TPS, tout pour Cissé
Tribune des lecteurs – Par francocentrisme, les commentateurs peuvent atteindre des sommets de ridicule, les yeux rivés sur le banc où se morfond une de nos stars nationales...
Auteur : Thierry Joyeux
le 21 Mars 2006
Quel (peu) excitant et difficile challenge que celui des commentateurs de TPS, s’essayant tant bien que mal à nous faire croire que Djibril Cissé est la grande star de Liverpool (et à défaut une des plus grandes de toutes)! Défi d’autant plus ardu que le joueur français n’a eu au bas mot que 20% de temps de jeu cette saison. Et bien, qu’à cela ne tienne! 25% des commentaires d’un match de Liverpool lui seront consacrés (à la place des 5% environ dévolus à tout joueur titulaire).
Ainsi, et alors que les diffuseurs anglais n’ont - comble du comble – pas eu l’idée, pourtant évidente, de braquer une caméra en continu sur Cissé (donc sur le banc de Liverpool), rien ne saurait nous échapper des mésaventures dantesques du joueur: Cissé qui part s’échauffer, fausse alerte il retourne s’asseoir (un geste technique pas toujours supportable moralement), Cissé discute avec ses compagnons d’infortune, Cissé retire son haut de survêtement entre autres banalités affligeantes…
Cette pitoyable démagogie prend sa source dans la fausse idée que la majorité des téléspectateurs français regarderaient un match de Liverpool pour y voir Cissé (si tel était le cas, la déception serait grande pour eux). Il est vrai que les autres protagonistes du club (à savoir les titulaires indiscutables) n’ont que très peu de talent. Voir Gerrard puissant, régulier, doué d’une grande vista, Kewell au pied gauche extraordinaire, Luis Garcia, monstre de technique… pas question! Donnez-nous Cissé avec ses hors-jeu à répétition et son individualisme patent…
Hors-champ
Le sommet du ridicule fut atteint lorsqu’il y a quelques mois, à la fin d’un match, Cissé, comprenant qu’il n’allait pas ce jour-là rentrer sur le terrain (la routine quoi), offrit son maillot à un jeune spectateur. Et là, ce n’est pas le geste tout à fait louable de Cissé que l’on critique mais les commentaires des journalistes nous décrivant (faute d’images) dans les moindres détails l’événement et ce pendant au moins trois bonnes minutes!
Cerise sur le gâteau et pour s’enfoncer allègrement et sans discernement dans le chauvinisme primaire, le match ne se terminera pas sans une pointe acerbe à l’égard de Benitez, le méchant entraîneur qui ne fait pas jouer notre idole. Ainsi nos commentateurs, jamais à cours d’humour involontaire, n’en finissent pas de regretter le temps béni (pas tez) du beau jeu développé par le Liverpool de l’époque Houiller. Certes "c’était moins efficace, mais tellement plus agréable". Eux seuls, ce jour-là à Anfield, s’en souvenaient…
S’il vous plaît, journalistes et consultants, arrêtez ce parti pris pathétique qui produit chez la plupart des téléspectateurs l’effet inverse de celui désiré. À savoir un agacement qui fait oublier les vraies qualités de Cissé : une hargne, une volonté et une fougue jamais démenties qui – quand elles sont bien gérées par l’intéressé –, font de lui un joueur loin d’être ridicule.