Pourquoi l'Italie va organiser l'Euro 2016
Donnée battue, l’Italie est encore à égalité avec la France et la Turquie alors qu’arrivent les arrêts de jeu. Donc probablement gagnante.
Auteur : Aldo Bianco
le 20 Avr 2010
Vous connaissez l’histoire de l’équipe dominée tout au long du match, sans projet de jeu, qui peine à se procurer des occasions, dont son opposant frappe deux fois le poteau, mais qui repart avec le trophée grâce à un but dans les arrêts de jeu? Dans notre mythologie nationale, cette équipe est italienne.
Et bien pour l’Euro, c’est un peu la même histoire. Cherchant un mobile pour rénover ses stades, l’Italie s’est lancée dans la candidature à l’organisation de l’Euro 2016 sans trop de conviction, avec peu de soutien des politiques et du grand public, et des observateurs qui la donnent battue d’avance contre le duo France et Turquie. Autant dire que la situation n’a jamais été aussi favorable pour qu’une grande compétition internationale revienne dans la péninsule pour la première fois depuis 1990.
Une stratégie décalée
La Coupe du monde 1990 n’aura pas laissé un souvenir impérissable sur et en dehors du terrain. Côté stades, c’est la même chose. À l’exception de quelques réussites architecturales, comme San Siro à Milan ou Luigi Ferraris à Gênes, les stades ont très vite pris un coup de vieux. Les problèmes actuels d’insécurité dans les stades italiens, même si la tendance se ralentit depuis quelques saisons, trouvent une partie de ses causes dans ces enceintes trop grandes, en béton, au confort obsolète et aux services inexistants.
Le pays cherche une occasion de refaire ses enceintes sportives, et jette dans un premier temps son dévolu sur l’organisation de l’Euro 2012. Peine perdue, malgré un dossier technique meilleur, qui avait notamment proposé un ambitieux dossier stade, la compétition part en Ukraine-Pologne.
Changement de stratégie donc pour 2016. Fort de l’expérience passée, l’Italie développe pour cette nouvelle candidature une stratégie en décalage parrapport à ses concurrents: là ou la France et la Turquie insistent jusqu’à l’outrance sur le renouvellement de leurs parcs stades, l’Italie ne lui accorde que l’importance allouée par le cahier des charges, soit environ 15% de la note finale. D’où un certain flottement assumé sur la partie "stade" du dossier.
Dura lex
Bien que ressortant des cartons les idées de 2012, le flou a été longtemps (et reste encore parfois) de mise sur la question des enceintes. Certains projets restent mal taillés (San Paolo à Naples ; quel stade à Milan : San Siro ou un nouveau ?), d’autres ont périclité en cours de route, remplacés au pied levé par de nouveaux candidats, sur fond de guéguerre entre le club résident et la collectivité locale. Le financement est pour sa part plus ou moins obscur, même si le public mettra majoritairement la main à la poche : 750 millions d'euros sont garantis par l’Etat pour rénover dix stades – le stade de la Juventus étant financé par des fonds privés et le Comité Olympique prenant à sa charge la rénovation mineure du stade Olympique de Rome dont il est propriétaire.
Mais qu’importe, semblent dire les autorités transalpines. Si l’UEFA accorde l’Euro à l’Italie, les stades sortiront de terre quoi qu’il arrive, et rempliront les conditions définies par l’organisation européenne. Il faudra alors notamment promulguer la loi sur les stades, bloquée au Parlement depuis l’été dernier. Ce texte de loi faciliterait la propriété et le financement privé des enceintes, en permettant notamment la réalisation d’opérations immobilières annexes d’envergure. D’où la crainte affichée par certains commentateurs sur cet aspect de la loi, qui permettrait l’investissement et la réalisation de plus-value spectaculaires au profit de certains organismes "douteux"…
Projets : Stadio Juventus à Turin et Stadio Friuli à Udine (41.000 places chacun).
L’Italie a donc décidé de jouer ses autres cartes pour convaincre Nyon de leur attribuer la compétition. Un effort d’importance a été réalisé sur l’aspect "héritage" et développement durable du dossier. Et puis la capacité hôtelière, le sens de l’accueil, la fonctionnalité des aéroports et des transports ne sont plus à prouver. Et puis les images des fan-zones, ces lieux de rassemblement et de diffusion sur écrans géants des matches, au pied du Colisée ou sur le parvis du Dôme de Milan vont faire le tour du monde: entre deux matches, un musée ou un monument. Et puis le sourire des Italiennes sur leur Vespa. Italia 2016, ce sera bien.
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