L'officiel sur la tête
Très remonté contre L'Équipe, l'Olympique lyonnais nous a encore gratifiés d'un communiqué d'anthologie. Le service communication de l'OL est officiellement malade.
Auteur : Étienne Melvec
le 11 Mars 2008
Depuis qu'il a accédé à la noblesse de la cotation en bourse, l'Olympique lyonnais fait tout pour avoir l'air d'une vraie entreprise – une tache ardue pour un ancien club de football. Assemblée générale, publication des résultats ou présentation du projet OL Land sont autant d'occasion de faire chauffer les présentations Powerpoint et de donner des rendez-vous à la presse économique.
Les pieds dans la syntaxe
Il est toutefois un domaine dans lequel le club rhodanien laisse persister un amateurisme regrettable: celui de la communication. Une évidence ancienne, puisque aucun conseiller, aucune agence spécialisée, aucun spin doctor téméraire n'est jamais parvenu expliquer à Jean-Michel Aulas que c'était bien gentil de "protéger les joueurs" en battant des records d'antipathie, mais que cela avait des effets nuisibles pour l'image de son affaire.
Il y a un an, nous avions déjà alerté sur les lacunes d'une communication qui, pour être officielle, n'arrivait même pas à la cheville de la prose soviétique de la grande époque, prenant l'exemple d'un communiqué qui conjuguait "une syntaxe similaire à la technique de Bernard Mendy avec un argumentaire comparable au fond de jeu du FC Nantes" (lire "Le diable sans costume Pravda").
Stop les méchants !
Las, à l'image de son président, le service des relations extérieures continue d'abreuver son sillon d'un seing impur en alignant avec régularité des communiqués vengeurs, luttant farouchement contre les forces liguées contre l'OL. Le dernier en date semble un pur produit des névroses aulassiennes et s'intitule "L'Équipe, stop!". Comme nous comprenons très bien que vous avez déjà du mal à nous croire, nous vous invitons à vérifier sa présence sur le site officiel.
L'exercice est tellement en décalage qu'il nous poserait presque en défenseurs du quotidien sportif, s'il ne s'agissait avant tout de diagnostiquer les pathologies dont souffrent les dirigeants olympiens. L'OL en veut en effet terriblement au journal spécialisé, coupable des deux articles titrés "L'OL n'y arrive pas" et "Une équipe à repenser", la semaine dernière, ainsi que d''un dénigrement perçu comme systématique "depuis quelque temps". Il est vrai que l'automne dernier a été le moment de quelques échauffourées entre les deux institutions du football français (lire "Tirs de mortier entre L'OL et L'Équipe"), Vincent Duluc, préposé au suivi du club, pouvant avec la même aisance voler au secours de la victoire comme de la défaite – quitte à ressortir les mêmes titres vengeurs à quelques mois d'écart (lire "À double titre").
Moins de philosophie
Cette crise de rage infantile, truffée de contradictions (on a ainsi du mal à déterminer s'il faut penser que l'OL est un "petit club" ou non), paraît avoir été par un adolescent en colère (JMA lui-même?), révolté par tant d'injustice et dénonçant "une situation de monopole qui conduit à une attitude méprisante pour ceux qui entreprennent et/ou réussissent!" Bande de jaloux. Pensez que L'Équipe ose même critiquer Fabio Grosso – comme, à tort ou à raison, les trois quarts des observateurs patentés ou non (1).
Que les fans et les actionnaires se rassurent quand même: l'OL et ses dirigeants "assument leur choix, quitte à irriter ou vexer anormalement les journalistes de L’Équipe auxquels ils demandent plus d’humilité, moins de dédain, moins de mépris et une reconnaissance plus professionnelle, moins philosophique, du travail accompli chaque jour et sans relâche depuis vngt ans". Comprenne qui pourra.
L'Équipe n'a manifestement pas cherché à comprendre, et a royalement ignoré les admonestations de l'OL (y compris celle leur enjoignant de soutenir "un peu plus les initiatives certes cocardières mais qui font du bien au moral et à l’esprit d’initiative des Français"), ne leur accordant pas même une allusion. Ce n'est pas très charitable, mais c'est finalement ça le plus drôle.
(1) Il faut dire que le jour où Jean-Michel Aulas a déclaré "On aime bien Éric, mais on pense que Fabio Grosso sera plus constant et commettra moins d'erreurs défensives", il n'a pas franchement servi la cause de sa recrue.