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Le fabuleux destin de Cédric Anselin

Jean-Luc Delarue reçoit dans sa nouvelle émission C’est mon choix mais ça se discute le footballeur Cédric Anselin, parti de Bordeaux pour aller à la fois partout et nulle part.

Auteur : Kevin Quigagne le 1 Dec 2011

 

Jean-Luc Delarue : Mesdames et Messieurs, bonsoir. Ce soir, nous allons parler des grands sportifs et de la petite mort, mais bien avant de raccrocher les crampons, de leur vivant, au début de leur carrière, quoi. Ce soir, nous avons invité un ex grand footballeur, international Espoirs, vice-champion d’Europe avec Bordeaux, Monsieur Cédric Anselin [applaudissements]. Cédric, bonsoir.

 

Cédric Anselin : Bonsoir Jean-Luc, mais faudrait qu’j’explique là pour le vice-champion d’Europe dans ton intro, en fait je ne faisais que passer, c’est à cause de…

 

JLD (l’interrompant) : Je sais, il y a beaucoup à expliquer, la douleur est encore fraîche, la plaie ne se referme jamais vraiment. Nous allons y venir. Cédric, vous commencez votre carrière à dix-huit ans, en fanfare…

 

CA (l’interrompant) : Ah non, j’ai commencé en France, aux Girondins.

 

JLD : Ah ce n’est pas ce que j’ai sur ma fiche, moi j’ai Bordeaux sur ma fiche. Mais cela n’est qu’un détail, continuons. Alors que vous êtes international Bleuet, vous disputez la finale de la Coupe UEFA avec les Espoirs. Vous êtes aussi champion de France avec Bordeaux en 1999. Quel effet ça vous a fait d’être ce grand champion, international en bleuet, vice-champion d’Europe, jouer avec Zizédine Zidane – que nous saluons chaleureusement car je sais qu’il nous regarde souvent.

 

CA : Non, non, moi chuis un grand champion de rien, y a méprise sur la personne, usurpation d’identité. Et pis Bleuet et Bordeaux, ça n’a rien à voir, tu confonds tout, j’t’explique… Pour ce qui est de cette finale, en fait Kostinadov, ce fourbe qui marquait que des buts de voleur de poules, avait séché Lizarazu, donc moi chuis rentré en cours de jeu, c’était la fin d’saison, y avait plus aucun valide, quoi. Et quand Bordeaux a gagné le titre en 1999, j’étais pas dans le coin, j’avais été prêté en Angleterre avant.

 

JLD : Effectivement, le thème de l’absence et de la fuite en avant revient souvent dans votre carrière. Mais vous avez dû vivre cela comme une responsabilité écrasante, à dix-huit ans, tout cette gloire, cette adulation.

 

CA : Tu sais, j’étais que la doublure du remplaçant, et pis quand chuis rentré, on s’prenait une pilée sur les deux matches, donc bon, un échec cette finale.

 

JLD : Oui, cette doublure qu’on refuse, cet autre Moi subconscient qui réfléchit notre propre image mais que l’on refoule, "L’envers, c’est les autres", disait Sartre. Souvent, l’échec, "ce n’est que le psychique qui refuse d’internaliser", théorisait Freud.

 

CA : Ça j’en sais rien mais c’qui est sûr, c’est que j’aurais bien aimé joué avec lui, Rohr le voulait, Steffen Freund, mais il aimait pas trop sa coupe de cheveux à la Roberto Baggio. Pis on avait déjà eu Waddle et Völler dans le championnat, ça avait traumatisé les supportrices. Pour Sartre, j’aurais adoré jouer avec lui aussi mais nos chemins ne se sont jamais croisés avec Romain. Bon, Bordeaux, ça a pas été facile, un semi-échec, quoi.

 

JLD : Ce syndrome récurrent de l’acte manqué, c’est hautement significatif, non?

 

CA : Ouais, n’exagérons rien, j’ai vidangé quelques occasions mais pas plus qu’un autre. Mais bon, Rohr l’intello ne me voulait plus.

 

JLD : Vous jouiez au milieu, était-ce par quête du cocon sécurisant, ce besoin irrépressible de se sentir entouré, de retrouver la matrice maternelle, protectrice et enveloppante, ce que Aristote et Socrate appelaient…

 

CA (l’interrompant) : Nan mais t’arrêtes tes ruminations de divan, là… J’étais au milieu parce que bon, c’est comme ça, j’en sais foutre rien moi. J’ai jamais joué avec aucun Harry Stott, même en Angleterre. Et Socrates, il a joué à Garforth Town dans le nord de l’Angleterre, moi j’ai joué dans l’est. Qui c’est qu’a préparé tes fiches?

 

JLD (l’air gêné) : Bien, euh… toutes mes excuses pour ces petites erreurs. Je lis sur ma fiche que vous allez chez les Canaris après votre passage à Lille.

 

CA : Et oh, t’arrêtes avec tes fiches, on est pas en garde à vue, hein. Ouais, j’ai signé pour les Canaris en avril 1999, pendant mon prêt, j’étais pas mauvais, ils m’ont payé cher.

 

JLD : Ce côté esclavagiste du football, où les joueurs ne sont que de vulgaires marchandises, ça a dû vous marquer de vous retrouver à Nantes, son lourd passé de port négrier... Avez–vous trouvé en Nantes le club sordide que l’on décrit souvent?

 

CA : Ah non, mais tu débloques, pas ces Canaris-là, moi j’ai signé pour les bons Canaris, ceux de Norwich.

 

JLD : Ah oui, je vois, là où il y a le Méridien. Cette obsession du temps qui passe peut-elle expliquer cette vie de grand voyageur? Proust, A la recherche du temps perdu, Du côté de chez Swann… j’imagine que ça vous parle.

 

CA (l’interrompant) : Non, mais tu divagues, y’a pas de méridien à Norwich, juste une équipe de foot, toi tu penses à Greenwich. Et Dave, pas trop mon truc, non.

 

JLD : Ah oui, effectivement, les Canaris de Greenwich. Je lis sur mes fiches que votre entraîneur, Bruce Rioch, vous adorait, mais il est remercié six mois après votre arrivée. Etait-il ce père qui…

 

CA (qui l’interrompt) : Bon, arrête ta psychanalyse de merlan frit, c’est bon. Bruce Rioch s’est fait lourder, et le nouvel entraîneur, Nigel Worthington, m’aimait pas, il détestait les mobylettes qui traçaient sur l’aile comme moi.

 

JLD : Il ne vous aimait pas parce que vous rouliez en mobylette ? Pensait-il que cela dévaluait le club, votre 103 Peugeot sur le parking à côté des Aston Martin?

 

CA (l'interrompant) : Mais non, t'as rien pigé. Worthington, le seul type de joueur qui l’faisait bander grave jouissif, c’était les bourrins écossais descendus des Highlands qui balançaient leurs transversales de quatre-vingt mètres loin devant à l’aveuglette pour un Targetman bien vicelard avec les coudes affûtés, le genre qu’en bave d’avance à l’idée de rentrer dans la surface en explosant deux arcades sourcilières au passage. Je convenais pas, je suis donc parti. Y a eu l’Ecosse, Santa Cruz, la Bolivie, la malaria.

 

JLD : Targetman ? Ah oui effectivement, ce thème de la persécution est fréquent chez les Jungiens. Donc, vous contractez la malaria à Santa Cruz en Écosse?

 

CA : En Bolivie, Santa Cruz, à l’Oriente Petrolero. Mais j’ai pas supporté, l’altitude, les moustiques... J’ai failli en mourir, je me terrais dans une chambre d’hôtel, mon club avait gardé mon passeport. Je l’ai récupéré en douce et j’ai fui pour l’Angleterre, sans permission.

 

JLD : Un récit poignant et ô combien déchirant Cédric, qui me parle car moi aussi, je m’acclimate mal à l’altitude, surtout pressurisée. Mais revenons à vous, à votre histoire émouvante. Ensuite donc, vous mettez votre carrière entre parenthèses pour vous lancer dans l’art et vous devenez peintre. Classique ou abstrait?

 

CA : Camping. Le vieux de ma copine m’avait trouvé un boulot comme peintre dans un camping dans le Norfolk, je m’occupais de l’entretien et peignais les bâtiments sur le site. Comme j’étais jardinier de formation, ça m’allait. Mais un jour, un fan de Norwich m’a reconnu et c’est comme ça que ça s’est su.

 

JLD : La célébrité se paie toujours cash quand on est au fond du trou, je sais ce que c’est aussi. Témoignage alarmant, torturant. Et là, vous allez à Cambridge. Ce besoin de faire des études, était-ce pour vous prouver que…

 

CA (l’interrompant, agacé) : Mais non, Cambridge United, c’est Hervé Renard qui m’a fait venir. Malheureusement, la FIFA m’a fait des problèmes, vu que j’avais filé à l’anglaise de Bolivie. Puis la FA m’a obtenu l’autorisation. À Cambridge, j’étais payé au match, mais après deux matches, j’ai éclaté ma caisse, dos pété.

 

JLD : La tragédie frappe encore. Bouleversant. Vous partez ensuite vous ressourcer en Grèce. Cette recherche de la vérité, de l’absolu, c’est votre amour pour la philosophie grecque?

 

CA : Nan, c’était pour un essai. Eux me voulaient mais ils étaient fauchés.

 

JLD : Ah oui, guère étonnant, la Grèce, quelle pauvreté, c’est tragique. Etre originaire du Nord-Pas de Calais vous a-t-il aidé à surmonter…

 

CA (l’interrompant violemment) : Nan, mais tu vas t’en prendre une toi! Chuis Ch’ti et fier de l’être. Bon, après, Gravesend & Northfleet, D5, me voulait, mais pour des clopinettes… Et oh, chuis pas une moitié d’épluchure moi, j’ai joué avec Zidane moi, alors, pas question.

 

JLD : Vous déclariez dans le magazine anglais When Saturday Comes, que Zidane vous avait donné le conseil suivant à Bordeaux : "Si tu fais un mauvais match mais que tu fais quelque chose de vraiment spécial dans ce match, les supporters se rappelleront toujours de ce truc spécial et pas du match merdique que tu as produit ". C’est exact.

 

CA : Ouais, ouais, il m’a dit ça quand j’étais stagiaire à Bordeaux. Des fois, je me dis que j’ai trop pris ce conseil au pied de la lettre.

 

JLD : Nous finirons sur cette lumineuse citation. Du fond du cœur Cédric, un grand merci pour ce témoignage bouleversant. [S'adressant à la caméra] La semaine prochaine, nous aborderons un nouveau thème “J’ai changé la face du monde en allant à Dunkerque” avec notre invité, Jean-Marc Bosman. Bonsoir, à la semaine prochaine.

 

 

La carrière de Cédric Anselin

1995 – Bordeaux
1997 – Lille (D2, prêt d’un an)
1998 – Bordeaux (retour de prêt)
1999 (avril) – Norwich City (D2, prêt)
1999 – Norwich City
2001-2002 – Ross County (Ecosse, D2)
2003 – Oriente Petrolero (Bolivie, D1)
2004 – Cambridge (D4)
2005 (mi-mars) – Gravesend & Northfleet (D5)
2005 (fin mars) – Norwich United (D9)
2005 (juin) - King’s Lynn (D7)
2006 (juillet) – Wroxham (D9)
2007 – Dereham Town (D9)
2008 (juillet) – Diss (D10)
2008 (août) – Norwich United (D9)
2008 (octobre) – Lowestoft Town (D8)
2009 – Norwich United (encadrement de la réserve, D10)
2010 – réserve de Lowestoft Town (D10)

Réactions

  • Gouffran direct le 01/12/2011 à 04h54
    Je me demandais ce qui lui était arrivé à celui-là.
    C'est bien fait et original.

  • Ô Mexico le 01/12/2011 à 07h07
    Ouh, mais c'est super vieux ça ! C'est un portrait qui doit dater de l'époque où Mangeur Vasqué sévissait à temps plein sur le fil anglais (et J'ai raté ma vie).

    À propos, moins spectaculaire, mais représentatif du parcours des jeunes joueurs prometteurs, cet article de 2009 qui raconte le parcours d'un ancien Sochalien et un ancien Messin : lien

    Le premier nommé, Stéphane Da Cruz, apparaît au classement des buteurs de la League Europa, ayant marqué les 2 seuls buts de son club lors de la défaite de l'UN Käerjéng (3e du dernier championnat luxembourgeois) au premier tour de qualification.

    Voilà, si quelqu'un a le courage de faire plus de recherches et de résumer cela sur le fil J'ai raté ma vie...

  • Miklos Lendvai le 01/12/2011 à 07h59
    Effectivement Ô Mexico, c'est un post qui date de l'année dernière. Grâce à Google, la version originale est facilement retrouvable (plus longue mais plus détaillée). Ca méritait bien d'être en Une non ?

  • Tonton Danijel le 01/12/2011 à 08h53
    Ah oui, cet article mérite d'être en une, comme de nombreux posts que Mangeur Vasqué a écrit sur des footballeurs complètement perdus de vue outre-Manche (on attend que Péricard raccroche les crampons pour restituer sa carrière complète?).

    La saga Lee Sharpe était encore plus incroyable avec son arrivée en Islande, mais je dois avouer que Cédric Ansselin qui passe d'une finale européenne aux côtés de Zidane et qui se retrouve ensuite dans le championnat de Bolivie, c'est pas banal non plus.

  • magnus le 01/12/2011 à 09h38
    Ce qui est rigolo, c'est que sur la photo du haut il me fait penser à Emmanuel Mouret...et sur la photo du bas, à Gignac.

  • Il Capitano le 01/12/2011 à 10h06
    Magnus, tu veux parler de Cédric Mouret plutôt non ?

  • Mipoulet le 01/12/2011 à 10h08
    Mais non, sur la photo du haut c'est clairement Jeremy Menez les gars.

  • magnus le 01/12/2011 à 10h16
    Non, non, je parlais bien d'Emmanuel Mouret, le réalisateur-acteur. Pur le faciès, hein, pas pour la blondeur.
    Je me souviens de l'existence de Cédric Mouret (les médecins et kiné doivent tous avoir un poster de lui sur les murs de leur cabinet), mais plus vraiment à quoi il ressemblait.

  • Il Capitano le 01/12/2011 à 10h56
    Cédric Mouret était visuellement un blond croisement de notre ami Anselin et de son pote de l'AS Cannes Laurent Leroy
    Voilà pourquoi j'ai cru que tu avais confondu

  • Il Capitano le 01/12/2011 à 10h56
    Par correction, je ne vais pas m'étendre sur son niveau de football...

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