Publicité virtuelle furtive
La pollution publicitaire devient clandestine avec les nouvelles technologies.
Auteur : Jamel Attal
le 21 Avr 1998
La prolifération publicitaire n'a plus de limites : les images virtuelles les font apparaître n'importe où et à n'importe quel moment, de préférence à notre insu. Il fallait avoir de bons yeux et s'ennuyer ferme pendant Lazio de Rome-Athletico Madrid (ce qui était logique au vu du match) pour remarquer que l'écran était squatté par des incrustations clandestines. Sur certains plans larges, étrangement cadrés, une rangée de panneaux surdimensionnés affichaient le nom d'un fabricant d'électro-ménager, comme suspendus à la bordure du toit. Une anomalie optique attirait le regard : ces panneaux étaient nets, alors que leurs alentours "réels" étaient flous. Un dispositif similaire habillait les angles du terrain, la même marque étant judicieusement cadrée lors des corners, passant comiquement au travers d'un banc de policiers. Une enceinte comme le Stadio Olimpico oblige déjà les buteurs à effectuer un cinquante mètres haies par dessus trois rangées pour saluer leurs supporters, l'écran des matches de foot est déjà saturé des panneaux du stade et des incrustations de sponsors, mais on invente encore de nouveaux moyens de le barioler.
Le Français moyen va bientôt avoir plus de noms de marques que de mots à son vocabulaire, et le football ne ressemble parfois plus qu'à un gigantesque piège à audiences prêtes à subir le bombardement publicitaire. Si le spectateur était un tant soit peu représenté dans les instances sportives et médiatiques, il pourrait au moins exiger que les manipulations numériques de l'image soient explicitées par des avertissements clairs, à l'exemple des trucages du Vrai Journal de Karl Zéro (ou comme le maïs transgénique), et non passées en contrebande.