Putsch à Marseille?
Il fut dit été répété cet été que l'OM connaîtrait une saison de transition, pour se remettre d'un exercice 99/2000 très sombre et repartir avec des moyens nettement plus restreints. L'exemple cité était paradoxalement le PSG de Bergeroo, qui avait fait profil bas pour finir à la deuxième place. Le club de la capitale était en effet resté étonnamment discret (hormis les remous provoqué par le non-renouvellement du contrat de Bernard Lama), ne nous gratifiant pas de ses habituelles mésaventures sportives ou médiatiques (hormis une finale de Coupe de la Ligue perdue contre Gueugnon!).
Mais l'Olympique de Marseille ne semble pas parti pour éviter de nouvelles crises, à un moment où l'équipe de Braga n'a pas encore acquis suffisamment d'assurance pour réellement progresser dans le championnat, et doit très prochainement affronter son grand rival.
La fronde vient de l'intérieur. Au début du mois, Robert Louis-Dreyfus avait dû s'exprimer dans La Provence (04/10) pour répondre aux critiques des clubs de supporters (l'ayant gratifié de quelques banderoles réclamant son départ) mais surtout aux attaques de Pierre Dubiton, trésorier et vice-président de l'association OM (qui détient 33% des parts de la SAOS), contrôleur des comptes de l'entreprise. "J'en veux à ceux qui sont grassement payés à l'intérieur du club et qui soufflent sur les braises" avait déclaré l'actionnaire majoritaire. L'annonce de l'ouverture prochaine du capital et de l'injection de 30 millions de francs pour le recrutement d'un attaquant n'ont pas suffi à calmer les esprits, et ces deux projets sont mêmes compromis par l'atmosphère de plus en plus plombée qui entoure le club.
Car Dubiton n'a pas tenu compte de cette mise en demeure et est revenu à la charge avec un déballage massif, en transmettant une note interne à toute la presse. En vrac: il y aurait un trou de 100 millions, les charges du club ont explosé (voitures et téléphones portables), le licenciement de Courbis a coûté 20MF et Casoni en réclame 36 pour le sien. Il dénonce aussi une "absence forte de direction au point de mettre en péril la pérennité du club" En conclusion, Yves Marchand doit partir et Robert Louis-Dreyfus, "rapidement céder les actions de la SAOS, sans aucune contrepartie" (AFP 10/10).
Le personnage, qui est le seul de ses affidés à se montrer au grand jour, lance un ultimatum à peine déguisé et affirme être en contact avec deux repreneurs, "des entreprises très importantes, une dans la communication, probablement bien plus puissante que TF1 ou Canal, et une autre qui gère des fonds de pension". Difficile de savoir s'il faut prendre Pierre Dubiton au sérieux ou penser au contraire qu'il est atteint de mythomanie (il se prend peut-être pour Bernard Tapie) ou ne s'agite qu'au profit d'intérêts internes. Mardi 10, l'association OM, par la voix de son président Jean-pierre Foucault, s'est dissociée officiellement de son vice-président, qui ne s'est exprimé qu'à titre personnel. Dans un communiqué, la direction du club a démenti ou corrigé les affirmations de son accusateur sur les finances, et tenté de rassurer les supporters quant aux investissements futurs.
En toile de fond de cette crise, il y a la gestion controversée d'Yves Marchand, dont on ne sait s'il a beaucoup avancé la "lessive" annoncée après l'affaire OM-Monaco, et le retrait relatif de RLD, qui a semé beaucoup de millions et récolté quelques déceptions. En fin de saison dernière, on s'interrogeait déjà sur sa volonté à moyen terme de maintenir son engagement, et l'OM est un tel enjeu de pouvoir que certains ambitieux n'ont pas tardé à exploiter les opportunités de se hisser aux commandes.
L'éloignement de l'actionnaire, l'impuissance du président (qu'un autre grave conflit oppose à Eric Di Méco), ajoutées à la pression marseillaise et à l'approche des municipales semblent déjà compromettre les chances de l'OM de retrouver dans un futur proche la sérénité et la stabilité nécessaire à son redressement. Quelles qu'en soient les conséquences, l'épisode Dubiton souligne la fragilité actuelle du club et les incertitudes quant à son avenir.
Ayons enfin une pensée pour Abel Braga, qui doit survivre à tout cela...