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Le match Hollande-Aubry à la Schopenhauer Arena

Ou la rencontre entre le football, les primaires du PS et le philosophe allemand...

Auteur : Ismael Malamati le 19 Oct 2011

 

2012 : année fatidique pour tous nos politiciens. À défaut de dialectique sincère, l’ensorcellement électif privilégie le formel. Nous assistons donc à une compétition où le gagnant sera le plus apte à la sophistique, donc à pratiquer "l’art d’avoir toujours raison" du fétide Schopenhauer. Plutôt que de suivre les faux-semblants de cette élection, intéressons-nous à leurs qualités de rhéteur.

 


Mercredi 12 octobre 2011 avait lieu la grande finale de la région socialiste entre Martine Aubry et François Hollande. L’enjeu était simple: le gagnant aura l’honneur de représenter sa province en ligue des champions. Avec un différentiel favorable à une journée de la fin, le député de Corrèze pouvait se contenter d’une position attentiste, en pensant aux hypothétiques futurs matches nationaux. Les deux se connaissent sur le bout du programme, sauf que l’ex-amant Royal jouit d’une plus grande liberté d’action. De plus, il bénéficiait de l’avantage du terrain avec 39,2 % des sièges, tandis que la maire de Lille étant la visiteuse, ne disposait que de 30.4 % des places. La lutte s’annonçait homérique pour la conquête des téléspectateurs présents pour admirer le show rhétorique.

 



Stratagème 28

Les règles du jeu sont simples: à chaque débat, les politiciens emploient un nombre impressionnant de sophismes pour donner l’illusion qu’ils ont raison. Le philosophe Schopenhauer a compté 38 stratagèmes qu’il a répertoriés dans un petit ouvrage. Dans cet article, nous les relevons et nous considérons qu’il y a but, lorsque le sophiste a bien été employé et que l’adversaire n’a pas su comment répondre.
Le coup d’envoi a été donné à 20 h 43 par monsieur Pujadas, qui a déjà arbitré nos deux concurrents, et a manifestement avantagé la fille de l’ex-grand espoir Jacques Delors, le 6 septembre 2011 (source AFP). Il avait poliment souhaité à la secrétaire de devenir présidente! Le fair-play n’a pas sa place dans une compétition schopenhauerienne. Celui-ci était donc sous tension, car il pouvait renouveler son ancienne erreur. La commission de discipline du CSA était sur le qui-vive.


Et effectivement, nouvelle polémique sur l’arbitrage à la 8e minute, Pujadas a sifflé une faute d’Hollande au sujet du ralliement de Ségolène. Cette dernière avait indiqué que ses propositions seraient reprises par son ex, tandis qu’il expliquait que le retour au bercail de son ancienne compagne avait été sans condition. L’arbitre a donc manifestement utilisé le st. (= stratagème) 28 qui est de chercher à convaincre le public et forcer le politicien à un long argumentaire. La conséquence n’a pas été dramatique, car le député s’en est sorti en jouant sur le sens du mot (st. 2) "sans condition". Il a affirmé qu’il n’y avait pas eu de tractations, tout en soulignant qu’il avait écouté les désidératas des électeurs. Aubry n’en a pas profité, mais il va falloir combien de polémiques, avant la mise en place du questionnaire électronique? Mais, ne tombons pas dans le travers des commentateurs sportifs et intéressons-nous au match!

 


Ouverture du score avant la mi-temps

Hollande a commencé la partie tambour battant avec un st. 26 (retourner l’argument contre l’adversaire) : lorsque la maire a indiqué qu’elle nommerait un premier ministre plus jeune, son concurrent s’est engouffré dans la brèche, en utilisant l’homonymie (st. 2) du mot "jeune" (Martine pensait à une autre génération, François a répliqué en soulignant leur deux années d’écart). Ce stratagème aurait pu s’avérer dangereux, car il montre qu’il envisage une défaite. De surcroit, il fait songer au mythique "Oui, monsieur le Premier ministre" de François Mitterrand en finale de la Ligue des champions 88.
Concernant le cumul des mandats, Hollande a posé à la 42e minute une question rhétorique (qui n’admet pas de réponse): "Puis-je être plus clair?" Aubry lui a répondu: "Oui, je pense", puis a changé de sujet, soit un bel usage du st. 22 (refuser l’argumentaire). Cette action dangereuse consacrait une période de domination de la Lilloise, mais il n’y a pas eu d’ouverture du score, car elle ne l’a pas utilisé à bon escient (à la suite d'un manque de clarté manifeste de son adversaire). Il s’agissait ici plus d’une taquinerie.

 

La minute suivante, nullement déstabilisé, le Corrézien a réfuté la critique de ses atermoiements sur la règle d’or, en affirmant qu’il avait parlé de la loi de finance (st. 37: réfuter une mauvaise preuve). Inexplicablement, Martine a eu un tic de langage et a émis un "d’accord", qui admettait son erreur. Dans toutes les écoles de rhétorique, on apprend qu’il est interdit d’avouer une défaite. Donc, nous avons assisté à l’ouverture du score juste avant la mi-temps, sur cette erreur de concentration.

 


53e minute : Hollande creuse l'écart

Au retour des vestiaires, à la 53e minute, Aubry a attaqué avec le st. 16 (contradiction avec son école de pensée), elle a expliqué que les dires sur l’âge légal de la retraite d’Hollande sont en contradiction avec ceux de son conseiller spécial sur cette question, Pascal Terrasse. Or, elle a été terrassée par son concurrent, en avouant avoir mal compris, puis en se reniant. Le député a donc doublé la mise en réfutant cette mauvaise preuve (st. 37), d’une contre-attaque éclair. La stratégie du favori semble avoir été la bonne: jouer le contre dans l’attente des erreurs de son adversaire.

 

À l’heure de jeu, la partie s’emballe. La première secrétaire a préparé son argumentaire (une première fois interrompu par un st. 18 d’Hollande), en établissant la prémisse suivante: le coût de la création des postes dans l’éducation nationale est de 2.5 milliards d’euros, soit autant que la "suppression" des redoublements voulue par le candidat. Donc, par un rapprochement d’idée, elle a expliqué que le redoublement provoquerait la suppression des 60.000 postes "créés", car la "fin" du doublement n’entraînerait pas un bénéfice, mais un coût supplémentaire. Elle a tenté d’utiliser le st. 24 (tirer des fausses conclusions en déformant le concept), mais Hollande l’a interrompue de nouveau (st. 18), sentant le danger. Lorsqu’Aubry s’est réexpliqué, il a feint de ne pas comprendre (st. 31) que la candidate évoquait le financement de sa mesure. Pujadas a tenté de relancer sa pouline, mais l’ex-compagnon Royal a réutilisé le st. 31, puis a défendu sa mesure d’un point de vue humain et non économique. Encore une fois, l’ex-Delors a abandonné le point à l’adversaire, en changeant de sujet de son plein gré. Son absence de clarté et son hésitation due à l’emploi d’un stratagème déstabilisant lui a donc été préjudiciable. 3-0, l’écart est fait.

 


Mauvais choix tactique

Après une longue période insipide, la challengeuse a sauvé l’honneur avec l’utilisation réussie du st. 33 utilisé pour le contrat intergénérationnel, en expliquant que celui-ci marche en théorie mais pas en pratique, pointant une énième fois, le manque d’expérience ministérielle de son adversaire, qui n’a rien répliqué. 3-1 à la 88e minute, mais la réaction fut trop tardive. Dans les arrêts de jeu, à la 93e minute, Hollande a fait une pique sur le soupçon de fraude de l’élection d’Aubry à la tête du district PS (st. 6 : postuler ce qui n’a pas été prouvé), mais elle a répliqué efficacement en soulignant que l’organisation de ce congrès a été l’œuvre de son rival.

 

La tactique de celle qui était hier "la femme la plus brillante d’aujourd’hui" (selon l’assertion de Jospin en 1995) de privilégier le st. 30, l’argument d’autorité a été un échec. Elle a en émaillé son discours à six reprises, dont quatre en se référant à Rasmussen. Malheureusement pour elle, celui-ci ne bénéficie pas d’une grande popularité. La plus célèbre autorité citée ne l’a été qu’implicitement: c’était son père Jacques Delors. Effectivement, à l’heure où le CSA nous permet de publier ce compte-rendu, les zélés lecteurs ont bien entériné cette victoire par les urnes.

 

Le débat de ce mercredi a été assez pauvre en sophisme violent, mais ne vous inquiétez pas : avec des candidats avec des styles de jeu plus dissemblables et plus agressifs, nos démagogues invétérés prouveront qu’ils revendiquent tous le glorieux titre de Schopenhauer de la république pour les années 2012-17.

 

Hollande 3-1 Aubry : st. 37 (43e et 53e), st. 31 (60e) pour Hollande contre st. 33 (88e) pour Aubry.
 

Réactions

  • Dehu Sex Machina le 19/10/2011 à 06h16
    L'enjeu de cette rencontre était bien sûr d'être sélectionné pour passer à l'antenne pendant Riolo.

  • Miklos Lendvai le 19/10/2011 à 08h04
    Ça me fait regretter le manque de duels politiques à la télé. Ismael, j'espère que tu tiens prêt pour le débat de l'entre deux tours.

  • Raspou le 19/10/2011 à 09h52
    Si mes souvenirs sont bons, le dernier stratagème est l'attaque personnelle. Heureusement qu'on n'en est pas arrivé là, c'est passible d'expulsion, comme ici:

    lien

  • Tonton Danijel le 19/10/2011 à 10h05
    Il est intéressant de noter que la finale opposera Hollande aux Pays-Bas... Non, pas les Pays-Bas de 1974, ceux de 2010, avec ses deux fers de lance, Jean-François Van Bommel et Nadine De Jong. Avec une technique rudimentaire à base de destruction de jeu adverse, tacles sur les chevilles, contestation de l'arbitrage, que quelques fulgurences d'un Arjen Borloo qui a toutefois du mal à se faire au jeu collectif ne masquent pas...

    Espérons que les joueurs de l'équipe PS, malgré les divisions et rivalités entre Barcemolle et Real Dureté seront estompés et qu'ils arriveront à produire un jeu collectif de qualité pour battre leurs futurs adversaires, fut-ce au bout de la nuit, et même si coach Martinho aura du mal à digérer sa défaite à coup de "Porqué?"

  • inamoto le 19/10/2011 à 13h04
    Haha, très bon moment passé à la lecture de cet article, j'aime beaucoup ! Merci.

  • Lionel Joserien le 21/10/2011 à 12h53
    Très bon et cultivant, ça rocks.

  • Gilles Juan le 21/10/2011 à 14h23
    Ben mince alors.
    lien

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