S'il est un changement majeur de ce début d'année 2004 qui a fait couler tant d'encre, suscité tant de controverses, c'est bien la nouvelle formule de Téléfoot, devenu une sorte de journal du football aseptisé animé (ou plutôt assuré) par des croque-morts au professionnalisme ronflant. C'est lisse, c'est pondéré, c'est faussement enjoué, on s'ennuie ferme.

Plus que les travellings sur des gamins en tenue de foot venus représenter leur village de lointaine banlieue en criant de joie à chaque annonce de pub, plus que les commentaires techniques de Vincent Hardy ou la chronique de consultant-expert (on aura tout vu) de Thierry Roland, c'est bien les résumés de match commentés par Pascal Praud qui vont nous manquer.

"Wwwoolé!"

Tout un poème, souvenez-vous. Bien que le match ait eu lieu la veille au mieux ou le dimanche soir précédent au pire , Praud avait la particularité de commenter les résumés de match comme si on était en direct, sa voix virant au suraigu à l'approche du but, un peu à la manière d'un commentateur à la radio.

Et comme le résumé ne montrait que les buts ou les actions les plus chaudes, il se sentait obligé de hurler avec force onomatopées, décrivant l'action d'une manière hachée, décousue et haletante (il s'essouffle vite), comme s'il en ignorait totalement l'issue, tout en insistant particulièrement sur la première partie de la dernière syllabe des mots. Un autre truc agaçant, c'était cette façon qu'il avait de crier "wwwoolé!" à chaque fois qu'un joueur réussissait un drible, sans aucun rapport avec une éventuelle nationalité espagnole du joueur.

Gageons que le drôle avait poussé la fumisterie jusqu'à préparer à l'avance ces commentaires à la spontanéité trop parfaite (imaginons-le lisant "olé" sur son prompteur). Pire encore : Praud nous tenait tellement en estime qu'il allait jusqu'à nous faire croire qu'il croyait que le ballon allait finir au fond des filets ("BUT? NON! POTEAU!!!"). Grandiose. Un peu énervant aussi.

Speaker de Radio classique 

Depuis que Mougeotte et Villeneuve ont décidé de mettre fin à ces exactions télévisuelles, force est de constater qu'elles nous manquent un peu. Praud rétrogradé au rang de directeur de l'émission n'a plus le droit de cité sur le plateau (même si on peut penser que de larges dédommagements sont venus altérer son affliction).

Néanmoins, une écoute attentive nous permet de réaliser avec étonnement que notre ami s'est remis au commentaire de résumé de match sous forme de voix off. Mais quelle transformation Des intonations de dépressif de France Culture, un style sobre et des phrases construites (à peu près) sont les nouvelles caractéristiques du commentaire praudien, à notre grande surprise. Où est passé cet enthousiasme primesautier? Ce léger zozotement dans les moments d'emballement?

Pour illustrer cette mutation, rien de tel qu'un exemple. Voici ce que ça donne aujourd'hui: (avec la voix du speaker de Radio classique) "Yann Lachuer glisse intelligemment le ballon à Djibril Cissé, qui d'un crochet intérieur élimine son vis-à-vis. Il entreprend aussitôt un relais avec Olivier Kapo qui lui remet instantanément le ballon. Malheureusement le montant droit de Ramé empêche Djibril Cissé de parachever ce beau mouvement auxerrois". Avant, ça donnait ça : "laCHUER, ciSSEé, WWWOLLééé! , kaPOo, cisSEé, BUT!! , NON, POTEAU!"

Et moi qui m'étais promis de ne plus me moquer de Praud depuis son altercation avec Tapie