Panne décence
Des millénaires de civilisation picturale, depuis les grottes de Lascaux, pour déboucher dans la repoussante intimité de ces douches de gymnase vétuste, il y a de quoi désespérer. Le spectacle annuel de Cris en slip couinant sa joie devant les tribunes de Gerland est déjà très éprouvant, mais si en plus des fabricants de sous-vêtements organisent ce genre d’exhibition crypto-gay... Et le fait d’avoir pudiquement placé Gennaro Gattuso au fond à droite de la scène ne constitue pas une circonstance atténuante.

Mes détracteurs auront tôt fait de m’accuser d’homophobie, mais ils se fourrent le doigt... où bon leur semble. Je n’ai ainsi aucune honte à confesser quelques pulsions anciennes et chastes pour mes pairs de l’internat (je précise pour les jeunes générations qu’ils n’ont rien à voir avec les paires de l’Internet). Mais mes fantasmes liminaires datent d’une époque où la virilité s’exprimait à grands renforts de pilosité : barbes à la Breitner, rouflaquettes à la Bonhof, tignasses à la Neeskens, moustaches à la Mazzola, etc. J’avoue tout aussi volontiers le trouble juvénile ressenti quand je constatai, en 1977, que la tache de sueur sur la poitrine de Dominique Bathenay formait indubitablement un cœur. Mais alors là, le spectacle de ces footballeurs lustrés comme des rampes d’escaliers, jolis comme des filles, réduits à l’état d’accessoires érotiques pour rombière décatie a de quoi me renvoyer au niveau de tolérance d’un milicien texan.
Certes, les Italiens ont toujours perdu une partie de leur influx à veiller au rétablissement de leur coiffure après un tacle... Mais de là à se retrouver en si fâcheuse posture, plantés comme des godemichés dans un pot à vaseline, il y a une marge qu’une mâle dignité aurait dû s’interdire de franchir. Mais comment s’en étonner, à une époque où les vigoureuses odeurs de sueur et d’arnica ont été remplacées dans les backrooms d’un football décadent par les fragrances débilitantes des crèmes de beauté?