King con
Eric Cantona se rappelle à notre bon souvenir avec ses déclarations un peu pathétiques sur les équipes de France et d’Angleterre. Qui regrette encore notre ex-star des nineties?
Lorsque Eric Cantona était encore actif, les Cahiers du foot ne l’étaient pas encore, ce que rétrospectivement nous regrettons grandement, ne trouvant aujourd’hui en Youri Djorkaeff qu’un ersatz de ce grand mystificateur. Car la plus grande escroquerie du football français, c’est bien lui. Mieux encore que son successeur, il aura su se construire une image médiatique blindée qui lui garantissait un statut de titulaire indiscutable chez les Bleus. Il fut le "grand joueur" de l’équipe de France qui a tout raté, le recordman du nombre de ballons perdus et de la marche à pied sur terrain de foot, le roi de la talonnade stupide, le rebelle entièrement sponsorisé, l’idole du tout-Paris journalistique qui le confondait avec sa marionnette des Guignols…
On ne sera jamais assez reconnaissant à Aimé Jacquet de l’avoir écarté, en compagnie de Papin et Ginola, malgré les hauts cris de l’époque ("mais comment peut-on se priver d’un joueur comme lui?!?"). Cette fois, les déclarations du footballeur de plage à la radio britannique auront moins de chances de s’attirer la même sympathie inconditionnelle. Elles trahissent d’abord la vanité du personnage, à commencer par son intention de succéder un jour à Alex Ferguson, annoncée avec un aplomb considérable (tiens, cela rappelle… Djorkaeff se voyant déjà président de l’OL). Les procédures judiciaires engagées contre son ancien club à propos de tristes histoires de royalties semblent donc oubliées et l’amour du maillot revenu. Plus démagogique, il encense aussi la sélection anglaise, dont il se fait le fervent supporter et en rajoute même une couche en affirmant qu’il se sent "plus proche des Anglais que des Français". Il devient nettement plus comique en se disant "surpris que l’Angleterre n’ait pas réussi à passer". On comprend mieux sa surprise lorsqu’il confie n’avoir même pas regardé les matches de l’équipe de France, ce qui lui aurait pourtant permis de mieux situer le niveau de ses favoris.
Que Cantona ait pu apprécier le jeu indigent des Anglais à l’Euro donne quelque idée de sa conception du football, ou bien de sa mauvaise foi. Mais il n’est pas si surprenant qu’il se fasse le défenseur de la "qualité anglaise", si l’on considère que ses années de gloire dans la League ont coïncidé avec la période durant laquelle le foot britannique a atteint le fond de sa nullité tactique et technique, avant l’ouverture totale de ses frontières et le rattrapage effectué depuis (au niveau des clubs du moins).
Sa carrière anglaise est évidemment remarquable, et Cantona a su marquer les esprits avec une habileté diabolique, mais sur le plan de la sélection, la baudruche s’est forcément dégonflée depuis les vraies victoires de 98 et 2000. Alors, comme d’autres aigris exilés dans le pays où l’herbe est (réellement) plus verte, il lui faut snober ces Bleus qui l’ont fait un peu oublier, et chercher ailleurs l’adoration. Faut-il s’en plaindre?