Le plan média de Franck Leboeuf
Sympa, drôle, et super défenseur… C'est la télé qui le dit!
Aujourd'hui, tout autant que le niveau technique, les connaissances tactiques et la science du jeu, un bon plan média peut être nécessaire pour arriver à ses fins. Du moins quand la sélection du joueur ne paraît pas évidente : il ne viendrait pas à l'idée d'un Zidane, d'un Vieira ou d'un Trezeguet de multiplier les apparitions publiques. Elle a déjà effleuré celle d'un Djorkaeff, spécialiste de l'utilisation de la presse sportive pour servir ses intérêts dans les moments délicats (voir Djorkaeff, le mystificateur). Avec Franck Lebœuf, on franchit un palier dans la maîtrise de l'image. Au contraire de l'attaquant de Kaiserslautern, qui limite ses interventions à l'Equipe, France Football, ou aux pages sportives du Parisien, le défenseur central de l'OM a pour sa part décidé de jouer la carte du grand public.
Dimanche dernier, il a donc eu droit à près de trois heures d'antenne sur France 2, dans l'émission Vivement Dimanche. Comme la plupart des hommes politiques de notre pays, l'ancien joueur de Chelsea a compris l'intérêt que pouvait présenter pour lui sa présence aux côtés de Michel Drucker. Plus connu pour ses flatteries que pour son sens critique, l'indéboulonnable animateur de la deuxième chaîne a ainsi donné une occasion en or à Lebœuf de se mettre en valeur. Point de questions embarrassantes sur le niveau de jeu de l'International, sur le fait qu'il ait parfois perdu la confiance de son entraîneur dans une équipe de Chelsea qui n'a jamais été brillante, ou même sur le fait qu'il n'ait jamais joué dans une formation ayant participé à la course au titre, que ce soit en France ou en Angleterre. Une occasion en or, également, de se rendre naturellement sélectionnable — s'il passe à la télé, c'est qu'il doit être bon — aux yeux de trois millions de téléspectateurs (audience habituelle de l'émission), qu'ils soient passionnés ou néophytes. Enfin, une occasion en or de s'attirer un capital sympathie en présentant son père, sa mère ou ses amis du show-biz, comme Richard Bohringer. Des opportunités bien utiles quand certains médias sportifs autant que satiriques (Les Guignols surtout) remettent en cause la légitimé de sa présence chez les Bleus.
Etre partout, tout le temps
Cette stratégie ne date d'ailleurs pas de ce week-end. Lebœuf en est un grand habitué: outre ses apparitions dans la presse people, pourtant habituellement réservée à des champions avérés, le Marseillais s'est déjà fait remarquer par sa participation à de nombreux autres programmes télévisés extra-sportifs, bien qu'il se défende de le faire (comme dans une interview de France Football datant de la rentrée). Pendant les vacances de Noël, on l'a ainsi vu apparaître sur nos écrans avec son épouse dans la très populaire série "Un gars, une fille", toujours sur France 2. Dans une publicité pour la viande bovine, il se livrait également à un petit jeu d'autodérision. Plus tôt dans la saison, il répondait aux questions très tendance d'Ardisson dans son émission du samedi soir. On le voyait enfin donner la réplique à Jean-Pierre Foucault, dans la pale copie du Late Show que TF1 avait tenté d'imposer le mercredi soir (1). Toujours le même credo : paraître sympa, drôle et occuper en permanence le terrain… médiatique!
La réputation de Franck Lebœuf — qui lui a permis d'intégrer l'équipe de France — a principalement été créée par la presse sportive. Celle-ci a fait suite à son départ dans un prétendu grand club d'outre-Manche, à une époque où ce genre de tentative à l'étranger n'était pas monnaie courante. À l'heure de son retour au bercail dans un championnat décrié et dans un club qui peine à retrouver son lustre d'antan, le Marseillais a décidé d'user à plein de toutes les armes médiatiques. Les meilleurs défenseurs centraux français, jeunes ou moins jeunes, comme Sylvestre, Cygan, Cristanval, Sommeil ou Mexès, peuvent suivre l'exemple du maître et commencer à prendre des contacts dans le Who's Who médiatique. Il semble que ce soit à ce prix, aujourd'hui, que se gagne et se conserve une place au soleil des champions du monde.
(1) On peut également signaler –par le passé- une participation à Nulle Part Ailleurs, une autre à Fort Boyard en juillet 2000 (encore avec sa femme), et une dernière au jury de Miss France, sur TF1, le 9 décembre de cette même année.
Dossier Lebœuf :
Lebœuf, le sursis à perpétuité
Arrête Franckie, c'est pas bon.