Bata Odabašic et Rera Cedic, de Žarkovo? Étaient-ils meilleurs au Sous-marin, la fameuse cantine près du stade, ou sur le terrain? Mica Radosavljevic, le doyen du football amateur belgradois, a suffisamment écrit sur cela…

 

[1] L’Obznana est le décret royal d’interdiction du PCY publié le 30 décembre 1921, six mois après le double attentat contre le roi et le ministre de l’Intérieur.
[2] Le général Milan Nedic est à la tête du gouvernement serbe de collaboration avec l’Allemagne de la reddition yougoslave du 17 avril 1941 jusqu’à l’avancée des partisans vers Belgrade à l’automne 1944.
[3] Dans les Balkans, le substantif "juif" fait autant référence à un membre d’une communauté nationale qu’à celui d’une confession. Footballski évoque la trajectoire peu ordinaire de cet entraîneur dans un article consacré au FK Makedonija en 2014.

 

Réactions

  • Toni Turek le 08/02/2017 à 03h32
    Avec retard, mais merci beaucoup pour cette trilogie.

    J'aime toujours autant le foot étranger et l'Histoire du foot, alors quand les deux sont combinés : :love: !

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