Man City-PSG : quatre quarts mais pas de dessert
Matchbox – Pour la quatrième année consécutive, le PSG quitte la Ligue des champions en quarts de finale. La stagnation est réelle et la fin de cycle inévitable.
Il y a trois ans, l’élimination contre le FC Barcelone, après deux résultats nuls, était encourageante. Oui, Paris semblait sur la bonne voie, un sentiment alors confirmé par les deux dernières confrontations contre Chelsea. Mais voilà: une fois de plus, Paris sort prématurément de la Ligue des champions. La différence? Cette fois, il pensait être enfin en mesure de la gagner.
La claque est d’autant plus grande que Manchester City, adversaire honorable et dont la qualification semble logique malgré les coups du sort favorables de l’aller, n’a jamais atteint des sommets dans le jeu. Mais les problèmes parisiens étalés pendant 180 minutes sont si nombreux que, même si on ne peut nier les succès brillamment - mais pouvait-il en être autrement? - accumulés dans les compétitions nationales, le bilan de Laurent Blanc prend un sérieux coup dans l’aile. Et l’avenir du technicien aussi?
La nalyse
Parlons un peu de Benjamin Stambouli. Recruté pour jouer au milieu et remplacer Yohan Cabaye, qui n’aura jamais vraiment su saisir sa chance, il était sur le banc mardi soir. De la première à la dernière minute, et ce malgré la blessure de Marco Verratti, la suspension de Blaise Matuidi, le manque de compétition de Javier Pastore et la sortie en cours de match de Thiago Motta. Pourquoi parler du pauvre Stambouli? Parce que sa non-utilisation dans ce quart de finale révèle le manque de confiance que lui accorde le staff parisien. Elle est aussi la confession d’un recrutement inadapté pour chasser une couronne européenne, constat renforcé par le départ d’Ezequiel Lavezzi cet hiver alors qu’une cartouche offensive supplémentaire aurait évité le casse-tête tactique que Laurent Blanc a dû gérer pour faire sa composition d’équipe (en alignant Di Maria relayeur de son 4-3-3 habituel, il n’aurait eu qu’Hervin Ongenda comme attaquant sur le banc).
Mais tout de même. Pourquoi diable Laurent Blanc a-t-il improvisé ce système à trois défenseurs centraux, qu’il n’avait jamais utilisé au coup d’envoi d’une rencontre dans sa carrière d’entraîneur et qu'il n’a certainement pas eu le temps de peaufiner compte tenu des matches enchaînés tous les trois jours?
L’entraîneur parisien a tenté quelque chose, certes, et le score défavorable du match aller l’a peut-être incité à vouloir forcer le destin. Mais une équipe sûre de sa force n’a pas à tenter quoi que ce soit dans le match le plus important de sa saison, surtout après trois ans sous les ordres d’un technicien dont le projet de jeu – et le dispositif mis à son service – n’a jamais varié. On notera d’ailleurs que Manuel Pellegrini - certes pas contraint par des suspensions - a aligné exactement le même onze de départ qu'au Parc des Princes.
Le problème qui se pose à Blanc depuis quelques semaines, c’est que sans Marco Verratti, le PSG perd une bonne partie de sa faculté à jouer court au milieu… ce qui est d’autant plus visible quand le niveau s’élève. Alors, pourquoi ne pas tenter un coup de poker, après tout? Eh bien parce qu’Angel Di Maria avait démontré, lors de la première période contre Monaco (0-2), à quel point il pouvait être utile et juste en relayeur d'un 4-3-3, comme à sa meilleure période madrilène.
Parce qu’il faut faire adhérer les joueurs à son idée directrice, aussi. Si l’animation est généralement plus importante que le système, ce dernier ne peut s’improviser. Il est un cadre d’expression qui nécessite repères et automatismes collectifs. On imagine assez facilement la réaction interloquée de cadres obligés de gagner un match si important en jouant d’une manière jamais travaillée auparavant à l’entraînement. Citons d’abord Rui Almeida, coach du Red Star, dans une interview à So Foot en janvier: “Je ne vais pas passer du 4-3-3 au 3-5-2 simplement parce que j’affronte le Paris Saint-Germain. Je pourrais, mais seulement si cela aura été travaillé préalablement et aura été inscrit dans la routine d’entraînement. Dans le cas contraire, ça n’aurait aucun sens.” Puis Zlatan Ibrahimovic, après la rencontre: “En première période, nous avons joué dans un système que nous n'avions jamais essayé. Ça s'est passé comme ça s'est passé." Mal, donc, ce qui n’a pas l’air de trop surprendre le Suédois. "On avait bien vu à l'aller qu'ils possédaient dans le domaine offensif des joueurs très vifs et très rapides, justifiait Laurent Blanc après la rencontre. On s'était dit qu'on voulait protéger l'axe sans dénaturer notre jeu." Certes, le 4-3-3 du PSG prend parfois des airs de 3-5-2 quand il s'anime, quand Motta recule entre ses centraux, quand Di Maria décroche et que Cavani dézone. Mais c'est ce processus dynamique qui crée des décalages.
Tactiquement, le 3-5-2/3-4-3 (selon le positionnement de Di Maria) n’a donc pas fonctionné. Les latéraux, tellement importants, n’ont jamais su aller de l’avant et occuper correctement l’espace, la possession était très basse (la faute aussi à un City bien en place et agressif sur le porteur), les attaquants isolés et les défenseurs un peu perdus. Serge Aurier, qui a perdu onze ballons en première période (plus qu’aucun autre parisien) et indirectement coûté un penalty, fait d’ailleurs un drôle de symbole de cette rencontre: le joueur dont la présence sur le terrain, discutable moralement, ne se justifie pas du tout sur un plan sportif. Vouloir bien faire mais aggraver la situation. Comparaison n’est pas raison, mais l’ironie du calendrier veut que tout cela arrive quelque semaines après l’exclusion temporaire en sélection de Max Kruse pour indiscipline, et le passage à une sorte de 3-4-3 bien pensé aboutissant à la victoire de l’Allemagne 4-1 contre l’Italie. Ou quand les événements semblent plus provoqués que subis...
Le passage au 4-3-3 suite à la sortie de Motta a fait du bien au PSG mais n’a jamais ramené de la fluidité dans le jeu, d’autant que City était bien en place, présent sur le porteur au milieu pour empêcher les Parisiens de développer du jeu et forçant les attaquants à jouer dos au but. Cela n’a pas annihilé toute possibilité mais les centres de Van der Wiel ont été mal exécutés et Ibrahimovic a encore augmenté son avance en tête du classement des joueurs les plus hors-jeu en C1 cette saison. Javier Pastore a amené un peu de vie devant, cherchant la verticalité quitte à trop en faire, mais l’absence de récupérateur a augmenté le nombre de contres anglais et facilité les phases de possession de City (41% de possession en seconde période contre 31% en première). Toute la séquence qui aboutit au but de Kevin de Bruyne, encore une fois au-dessus du lot, en est une parfaite illustration.
Bref, voilà, c’est fini. C’est triste à dire, mais cela ressemble à une saison blanche pour Paris, qui n’a pas eu la moindre concurrence en France et n’a toujours pas passé le cap au niveau européen. Même une victoire dans les deux coupes nationales ne masquerait pas ce qui ressemble franchement à une fin de cycle. On fera encore mieux les bilans à tête reposée, mais ce PSG semble bien plus loin de la victoire en Ligue des champions qu’en 2013, quand Jallet, Alex, Lavezzi et les autres, alors coachés par Carlo Ancelotti, étaient passés à vingt minutes d’éliminer Barcelone. Le plan A n’était peut-être pas aussi bien maîtrisé, mais il y avait alors des plans B. En attendant, Laurent Blanc bute une nouvelle fois sur les quarts de finale, tandis que Zlatan en est à son huitième échec en neuf apparitions à ce niveau de la compétition (il avait joué l’aller, un nul contre Arsenal, et n’était pas de la démonstration du retour quand le Barça était passé).
Manuel Pellegrini, qui avait mené Villarreal en demi-finale et était à une minute de faire de même avec Malaga, retourne lui dans le dernier carré. Avec une équipe franchement moyenne par rapport aux habitués de ce niveau de la compétition, sublimée par le talent de Kevin de Bruyne, avec un attaquant difficile à contenir (Agüero), un joueur qui comprend parfaitement le jeu (David Silva), un tandem au milieu qui peut donner le change (Fernando-Fernandinho) et une défense centrale mixte qui se débrouille quand on ne la sort pas de sa zone de confort (Otamendi-Mangala). Même si le Chilien est en fin de vie sur le banc citizen, il sait où il veut aller et réussit à persuader son groupe d’y aller avec lui. Elle était peut-être simplement là, la différence. Et dans ce match nul à l’aller, qui a mis Paris en position d’infériorité et l’a obligé à réaliser un exploit qui n’en aurait pas été un.
Les observations
• Le PSG a couru 98 km, soit onze de moins que la moyenne de la compétition.
• On se demande combien de temps aurait duré le système à trois défenseurs sans la blessure de Thiago Motta.
• Même à Football Manager, on doit travailler les systèmes à l’entraînement pour que les joueurs en acquièrent la connaissance.
• On n’a pas tout compris à la heatmap parisienne.
• On ne pourra même pas dire que c’est la faute de Cavani...
Les images du match