La dissolution du supporter
Une Balle dans le pied – Le tour de magie est presque fini: un plan Leproux, une pluie d\'étoiles... Et hop, les supporters ont disparu.
"Paris est magique" : le slogan officieux autrefois scandé dans les tribunes trouve une spectaculaire confirmation dans l'incroyable opération d'escamotage réussie par les dirigeants successifs au cours des deux saisons précédentes. On n'a en effet compris le sens du "plan Leproux" qu'après le rachat du club par Qatar Sports Investments, dont il a été une condition en même temps que la première phase d'un programme plus vaste concernant les tribunes. Dans la foulée de la dissolution ou de l'auto-dissolution des principales associations de supporters, les mesures de restriction sur les abonnements et le placement aléatoire dans les tribunes ont eu raison de toute présence associative, les Ultras se partageant d’ailleurs entre le boycott, le retour en catimini et le choix d'une expérience cruelle: ne plus pouvoir aimer son club, finir par ne plus le reconnaître.
On ne peut évidemment pas faire abstraction des événements et des actes qui ont entaché la vie du Parc des Princes depuis près de trente ans: exactions racistes, rixes, hooliganisme. Les Ultras portent une part de responsabilité dans leur situation: incapacité à se fédérer, tolérance coupable envers leurs éléments déviants, erreurs stratégiques... À leur décharge, le combat contre le mépris et les amalgames dont ils font l'objet était perdu d'avance. Mais, que l'on se réjouisse ou s'attriste de la métamorphose de ce stade, il faut prendre toute la mesure des événements. Ce que les dirigeants, avec l'aval des pouvoirs publics, ont éliminé, sous couvert d’élimination des violences et des dérives, c’est une partie essentielle du supportariat qui participait à l’identité du club, dont ils n’étaient pas les moins légitimes des dépositaires – tant les supporters conservent leur fidélité à leur club bien plus longtemps que les joueurs, les dirigeants ou les actionnaires.
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