La Coupe du monde ou presque
Quatre jours à peine après la victoire de Rotterdam, ce jeudi sembla bien noir: en plus du résultat des élections à la Ligue, on apprenait que la FIFA avait pris la décision de confier à l'Allemagne l'organisation de la Coupe du monde 2006. Une occasion ratée pour l'Afrique, et pour le football…
Auteur : Julie Grémillon
le 7 Juil 2000
Il y a quelque mauvaise foi à crier au scandale à propos de l'organisation de la énième coupe du monde sur le sol européen, deux après avoir nous-mêmes bénéficié de cette providentielle opportunité (en en privant déjà le Maroc). Il n'y a en tout cas aucune antipathie contre l'Allemagne elle-même dans ce propos, ni contre Franz Beckenbauer qui s'offre un destin à la Platini, mais la désignation d'un pays africain pour la première fois dans l'histoire aurait constitué un merveilleux symbole pour un sport qui se veut universel. La FIFA a montré les limites de son discours par cette décision peu en conformité avec ses prétentions (notons que pour Sepp Blatter lui-même, dont la préférence allait vers l'Afsud, ce verdict est une défaite). En refusant de prendre ce "risque", les membres de la fédération internationale se refusent à faire profiter l'Afrique des fantastiques richesses que ce sport produit. Et l'accueil de tels événements semble de plus en plus réservé aux pays les plus industrialisés, qui bénéficient non seulement des meilleures infrastructures, mais surtout des marchés pour générer les meilleures affaires du monde. Le Maroc ou l'Afrique du Sud ont largement les moyens d'organiser la compétition reine, mais leur handicap majeur est d'ordre économique. Les préférences des industriels du football vont très nettement vers les nations de grands consommateurs, comme on l'avait vu avec le choix surréaliste des Etats-Unis pour l'édition 94.
Pourtant, quelle chance encore ratée de revenir un peu aux sources du football, dans des pays où il est dans la rue et dans les pieds des enfants, à une compétition plus authentique, à une fête plus énorme et plus spontanée. Ne pouvait-on pas sacrifier quelques profits afin de partager ce sport avec un continent auquel il est immensément redevable pour les fantastiques générations de joueurs qu'il a vu naître? Est-ce une décision très pertinente à long terme de favoriser des pays aux populations certes riches mais vieillissantes, au détriment d'autres qui incarnent la jeunesse et l'avenir? Pourquoi le football international devrait-il reproduire-il la même exclusion que l'ordre économique?