C'est une dépêche AFP anodine (02/06/00), qui évoque avec le joueur les difficultés qu'a connues cette saison Robert Pires et la thérapie qu'il suit pour les surmonter. En se gardant d'extrapoler à partir de quelques propos isolés, ou d'ironiser à bon compte, on peut cependant trouver inquiétude ou amusement à leur lecture.
Robert Pirès a "failli craquer" lors de cette "saison d'enfer", mais il a été "sauvé par son faciathérapeute". Une certaine perplexité nous étreint, car cette spécialité nous est totalement inconnue. S'agit-il de massages du visage, de numérologie morphologique ou de morphing numérique? Cela semble plus simple: "Je suis allongé sur une table, pendant une heure. Il me parle, essaie de me faire prendre conscience de mes qualités et touche les points sensibles du corps affectés par la pression". C'est donc une sorte de psychanalyse agrémentée de quelques contacts, qui lutte contre "la pression", cette fameuse pression personnalisée à l'extrême, ou assimilée à une maladie. "A chaque fois que je sors d'une séance avec lui, je suis complètement libéré et prêt à replonger dans une nouvelle pression". Etrange thérapie, qui consiste à vouloir replonger dans le mal au lieu de s'en débarrasser.

Dommage que Pires en soit encore à se convaincre de ses propres qualités, alors que tout le monde est convaincu de son potentiel, dont on attend simplement confirmation, notamment en sélection…
Il est vrai que le joueur est victime de plusieurs syndromes, comme celui que lui a collé Aimé Jacquet avec son immortel "il faut muscler ton jeu Robert". Son problème ainsi exposé en public est devenu une obsession pour Pires, qui a fini par le placer lui-même au centre de tous ses discours. Lors de son transfert à Marseille ou lorsqu'il en prit le capitanat, et encore maintenant quand il évoque son départ, à chaque fois il revendique une nouvelle maturité ou la ferme volonté d'y parvenir. Il donne ainsi l'impression d'être toujours en train de franchir le même palier. Pires aura certes musclé ses mots, mais en se mettant lui-même cette "pression" qu'il se raconte systématiquement, au lieu d'exploiter ses qualités naturelles sans chercher à devenir quelqu'un qu'il n'est pas.

Il n'est pas question de porter des accusations telles que de charlatanisme sur les psychothérapies diverses et variées qui se répandent dans les milieux du sport et du spectacle. Leurs patients en vantent l'efficacité, et ils sont bien libres de suivre le traitement qui leur plaît.
Mais l'ésotérisme de ces "psychologies" comportementales, parfois empruntées aux fumeuses théorie du management en entreprise ou à des disciplines plus occultes, évoque d'assez près certaines pratiques d'organisations sectaires comme l'église de scientologie, qui "vendent" des thérapies à des clients fragilisés. Le danger vient justement de ce que ces thérapies de remise en confiance "marchent" vraiment, et qu'elles ont un marché potentiel considérable. Nombreux sont ceux qui veulent bien payer leur bien-être au prix d'une aliénation encore plus grande, tant que celle-ci est indolore ou efficace socialement. Ces sectes cherchent à recruter des personnalités, qui pourraient ensuite faire de la publicité pour leur compte. De là à penser que nos footballeurs professionnels, soumis à des exigences de plus en plus fortes et à un stress constant, souvent mal armés culturellement, seraient des proies idéales pour quelques gourous inspirés…
On n'en est pas tout à fait là (?), alors Robert, fais-nous plaisir: lâche-toi un peu, arrête de te prendre la tête et sors-nous enfin des grands matches en équipe de France! Et muscle ton jeu! Non, ça c'était pour déconner.