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La Premier League, super ligue à elle seule

Une Balle dans le pied - L'élite anglaise continue d'écraser le marché des transferts et l'économie du football européen, au point de susciter de tardives velléités de régulation et de redistribution. 

Auteur : Jérôme Latta le 15 Fev 2023

 

Rien n'affecte la Premier League, dans un Royaume-Uni qui plonge pourtant dans la récession et subit une inflation à plus de 10%. Ni la baisse de la livre sterling après le Brexit, ni le Brexit lui-même n'ont amoindri la suprématie économique de l'élite anglaise sur le football européen, qui continue de s'accentuer.

En septembre dernier, nous avions présenté une série de données de l'Observatoire du football indiquant qu'en 2022, les clubs de Premier League avaient dépensé en transferts presque autant que les quatre autres grands championnats européens réunis. (...)

Les dépenses des clubs de Premier League, plus puissants que jamais, se sont élevées à plus de 900 millions d'euros durant le mercato d'hiver 2023, représentant 79% des dépenses du "Big 5" européen, selon une note du cabinet Deloitte, une proportion inédite. (...)

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Réactions

  • Mangeur Vasqué le 15/02/2023 à 23h59
    Excellent article de synthèse. Trois observations :

    1) On constate une plus forte ingérence des gouvernements en général, face aux diverses dérives (eg en France, AOC vs la 3F). En général, c’est réactif : on attend que la situation soit pourrie pour intervenir.

    En Angleterre, c’est le cas du gouvernement conservateur depuis quelque temps face aux dérapages et à la passivité (“laisser-faire”) de l’hégémonique instance Premier League. Faut dire aussi que l’opposition, les Travaillistes, leur rentre de plus en plus dedans sur les dossiers du football lien, donc ils réagissent.

    Cette ingérence marquée des Conservateurs n’est pas arrivée innocemment. Comme je l’ai écrit par le passé (dans l’articles sur Chelsea par exemple), il s’agit essentiellement de manœuvres populistes et tentatives de diversion.

    L’incarnation majeure de cette ingérence en Angleterre est donc la volonté du gvt d’imposer ce fameux “régulateur indépendant” – qui sera vraisemblablement affilié à/contrôlé par un ministère (celui des sports ?), donc probablement pas si indépendant que ça (cf ce qui se passe à la BBC ces dernières années). Fort amusant de la part des Conservateurs car “réguler” n’est pas franchement leur point fort... Tout ça n’est certainement pas fait dans un souci de justice ou d’équité.

    Dans l’affaire du rachat de Newcastle par les Saoudiens par exemple, un takeover aux antipodes d'une quelconque régulation (club-État qui dérègle encore plus le championnat), Johnson est intervenu personnellement pour appuyer le rachat. Je l’avais souligné dans cet article lien, en fin de papier, sous l’intertitre “Les Saoudiens, de nouveaux amis à choyer”. Car cô je l’expliquais, ce fut le quotidien régional de Newcastle (The Chronicle) qui le premier détecta l’implication de Johnson et du gvt dans le takeover, attestée par les limiers locaux dès début janvier 2021 lien. Le Guardian rapportera aussi cette interférence, mais bien plus tard – et sans rendre hommage à l’excellent boulot des journalistes régionaux qui furent les preum’s. En plus, sous le titre un peu gonflé de “Revealed: government did encourage Premier League to approve Newcastle takeover”. C’était loin d’être une révélation puisque la presse régionale avait sorti l’info en janvier 2021 et le Daily Mail en avril 2021. lien

    Le gvt veut par ailleurs s’acheter une virginité à peu de frais sur deux points.

    D’un part, en soi-disant impliquant les supporters dans le processus de création de ce régulateur du foot anglais. Y’a bien eu une consultation des supps (en 2021, 6 mois), entre autres, mais au final on verra ce qu’il en restera. Les premiers écrémages, effectués en préparation du "White Paper" (le livre blanc présenté au parlement, projet de loi), laissent à penser qu’il ne restera probablement pas grand chose des suggestions des supporters, via la FSA il me semble (Football Supporters' Association). Une consultation réalisée plus pour la forme qu’autre chose ? De toute manière, l'instance PL et les clubs PL auront plus que son mot à dire dans l'implication directe des supps dans la gestion du club, ce qui était la "mesure" phare annoncée en fanfare par Boris Johnson en avril 2021, sur l'air brexitien du "Supporters, take back control!".

    D’autre part, en jouant le défenseur de la veuve et de l’orphelin, cf sa prise de position en faveur du “minot” Football League dans le débat FL vs PL, profond différend qui tourne autour des “solidarity payments”. Une affaire qui traîne depuis quelque temps et qui revient tous les 3 ans, à chaque fois que les droits TV PL sont renégociés, et qui s’est patriculièrement envenimée en 2021 quand la PL a renégocié à la hausse (+ 30 %) le nouveau deal 2022-2025… sans réévaluer les “solidarity payments”. La PL botte désormais en touche et cherche à gagner du temps, sur les volets principaux de ce “New Deal For Football “, quelques années même puisqu’elle joue désormais sur le retard accumulé dans la naissance de ce régulateur qu’elle récuse lien.

    L’imposition de ce régulateur par le gouvernement est par ailleurs en droit de faire peur. Non qu’il ne soit nécessaire, car il l’est bien, notamment sur le chapitre du “Owners' and Directors' Test“, aka “fit and proper person test” (suggestion d’introduire des critères “éthiques” pour l’acquisition de club, intégrité du racheteur. Avec espérons-le – soyons optimistes… – des mesures prises contre la formation de clubs-États et l’utilisation de montages LBO lien).
    Mais ce gouvernement étant incapable de gérer grand chose efficacement (préférant déréguler, privatiser et sous absolument tout), on peut légitimement s’inquiéter quant à leurs compétences dans ce domaine.

    Certes, les Tories ne seront pas toujours au pouvoir mais ils y sont les trois-quarts du temps depuis 1979 – 30 ans sur 45. Et Labour ne sont pas des foudres de guerre dans ce domaine non plus.

    Après, la PL étant en roue libre depuis sa création, une ingérence du pouvoir, avec espérons-le in fine l’introduction de quelques garde-fous, n’est pas forcément une mauvaise chose. Même si le régulateur s’avère au final bien moins terrifiant que le projet initial l’avait annoncé, son existence ainsi que de potentielles sanctions devraient au moins pousser les instances PL à plus d’action et de vigilance à l’avenir.

    Points 2) et 3) un autre jour.

  • Mangeur Vasqué le 16/02/2023 à 22h45
    2) Tout dépend également de ce qu’on entend par “régulateur”. Ce terme un peu vague est souvent considéré comme un “misnomer”au Royaume-Uni. J’essaierai d’y revenir plus tard.

    Bon, il se trouve qu’on en sait plus sur ce régulateur du football anglais depuis quelques jours, et plus généralement sur les mesures contenues dans le “white paper” (livre blanc) du gouvernement, le document qui articulera dans les grandes lignes de ce qui nous est présenté comme la plus grosse réforme du football anglais depuis la création de la Premier League en 1992.

    Ce “white paper” sera publié la semaine prochaine… mais il a déjà fuité, au moins dans ses grandes lignes.

    Rappelons que ce “white paper” devait être prêt en l’été dernier, et qu’il a été sans cesse repoussé, comme le souligne l'article. Évidemment, vu l’immonde bordel de l’été dernier. Johnson mis dehors, suivi par une mini campagne de Truss et Sunak auprès des 180 000 membres du Parti conservateur, lamentable affaire en petit comité conclue par “l’élection” de Truss (80 000 voix. On élit donc des chefs d’État au Royaume-Uni avec quelques dizaines de milliers de votants...). Suivi par sa démission 6 semaines plus tard. Y’a eu beaucoup de changements de gouvernements, de remaniements, etc. ces dernières années (3 premiers ministres rien qu’en 2022…) donc le processus amorcé début 2021 a été retardé.

    Et on sait de manière quasi certaine qu’il devrait bien comporter la proposition de créer ce fameux régulateur du football anglais, la principale nouveauté, bienvenue mais très controversée car rejetée (bien sûr) par la Premier League, dont la toute-puissance s'en trouvera diminuée. Ce “white paper” est la réponse officielle du gouvernement aux recommandations de la consultation “fan-led review” publiée en novembre 2021. Cette proposition de régulateur figurait dans le programme de Boris Johnson, élu en déc. 2019 (mais c’était vague et tombé en sommeil). L’affaire de la Super League en avril 2021 l’avait remis en selle et la ministre des Sports d’alors, Tracey Crouch, avait porté le projet et dirigé les débats entre les différentes parties prenantes.

    Ce qu’on sait, si on en croit ce qui a fuité, notamment via Sky Sports, c’est que :

    a) ce régulateur sera placé hiérarchiquement au-dessus de l’instance Premier League et aura “en principe” et “quand son intervention sera nécessaire” le dernier mot sur un nombre de questions, notamment financières, entre la fédération, la Football League et la Premier League, dans ce qui été nommé un “New Deal For Football”, mentionné dans l'article (redistribution revenus PL vers les divisions inférieures notamment, les fameux “solidarity payments”, gros point de contention depuis des années que j’évoquais dans mon point #1 d’hier soir). Dans les faits donc, en principe, ce régulateur sera en capacité de contrôler une bonne partie des compétences de l’instance PL (le "en principe" est clé ici...).

    Mesure phare qui ne devrait pas manquer de faire des étincelles avec l’instance PL, si désaccords entre le régulateur et la PL (le payeur, et mauvais payeur)… Le boss de la Football League (Rick Parry), appuyé par le gouvernement et l’opposition, est devenu gourmand et voudrait désormais 25 % des revenus de la PL. Parry en voulait environ 12.5 % l’an dernier. La FL ne reçoit qu’environ 7 % actuellement de la Premier League, au titre des "solidarity payments". Comme je l'ai expliqué par le passé, ces solidarity payments (350 millions/an actuellement) sont essentiellement dûs à deux choses : a) c'est la conséquence de "l'Elite Player Performance Plan" lien négocié en 2011, en gros la PL peut dépouiller les clubs de D2-D4 plus facilement et pour moins cher, et en contrepartie la PL file de l'argent aux divisions inférieures b) c'est un vestige du deal pré-PL entre la Football League et les clubs - à l'époque (jusqu'aux années 1980), la FL versait équitablement les revenus aux 92 clubs professionnels, donc Aldershot ou Torquay United touchait autant que Liverpool (y'avait eu quelques changements/améliorations au milieu des années 1980, en faveur des clubs de D1 qui menaçaient de faire sécession - ce qui se produira via la création de la PL - mais ne rentrons pas dans les détails). Évidemment, Parry n'aura pas ses 25 % mais secrètement il doit se dire que 15 % serait un excellent résultat.

    b) ce régulateur sera “en principe” un médiateur (tout est mis au conditionnel dans les retours qu’on a, "in theory", “it would be”, etc.) sur le nouveau système de “vetting” des potentiels acquereurs (donc le “Owners' and Directors' Test”. On ignore si les nouveaux critères comprendront une partie éthique, comme il était prévu (tollé au moment du rachat de Newcastle en 2020-21 et finalisé en octobre 2021. On ignore aussi si les LBO lien, autre point controversé, feront partie du package réformiste).

    c) ce régulateur sera “en principe” aussi chargé de faire la médiation sur le “licensing” de clubs. Donc l’accord/l’autorisation donné à un club de prendre part aux compétitions diverses (PL, FL, coupes, ou… une éventuelle Super League). Le nouveau système délivrera cette autorisation seulement si le club remplit un certain nombre de critères (à déterminer) mais surtout d’ordre financier. Ça ressemble donc à un nouveau Fair-Play Financier. Tous les trois ans, il leur faudra démontrer via un business plan leur “financial sustainability” (viabilité financière) et, en principe toujours, apporter des preuves qu’ils ont les fonds pour mener à bien ce business plan. En gros, ça ressemble au nouveau FPF de l’Uefa, le Financial Sustainability Regulation (FSR) lien.

    Afin d’une part d’éviter les liquidations judiciaires ou grosses dettes non remboursables/sérieux problèmes financiers (redressement judiciaire) ainsi que les magouilles/montages bien sûr (style contrats sponsoring de complaisance ou les contrats de joueur bidons sur 7-8 ans avec un tas de combines d’amortissement utilisées pour contourner – bien trop facilement – les règles du FPF actuel). On ne sait encore si ces conditions, sur le papier bien plus contraignantes que les courantes, s’appliqueront aux proprios actuels ou à aux futurs.

  • Mangeur Vasqué le 16/02/2023 à 23h11
    Par ailleurs, ce “white paper” prévoirait (comme stipulé dans les recos du ‘fan-led review’) un plus grand “fan engagement” autour de “décisions clés concernant le club”.

    On n’en sait pas plus. Les supps, via la FSA (Football Supporters' Association), avaient exprimé leur désir d’avoir leur propre directoire au sein du club (un “shadow board”). On voit cependant mal la PL ou la FL valider ou accepter ce genre d'intrusion. Et si les clubs étaient forcés d’accepter, il pourrait bien s’agir d’un directoire de supps de pure façade.

    Il serait également question dans ce “white paper” de forcer les propriétaires à “gérer le club au bénéfice des supporters et de la communauté”. Là encore, on peut douter qu’il en ressorte grand chose de bien concret. Les clubs rétorqueront qu’ils ont déjà leur fondation et qu’elles font bcp pour la communauté, ce qui n'est pas faux (même si les clubs ne contribuent pas beaucoup financièrement au financement de leur fondation, entité juridique distincte).

    On est un peu dans une sorte de "fantasy land" sur ces points. Ça rappelle furieusement les recommandations du rapport Taylor post Hillsborough, ainsi que dix ans plus tard celles de la "Football Task Force" de Tony Blair qui, rappelez-vous, promettait en 1999 de “deliver a fair deal for fans” lien (notamment au niveau de la billetterie). On sait ce qu'il est advenu de ces nobles "engagements". Certes, cette fois-ci il s'agira d'une loi d'ensemble, donc en théorie plus contraignante, mais il est aisé de contourner ou mal appliquer les lois. Qui sera chargé de vérifier et le feront-ils scrupuleusement, dans l'esprit de la loi ?

    On en saura plus la semaine prochaine quand ce “white paper” sera publié dans son intégralité, et il est par ailleurs amené à évoluer. Mais déjà on perçoit de sérieuses zones grises et des "loopholes", ce dont je me doutais.

    “Régulateur” ne veut pas dire grand chose en pratique, comme j’écrivais en début de poste précédent. Il faut des legislations en béton, définissant clairement les sphères de compétence de chacun, ainsi que des obligations chiffrées. “Forcer” les clubs, même par une loi, à aider davantage leur communauté ou autre risque fort d’être improductif. Il faudrait établir des %, un cahier des charges, ce genre de choses, avec des obligations et sanctions potentielles.

    Ce régulateur sera-t-il doté de réels pouvoirs, qu’il pourra imposer, pleinement et sans avoir à batailler ou trouver des compromis, aux instances de la PL? Ou sera-t-il, comme tant de “régulateurs” britanniques un “tigre de papier” ?

    Quid des les clubs-États aussi, question centrale si problématique et soigneusement évitée jusqu’à maintenant ? Qui décidera ? Ou aura-t-on d’ici 2030 dix clubs de PL appartenant à des états et donc aux fonds illimités ?

    Ce régulateur "indépendant", inexpérimenté en la matière, roulera pour le gvt. On le voit mal alors ne pas subir de pressions, comme ce fut le cas dans le rachat de Newcastle United.

    Etc.

    Il sera donc fort intéressant, et crucial de voir comment se redistribueront les rôles une fois la loi actée (probablement pas avant 2024, avec ensuite un an ou deux avant qu’elle ne devienne effective).

    La Premier League s’est forgée dans l’adversité, la douleur, dans le bordel de la fin des annees 1980 et du début 1990s. Alors pas question pour elle de se laisser émasculer de la sorte et d’abandonner sans résistance une bonne partie de son pouvoir. On peut s’attendre à de la résistance et, parallèlemment, à une dilution des recommandations initiales au travers du process.

    Il s'agit d'un projet parlementaire et on peut donc suivre le parcours de cette “Football (regulation) bill” ici lien

  • Mangeur Vasqué le 16/02/2023 à 23h48
    J’ai commencé mon 2) ce soir en écrivant : “Tout dépend également de ce qu’on entend par “régulateur”.

    Quelques précisions sur le terme “régulateur” et sur les régulateurs au Royaume-Uni (en tout cas en Angleterre, chaque pays – Écosse, Irlande du Nord et Pays de galles – ayant son propre système, bcp moins pour le PdG cependant, à la legislation très similaire à l’Angleterre, mais ne compliquons pas les choses !). A retenir si vous ne comptez pas vous taper ce poste : il faut se méfier du terme “régulateur”...

    La plupart des régulateurs au Royaume-Uni, une société très dérégulée depuis des décennies (ça s’est évidemment sacrément empiré depuis l’arrivée des Conservateurs en 2010), ont un pouvoir relativement limité en pratique. Principalement car l’interférence du gouvernement est forte, et que les sociétés privées font un peu ce qu'elles veulent (beaucoup donnent généreusement au Parti conservateur, des lobbys qui ont donc des leviers de pression) et aussi parce que l’arsenal législatif ainsi que les marges de manoeuvre dont disposent ces régulateurs sont trop souvent faiblards pour réellement avoir un impact.

    Eg le régulateur des communications (Ofcom), celui de l’eau (Ofwat) ou celui des examens (Ofqual – la situation des examens & qualifications au Royaume-Uni est assez complexe, y’a 7 ou 8 différents “boards” d’examen – dont 3 ou 4 en Angleterre. Ce sont des instances qui élaborent chacune le contenu des examens, les notent, etc. Les pressions extérieures, du ministère de l’Éducation notamment, sont fortes).

    Ou le régulateur de l’énergie, Ofgem (Gaz et electricité). Controversé actuellement, en particulier au sujet des “prepayment meters”, appelés souvent “pay-as-you-go meters”. Ce sont des compteurs prépayés, qu’il faut alimenter constamment, pour recevoir électricité & gaz. Ces compteurs sont installés chez 3.5 millions de foyers, défavorisés cela va sans dire. Des compteurs punitifs car ils reviennent plus cher que la méthode traditionnelle de l’abonnement, où l'on paie donc après avoir consommé (au contraire des compteurs). Quand les gens sont fauchés et ne peuvent plus les alimenter (“top up”, via des cartes ou autres), leur électricité ou/et gaz est coupée, y’a pas de service minimum ou quoi (y’a quelques démarches que les gens peuvent faire ou des services auxquels ils ont accès lien, mais bon). Ces compteurs génèrent une peur pas possible.

    Des vidéos sont sorties ces dernières semaines sur des agents British Gas qui, rentrant chez les gens de force, imposent ces compteurs chez des gens surendettés, ou qui ne peuvent plus payés leur facture énergie (y'a pas de bouclier tarifaire comme en France ; y'a un plafond depuis octobre dernier mais il est très haut et je crois qu'il s'arrête le mois prochain), chez des gens vulnérables, etc. et leur (im)posent ces compteurs. Plusieurs vidéos ont choqué. Par exemple des gros bras “debt collectors”, employés par British Gas (sous-traitants), forçant une personne handicapée, en chaise roulante, à se faire installer un de ces compteurs. Une autre montrait d’autres “debt collectors” British Gas faire de même chez une femme atteinte de "severe mental health bipolar".

    Y’a aussi eu ce clip d’un journaliste infiltré du Times: lien. “The Times has been investigating how British Gas and other major energy firms are treating vulnerable customers during the cost of living crisis. While British Gas claims it helps families facing financial difficulties, there have been reports of aggressive debt collection tactics, including breaking into vulnerable people’s homes and forcing them onto pay-as-you-go meters. As a result, some families say they have been left for periods without any heating or lien

    Bref, des méthodes de barbouzes. Surtout qu’entre-temps les profits de British Gas sont tombés : 3.3 milliards de £ (plus que triplé en un an, lien triple to £3.3bn at British Gas owner after energy prices soar”).

    Les assos de consommateur se sont donc, de nouveau, tournées vers le régulateur du secteur énergie, Ofgem, pour que ce dernier force ces compagnies et fournisseurs (y’en a plus de 60) à changer leurs méthodes et arrêter surtout d’imposer ces compteurs aussi brutalement lien. Bon, c'est pas nouveau hein, le régulateur Ofgem avait déjà “menacé” ces mêmes compagnies en 2016, 2018, etc. lien. En vain.

    Ce coup-ci : Ofgem a bien réussi à les empêcher… mais pour 6 semaines seulement lien (et seulement parce que le gouvernement est intervenu, à la suite de l'émoi suscité par ces vidéos). Résultat des courses : ces compagnies ont "consenti" à faire un break dans ces installations forcées, de 6 semaines donc.

    Le dernier régulateur en date, le “Digital Markets Unit” (censé mater les géants de la Tech, encourager la concurrence, protéger les consommateurs dans ce domaine et faire appliquer nouvelle legislation) a à peine deux ans – avril 2021 – et il est déjà très critiqué, même par la presse de droite pro-Conservateurs, car considéré comme impuissant (doté d’un arsenal juridique assez minable).

    Beaucoup de ces régulateurs sont donc surtout des tigres de papier car ils ne disposent pas d’une législation adéquate pour remplir leur rôle. Même le “ombudsman” (médiateur) est souvent incapable de faire appliquer ses propres décisions (eg lien “Ombudsman told me it’s powerless to enforce its own judgments”).

    Tout est tellement dérégulé au Royaume-Uni depuis belle lurette que le terme “régulateur” est devenu très flou.

    Le 3) demain ou ce week-end.

  • Mangeur Vasqué le 18/02/2023 à 11h00
    Troisième et dernier point.

    3) Le coup de force de l’instance Premier League, enfin d'une "commission indépendante (lol) de la Premier League", contre Manchester City interroge par son timing. Ce soudain “réveil” musclé de la PL, après s’être couchée devant les magouilles des clubs pendant trois décennies marquées par le laisser-faire et les compromissions, a surpris son monde en Angleterre. Certes, l’enquête durait depuis 4 ans (on ignore cependant son degré d'intensité - a-t-elle soudain accéléré ces derniers mois ? Pas impossible) mais vu l’habituelle et passivité lenteur des instances, y’a matière à s’interroger.

    Ce singulier coup de sang de la PL est surtout l’expression de sa volonté de montrer qui est Raoul, à un moment charnière pour elle : l’établissement d’un “régulateur indépendant” du football anglais (par voie légale/parlementaire), élément principal d’une réforme du football anglais, essentiellement financière. Ce nouveau-venu bouleverse le game et met (potentiellement) grandement à mal la suprématie de la PL.

    Le “white paper”, longtemps retardé, sortira dans quelques jours (cf mon antépénultième poste). Il ne s’agit en rien d’une coïncidence avec l’inopiné rentre-dedans de la PL : il fallait que l’instance-carpette tape (enfin) du poing sur la table pour montrer qu’elle existe et qu’elle agit.

    Le triptyque instance PL- championnat PL-“brand” PL (PL plc) est dans la tourmente depuis deux ans. Certes, ce n’est pas un tourbillon médiatique intense, et il connaît plus d’accalmies que de moments chauds. Mais le trio est contesté et critiqué (notamment pour la gestion de Chelsea, Man City, Newcastle…), et l’hostilité est de plus en plus “in your face” (le pouvoir s’en est mêlé), directe, toutes proportions gardées. Et ces gens-là sont très “thin-skinned” (susceptibles), ils ne sont guère habitués à gérer une quelconque opposition. Ergo, ils encaissent mal le coup en ce moment.

    La pertinence même de l’instance PL fait débat. Ce n’est pas un débat national d’une ampleur démesurée, même chez les supps de foot (les histoires de Wags, eg R Vardy vs C Rooney, font bien plus le buzz), vu que beaucoup profitent de cette prospère PL (et tant pis si le cœur de la machine est pourrie), mais il il a bien lieu.

    Sa toute-puissance est désormais publiquement remise en cause. Et, chose intéressante, par un “front” formé ad hoc, un bloc disparate mais uni par la même envie de dézinguer la figure tutélaire. Une sorte de “front populaire” se sentant soudain investi d’une mission de défense des relatifs sans-grades (Football League, supporters, communauté) et de sauvetage du soldat Football Anglais. On trouve dans cet attelage inédit le(s) gouvernement(s) conservateur(s), en traque permanente de cibles faciles, la Football League, jadis hégémonique (pré-Premier League) mais devenue sous-fifre désargenté entre temps, et l’opposition travailliste.

    Une Football League soutenue par les politiciens de tous bords et qui fait le forcing depuis environ deux ans. C’est “haro sur la PL”. Une PL qui cristallise sur son nom les tares de notre époque : explosion des inégalités, ultranéolibéralisme, pratiques douteuses, super-profits non réinvestis (eg dans le “grassroots football”), "clients" arnaqués (billetterie), hors-solisme arrogant, mondialisation incontrôlée, déclassement (anciens supps exclus vu les prix).

    Sentiment exacerbé par l’actualité sur le come-back d'une Super Ligue revampée. La SL a beau être la (seule) concurrente de la PL, toutes deux n’en sont pas moins souvent mises dans le même sac question avidité et absolutisme footballistique.

    Jusqu’ici, qu’importait. La famille PL vivait pépouze dans un penthouse de tour d’ivoire, intouchable. Mais ça c’était avant. Avec l’arrivée de ce régulateur (certes pas imminente mais vécue comme telle par l’instance PL et le microcosme, il faut prendre les devants) la menace de se faire entuber est pressante et il fallait que l’instance PL tape un grand coup, qu’elle “justifie” son existence et qu’elle torde le cou aux accusations diverses (et justifiées) de laisser-aller et de grand laxisme fumisto-régulatoire. Pas mal de clubs PL, lésés, commencent aussi à en avoir assez du fossé grandissant, exacerbé par “l’injustice” et le danger que représentent ces clubs-États et la concurrence déloyale en découlant (championnat faussé). Deux “seulement” actuellement en PL mais combien demain si rien n’est fait ? On avait clairement contasté cette hostilité lors du rachat de Newcastle par les Saoudiens en octobre 2021.

    Enfin bordel, les nombreuses malversations de City (dopage financier, comptes magouillés, maquillages divers, gonflement artificiel des revenus/contrats sponsoring, etc.) remontent officiellement à 2009 – et que sous Thaksin Shinawatra (2007-08) ça n’a pas dû être trop net non plus. Certes, y’avait pas de FPF à l’époque mais le système était tout de même censé être encadré par des règles, notamment le “fit and proper person test” pour les acquéreurs potentiels.

    On ne me fera pas croire que l’instance PL ne se doutait de rien au sujet de Man City depuis 2009 et qu’il fallut les Football Leaks de 2018 et la subséquente enquête de l’UEFA pour qu’ils se disent en décembre 2018, “Ah tiens, on on ferait bien d’investiguer car ce club a l’air louche“. Non, la PL avait sciemment choisi de fermer les yeux sur les infractions, qui se sont évidemment accumulées jusqu’à dépasser la centaine, les clubs sachant depuis trop longtemps qu’ils peuvent agir en quasi impunité.

    Quand les clubs se sont gauler, par exemple sur les magouilles sur les salaires, bah, ils ont une une mini sanction ou un mini redressement, et la PL n’intervient même pas, c’est HMRC (impôts) qui doit se coltiner le boulot de sanctions. C’est certes son boulot mais le mutisme de la PL sur ces dossiers est accablant depuis 30 ans, cf l’énorme scandale Portsmouth en 2009-2010, 100+ millions de dettes. Un redressement judiciaire qui coûta énormèment à la communauté qui dut éponger les dettes, jamais remboursées par le club, en vertu de la très cynique “Football Creditors’ Rule” dont j’ai parlé par le passé en ces lieux. (En gros : la FCR est une batterie de règles négociées par les instances et très favorables au football niveau dettes. On rembourse en priorité les salaires de footballeurs, agents et acteurs du football. Les nombreux créanciers non liés au football, environ 500 dans le cas de Portsmouth FC, ben eux ils se partagent le reste : en général trois fois rien. Des écoles y furent de leur poche dans cette affaire, elles louaient leurs terrains au club. Des ambulances aussi, des fleuristes, commerçants, etc. Le club devait de l'argent à tout le monde. Par contre les agents et entraîneurs et footballeurs eux furent payés rubis sur l’ongle. Le grand perdant est également le Fisc, donc le contribuable. En 2016, la Football League a été forcée par HMRC – les impôts britanniques – de changer le logiciel lien mais la PL semble intouchable. Même s’il faut reconnaître que les faillites et redressements judiciaires sont devenues rares)

    (2017) lien “Arsenal and Everton stakeholders' close ties laid bare in leaked files… Links between Alisher Usmanov and Farhad Moshiri prompt calls for broadening of Premier League ‘dual ownership’ rules” (“And how their close relationship and the opaqueness and secrecy of the companies they own in offshore tax havens has led to questions over who owns what. As a result, campaigners are calling for changes to the rules intended to safeguard the independent ownership of Premier League lien)

    (août 2020) lien “UK taxman cracks down on professional footballers using image rights as loophole”

    (juillet 2022) lien A record 329 professional footballers 'are under investigation for suspected tax avoidance' as a leading Premier League club is being 'scrutinised by the FA and HMRC for using their sister clubs to make payments to agents'

    Le focus actuel sur Man City, affaire qui par le passé aurait été enterrée et/ou aurait traîné ad vitam aeternam, est plus que le bienvenu pour la PL qui a certainement accéléré son enquête. L’aubaine permet à la PL de bomber le torse et redorer son blason terni, à un moment où les projos sont braqués sur la réforme du foot anglais et la création de ce régulateur du foot anglais – on a depuis longtemps oublié que la PL est censé jouer ce rôle de régulateur (en l’absence de DNCG).

    Cette démonstration de force de la PL est une facon pour elle de crier haut et fort : “Ah ben vous voyez bien qu’on agit. Pas besoin d’un régulateur !”. Face à ce régulateur, la PL va tout faire pour limiter son champ d’action. Intervenir maintenant avec vigueur sur ce dossier Man City est pour la PL un acte de résistance et une façon de limiter la casse.

    Les sanctions seront prises par un panel indépendant, composé de trois personnes (eux, par contre sont effectivement probablement indépendants), voir sélection et composition lien. Y’aurait par contre bcp à dire sur ce modus operandi, les précédents de ces panels à trois étant peu glorieux (enfin, pour ce qui concerne la FA), mais passons. Aucune date donnée mais si je devais mettre une pièce, on peut penser que les décisions de ce panel tomberont en avril/mai.

    Si les sanctions sont considérées comme faibles, l’instance PL aura beau jeu de dire : “Ah les faibles, au contraire de nous qui nous sommes montrés impitoyables en collant 100+ infractions à Man City. C’est pas notre faute si ce panel n’a pas les cojones pour punir ces tricheurs. Nous on a fait notre boulot”.

La revue des Cahiers du football