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Chesterfield-Mansfield, le derby de Thatcher

La volonté de Margaret Thatcher de démanteler l'industrie minière a enfanté le derby le plus politisé du football britannique.

Auteur : Kevin Quigagne le 19 Avr 2023

 

Vingt kilomètres séparent les villes de Chesterfield et Mansfield dans le centre de l'Angleterre, situées entre les métropoles de Sheffield et Nottingham. Leur club professionnel respectif a le plus souvent navigué entre D3 et D5. Jusqu'en 1984, la rivalité était d'ordre géographique, comme quasiment partout ailleurs.

La grève des mineurs va changer la donne et radicalement durcir la nature de l'antagonisme. Pour approfondir sur les liens entre le football et la grève des mineurs 1984-1985, lire ce double article de Teenage Kicks. Lire aussi "Thatcher a instrumentalisé et diabolisé le football".

En 1984, la zone est un important bassin houiller, surtout autour de Mansfield (comté du Nottinghamshire), versant est de la barrière artificielle formée par l'autoroute M1, l'épine dorsale du pays. Le coin de Mansfield compte alors vingt-six puits employant 32.000 mineurs, contre 10.000 sur Chesterfield (Derbyshire).

Thatcher contre les mineurs

Ce secteur nationalisé, en déclin depuis les années 1960, est fortement subventionné. Un consensus national prévaut depuis la vague de nationalisations d'après-guerre, dictant en l'espèce qu'une mine ne peut être fermée sans l'accord préalable des mineurs et de leur puissant syndicat, le National Union Mineworkers (NUM). Margaret Thatcher est bien décidée à être la fossoyeuse de ce contrat social, et du syndicalisme par la même occasion.

Le 5 mars 1984, la grève démarre à 40 km au nord de Chesterfield, à la suite de la fermeture de Cortonwood (Sud Yorkshire), décrétée par le National Coal Board (NCB), l'équivalent britannique des Charbonnages de France. Deux jours avant, ce puits avait pourtant reçu l'assurance du NCB qu'il resterait ouvert car rentable, et 80 mineurs avaient même été récemment embauchés pour faire face à la hausse des commandes.

Cortonwood se trouve près de Barnsley, le bastion du NUM et de son leader Arthur Scargill, l'ennemi juré de Thatcher que le Sun de Rupert Murdoch dépeindra en Nazi en mai 1984 (cette une ne sortira pas, les imprimeurs syndiqués refuseront d'imprimer le montage titre-photo). Simple coïncidence ou attaque symbolique ?

 

 

C'est une grève nationale controversée car décidée unilatéralement par le NUM. La moitié des mineurs du Yorkshire arrête immédiatement le travail et la plupart suivront [1]. À travers le pays, presque 200.000 gueules noires sont concernées. Officiellement, seuls 20.000 emplois "non rentables" sont menacés.

Le NUM est toutefois convaincu que le nombre de licenciements dépassera les 100.000 d'ici 1990 et que le but inavoué de Thatcher est de privatiser le secteur, avant de l'atomiser. L'avenir donnera raison au NUM, comme le montreront des archives ministérielles de 1984, déclassifiées en 2014. Environ 64.000 suppressions d'emploi étaient programmées d'ici 1987.

L'objectif de Thatcher est aussi d'écraser les syndicats, en particulier le NUM. Émasculer le syndicalisme et les corps intermédiaires lui permettrait d'avoir les coudées franches pour désindustrialiser et réformer des pans entiers du droit du travail, à commencer par la législation sur les modalités et préavis de grève.

 

Arthur Scargill à Orgreave, en mars 1984. Photo SSPL.
Arthur Scargill à Orgreave, en mars 1984. Photo SSPL.

 

In fine, il s'agit de mener à bien le programme de démantèlement et privatisations-dérégulations des secteurs publics et entreprises d'état, des bastions gauchisants à la solde de syndicats militants selon Thatcher (une cinquantaine d'entreprises majeures seront privatisées, de l'énergie aux télécoms en passant par l'acier ou les transports).

La Dame de fer va jouer la carte de la division et monter les mineurs les uns contre les autres. Concrètement, le plan va consister à fermer des mines et en laisser d'autres ouvertes, afin d'affaiblir et pourrir le mouvement, tout en discréditant le NUM. Thatcher avait essuyé une avanie en 1980-1981 et, sous la pression du NUM, avait dû abandonner un programme de fermetures d'une vingtaine de puits.

Cette fois, pas question de reculer, même si elle sait que la bataille sera âpre. Mais, contrairement aux grèves et alertes précédentes (1972, 1974 et 1981), d'importantes réserves en charbon ont été constituées et elle a demandé aux centrales thermiques de se tenir prêtes à utiliser des combustibles fossiles autres que le charbon. Elle a aussi fait embaucher des routiers non syndiqués pour le transport entre dépôts. L'armée de terre est même en stand-by, au cas où.

Des grévistes et des jaunes

Même si des incidents sont relevés entre les supporters de Chesterfield FC et Mansfield Town dans les années 1970 et en 1983 [2] (hooliganisme oblige), la rivalité change de nature et monte de plusieurs crans en mars 1984, quand les mineurs du Derbyshire votent en faveur de la grève, alors que ceux de Mansfield décident à 75% de continuer de travailler... après avoir initialement également voté pour cesser le travail.

La raison de cette volte-face : le gouvernement a entre-temps assuré aux mineurs de Mansfield que les puits du Nottinghamshire, décrits par le NCB comme économiquement viables, ne fermeraient pas [3]. Vu de Chesterfield, les mineurs de Mansfield sont des traîtres et des scabs (jaunes), accusés de rouler pour Thatcher.

Pour Scargill, le long et coûteux combat n'est gagnable que si aucun puits ne tourne, même si les sacrifices sont immenses. Rob Ford, fils de mineur, évoque ici la générosité des syndicats français qui envoyèrent dons et nourriture.

 

 

Scargill sait que la détermination des gueules noires du Nottinghamshire est historiquement moins forte qu'ailleurs, surtout comparé au Yorkshire ou au pays de Galles (où approximativement 90% d'entre eux seront grévistes toute une année), et que même s'ils revotent pour la grève, la situation sera fragile.

Sa stratégie est de bloquer l'accès aux puits environnant Mansfield, en envoyant des bus entiers de piquets de grève mobiles ("flying pickets"). Devant les mines et ailleurs, les heurts à trois bandes se multiplient, entre grévistes, non-grévistes et la police, chargée de dégager les entrées. On s'en prend physiquement aux Scabs, à leur maison ou leur voiture. La violence se banalise.

Le 14 mars, devant la mine d'Ollerton près de Mansfield, le gréviste Davy Jones meurt après avoir reçu une brique sur la tête. Le 15 juin, à la centrale électrique de Ferrybridge (Ouest Yorkshire), le mineur Joe Green est écrasé par un camion qui tente de forcer le passage. Le 18 juin, la terrible "Bataille d'Orgreave", à 40 km de Mansfield, fait 123 blessés.

Fin novembre 1984, David Wilkie, un chauffeur de taxi qui conduisait deux "briseurs de grève" vers une mine du pays de Galles, est tué par un bloc de béton jeté par deux grévistes d'un pont routier. Des accidents semblables avaient marqué la grève de 1972, un bras de fer remporté par les mineurs.

"Suppôts de Thatcher"

La haine entre les communautés, entre les grévistes et les jaunes, atteint son paroxysme et déborde sur le football alors gangrené par le hooliganisme. Le surnom de Mansfield Town étant les Stags (cerfs), leur nouveau blaze tout trouvé, les Scabs, est phonétiquement dans le ton.

 

Novembre 1984 à Armthorpe. Photo John Sturrock / Reportdigital.
Novembre 1984 à Armthorpe. Photo John Sturrock / Reportdigital.

 

Les clubs s'affrontent à deux reprises en D4 pendant la grève, le 21 avril et le 26 décembre 1984. De nouveaux chants se font entendre, à base de "Scabs, scabs, scabs" et "Thatcher's henchmen" (suppôts de Thatcher). Projectiles et insultes pleuvent, mais la police maîtrise la situation.

Il en sera différemment pour la rencontre du 6 avril 1985 (0-0), disputée devant 6.000 spectateurs au stade Field Mill de Mansfield. Avant et après le match, plusieurs centaines de hooligans causent une série d'incidents que la police, débordée, n'arrivera pas à contenir. D'un côté, trois firms de Mansfield (Shady Express, SAS et Psycho Express), de l'autre la notoire Chesterfield Bastard Squad.

L'expulsion du capitaine de Mansfield met le feu aux poudres. Des dizaines de spectateurs envahissent le terrain et tentent d'en découdre, mais la police et les stadiers parviennent à les tenir à l'écart. Les protagonistes reprennent les hostilités dans les tribunes et le parcage visiteurs et arrachent des sièges. Plusieurs commerces et pubs seront ensuite vandalisés. Bilan : une dizaine d'hospitalisations et seize arrestations.

Au soulagement des autorités, Chesterfield monte en D3 le mois suivant... suivi par Mansfield en 1986. Malgré la catégorisation de ce derby chaud en statut "bubble" [4], le scénario se répétera au fil des saisons où les nouveaux ennemis jurés évolueront dans la même division.

Le 29 août 1987, à Mansfield devant 5.200 spectateurs, des bagarres éclatent en tribunes et dans les travées. Au match retour, le 1er janvier 1988, des supporteurs Stags sont attaqués en ville et à la gare routière, à coups de pierres et briques. La décennie 1990 sera plus calme, les trublions tirant généralement dans des catégories différentes.

Retrouvailles sur un champ de bataille

Le 16 septembre 2000, devant 7.000 spectateurs en D4, Chesterfield fesse Mansfield 4-0 à domicile. Une horde de 150 hooligans Stags, renforcés pour l'occasion par une centaine de nervis d'une firm de Nottingham Forest, quittent Saltergate dix minutes avant la fin. Environ 300 locaux, alliés à des éléments de Leicester City et Derby County, les imitent.

Des échauffourées ont lieu autour du stade puis en ville. La police, en nette infériorité numérique, est à la ramasse. Un plan sera élaboré pour éviter un carnage au match retour à Mansfield, en février 2001. Hormis les traditionnels jets de projectiles, des bagarres et une dizaine d'arrestations, tout se passera relativement bien.

 

 

Chesterfield remontera en D3 cette saison-là et y restera quelque temps. Malheureusement pour les Spireites, Mansfield les rejoint en 2002 et la rencontre à Field Mill en août se passe mal. D'énormes moyens pour un match de D3 à faible affluence seront déployés pour le match retour à Saltergate, le 18 janvier 2003 : 300 stadiers et forces de l'ordre, hélicoptère, police montée et brigade canine.

Les progrès réalisés dans le renseignement et la prévention limitent les affrontements. Ce sera la dernière saison de Mansfield à ce niveau. Histoire d'entretenir la haine, les hools des deux clubs arrangeront ensuite des fights, comme ce 26 août 2006 en marge d'un Mansfield-Lincoln City de D5. Des dégâts mineurs et une quinzaine d'arrestations seront à déplorer.

Les voisins belliqueux se retrouvent en 2007-2008 (en D4), ainsi qu'en FA Cup fin 2008, et les débats se déroulent pacifiquement. Un serrage de vis des autorités explique aussi cela (soixante supporters sont alors frappés d'interdiction de stade).

Enemies reunited

Mansfield Town, dont la directrice générale est la médiatique Caroline Radford, évolue depuis en D4, et n'a plus guère affronté Chesterfield, qui montera en D3 et y restera trois saisons avant de dégringoler en D5 en 2018, où les Spireites végètent encore.

Ces deux-là se sont croisés dans l'ascenseur (en D4) en 2013-2014 et 2017-2018, mais le coup d'envoi avancé ainsi qu'une bonne gestion ont permis d'éviter les problèmes.

 

Derby 2013. Photo Chesterfield FC.
Derby 2013. Photo Chesterfield FC.

 

Par ailleurs, les stades sont mieux sécurisés et le hooliganisme s'est marginalisé, même si on constate occasionnellement des résurgences (période post-pandémie) et autres ponctuels déchaînements de violence. Chez les Spireites d'un certain âge, le feu de la colère brûle encore. L'amertume et les rancœurs sont tenaces dans ces communautés du Derbyshire et Nottinghamshire.

Les décennies passées et l'éloignement des faits ont toutefois atténué les haines et la portée des significations politiques, même si une féroce hostilité subsiste et que l'on entend toujours des "Scabs, scabs, scabs" quand leurs routes se croisent. La gentrification des tribunes a fait le reste : l'abonnement adulte coûte 375 livres à Mansfield et 430 à Chesterfield en D5.

Si l'alignement des planètes est favorable à Chesterfield, et au contraire défavorable à Mansfield (en lice pour accrocher les barrages de montée en D3), la réunion Enemies Reunited pourrait se tenir la saison prochaine en D4.

 

[1] Le film Brassed off (Les Virtuoses) a été majoritairement tourné à Grimethorpe dans le Sud Yorkshire, en grande banlieue de Barnsley.

[2] Certains de ces faits sont évoqués dans le livre The A-Z of Britain's Football Hooligan Gangs (2005), dont les auteurs sont Nick Lowles et l'ex-hooligan Andy Nicholls.

[3] Le gouvernement ne tiendra pas ses engagements. La moitié des 26 mines du Nottinghamshire sera fermée avant 1990, soit un rythme encore plus élevé que dans le Derbyshire autour de Chesterfield (3 sur 7 fermées avant 1990). En 1995, il ne restait plus que 5 puits en (semi) activité dans ce bassin houiller. La dernière mine du coin (et l'avant-dernière du pays), Thoresby Colliery, située à 10 km de Mansfield, a fermé en 2015.

[4] Les modalités d'un bubble match varient d'un derby à l'autre, selon la distance et les pratiques locales, mais en général les supporters doivent être "encadrés" du début au retour, comme s'ils étaient placés dans une bulle. C'est aujourd'hui une option controversée et peu utilisée dans une forme stricte (des versions plus souples existent).

Réactions

  • Hydresec le 20/04/2023 à 08h59
    Elle en aura fait des ravages, "Miss Maggie". Encore un superbe article. Bravo et merci !

  • theviking le 20/04/2023 à 13h58
    Oui, super article, merci beaucoup.

  • Mangeur Vasqué le 20/04/2023 à 23h35
    Effectivement. Le drame en l’espèce (les mines) ne réside pas tant dans la disparition d’une industrie vouée à l’extinction depuis les Sixties que dans l’absence de véritable perspective économique durable (emplois solides) pour les centaines de milliers, voire les millions, de personnes ou familles touchées, directement ou non.

    L’économiste Anna Stansbury a écrit (j’hésite à dire “démontré”) que la brutalité de la désindustrialisation au Royaume-Uni, surtout dans les Midlands et le Yorkshire, n’a eu d’équivalent en Europe que dans les pays de l’Est pendant leur transition vers le capitalisme, lien : “This is so striking it bears repeating. The only other parts of Europe that ever saw deindustrialization as rapid as the Midlands and Yorkshire did in the ‘80s were formerly Communist countries transitioning to capitalism”.

    Thatcher était dotée d’un sens politique aigu. Contrairement aux gourdiflots de leaders travaillistes de l’époque, que l’un des professeurs en vue de ma fac d’anglais vénérait. Ce professeur, déplaisant et arrogant par ailleurs (il ne te donnait guère envie de suivre, et participer à, ses cours) nous parlait sans cesse de ses “tea sessions” avec Michael Foot lien et Neil Kinnock lien. Putain que cette gauche anglaise trempée dans le “Bennitier” lien s’avère contre-productive dans notre bipartisme britannique. Pas étonnant que les Travaillistes soient si peu souvent aux manettes.

    Une gauche certes bien plus intègre et mieux intentionnée que les Conservateurs (pas difficile), mais alors viscéralement paroissiale dans son anti-UEisme primaire et sans intelligence politique. Par respect, je tairais le nom de ce professeur (paix à son âme il est décédé en 2020 à 86 ans. Professeur spécialiste de civilisation US alors très connu dans les milieux anglophisants).

    Les travaillistes s’étripèrent tellement au tout début des années 1980 qu’ils finirent par faire scinder le parti en deux ! La formation en 1981 du parti dissident de centre-gauche SDP lien), scella le sort des Travaillistes et les exclut du pouvoir pendant 18 ans, jusqu'à Blair. Thatcher était prenable (marasme, chômage chronique, etc.) mais vu la faiblesse et les divisions de l'opposition pendant tant d'années, elle joua sur du velours. Ça et la fièvre nationaliste (guerre des Malouines), ainsi qu'une offensive de charme dans les médias (où elle se reussit à se faire passer pour une ménagère sympa et à l'écoute de "l'Angleterre qui se lève tôt", contrastant avec l’austère personnalité des leaders travaillistes), le Parti conservateur fit exploser les compteurs aux General Elections de 1983 lien (meilleur score depuis 25 ans, qui tiendra jusqu’au raz-de-marée Boris Johnsonien en 2019, 365 députés).

    Dans les années 1980, Thatcher avait aussi évoqué d’une “révolution environnementale” pour accélérer la fin du charbon, une sorte de rapide transition énergétique écolo (“The pit closures of the 1980s – part of Mrs Thatcher’s green eco-strategy?” lien). Ce faux élan écologique ne verra bien sûr jamais le jour.

    Ce qu’on verra par contre pour remplacer le charbon est ce qu’on surnomma lien “the dash for gas”, la ruée (temporaire) vers le gaz à partir des Nineties (en Mer du Nord mais aussi importations), via une conversion à la technologie CCGT lien.. Une transition vers le gaz qui se matérialisera partiellement (“Gas consumption peaked in 2001 and has been in decline since 2010.”). Voir le mix énergétique aujourd’hui lien.

    La privatisation de British Gas en 1986 et l’ouverture aux marchés enclenchèrent la dérégulation. Les effets ne fait que s'aggraver. Absence d’un vrai régulateur, scandale des 4 millions de compteurs prépayés ces dernières années (système de compteurs qui touche très fortement les plus défavorisés, ce sont eux évidemment qui ont ces compteurs) ou absence de vrai bouclier énergétique, ce qui contribue à la plus forte inflation, et de loin, parmi les pays du G7 ou de l’Europe de l’Ouest. Des dérégulations successives et sauvages, sans avantage pour le consommateur.

    Une fragmentation (existence de dizaines de fournisseurs d’énergie) sans cadre robuste qui fait mal en cas de grosses turbulences, comme par exemple en 2021 : écroulement et disparitions soudaines d’une trentaine de fournisseurs qui vont laisser en plan 4 millions de foyers plus ou moins vulnérables économiquement et faire payer l’ardoise aux contribuables – lien “Since July 2021, 29 energy suppliers have failed, affecting around 4 million households. Customers have been left to pay the £2.7 billion cost of supplier lien).

  • Mangeur Vasqué le 20/04/2023 à 23h50
    La France a également sacrément morflé au niveau désindustrialisation brutale bien sûr. Les départements lorrains et de l’ancien Nord-Pas-de-Calais en particulier mais aussi ailleurs. On pense à l’axe Abbeville-Amiens (le long de la Nièvre, textile) et au bassin d’Amiens, ou aux départements 30 et 42, et à des agglos moyennes comme Nevers ou Saint-Dizier, laquelle s’est considérablement dépeuplée (usine Miko, etc.). Des vrais emplois disparus et remplacés par pas grand chose.

    Dans quelques gros bassins houillers britanniques, on a un peu remplacé les mines par “autre chose”, de la tertiarisation surtout, des services. Notamment des centres d’appels. Les centres d’appel devinrent un peu la nouvelle religion dans le nord de l’Angleterre à partir des 1990s (beaucoup seront ensuite délocalisés, en Inde et ailleurs sur le Sous-continent). Comme par exemple dans la Dearne Valley (Sud Yorkshire, où commença la grande grève des mineurs 1984-85), où j’ai travaillé pendant six ans dans la deuxième partie des années 1990, là où furent tournés “Kes” et “Brassed off/Les virtuoses”.

    Ailleurs, cette masse d’emplois évaporés fut parfois partiellement remplacée (mais trop rarement) par de grosses usines, parfois de grosses success stories, comme Nissan en 1987 à Washington-Sunderland (banlieue de Newcastle). Grâce à 100 % à l’adhésion à l’UE dans le cas de Nissan, ce que Thatcher minimisa bien sûr. Elle vendit ça comme "son" succès.

    Une Thatcher très pro UE à son arrivée en 1979 mais très vite “eurospectic”, plus par opportunisme – chouette, un bouc-émissaire tout désigné sur lequel taper – que par idéologie (eg cette photo de Thatcher en 1975 portant un t-shirt des 9 drapeaux CEE lien, pendant la campagne du référendum de “validation” d’adhésion lien).

    Mais dans beaucoup de coins, il n’y a pas eu de réflexion profonde, de programmes concertés pour permettre à ces gens de retrouver emploi et dignité. Juste quelques miettes du gouvernement et des fonds urgences de l’UE, dans le cadre de programmes de régénération.

    Je me souviens que la Dearne Valley et les coins houillers du pays de Galles avaient bénéficié des subsides UE “Objective One”. Le coin de Liverpool aussi (pas un bassin houiller cependant, mais un coin particulièrement en souffrance). Les Cornouailles aussi, qui remercièrent l’UE en votant “Leave” à 56 % au référendum de juin 2016) lien (y’a eu beaucoup de mines dans les Cornouailles, mais d’étain et d’argent lien. Pas mal de vestiges de cette époque, notamment des cheminées qiu surgissent comme ça au milieu de nulle part lien).

    Le manque de préparation, de “vision”, c’est surtout ça le coupable dans cette histoire. Rien que dans le secteur de la mine, en à peine dix ans, on a supprimé 200 000 emplois directs (et environ 1 000 000 indirects) sans penser à l’après-charbon. On ne peut aller contre le cours des évolutions économiques mais anticiper et s’y préparer devraient être des obligations, et non des “afterthoughts”, de vagues considérations en aval packagées en fatalités qui frappent les malchanceux, ceux qui pas de bol se trouvent “du mauvais côté de l’histoire”, les agneaux sacrificiels et autres malheureux losers de l’inarrêtable marche des choses.

  • Jah fête et aime dorer Anne le 11/06/2023 à 19h02
    encore merci pour l'article et les précisions dans les commentaires.

  • Mangeur Vasqué le 11/07/2023 à 18h00
    De rien Jah. Il n'y aura malheureusement pas de derby Chesterfield-Mansfield la saison prochaine puisque Chesterfield a perdu de justesse (face à Notts County) en finale des barrages de montée en Football League (D4) le 13 mai à Wembley, aux tirs au but après un superbe match (2-2), et donc les Spireites resteront en non-League (D5).

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