À tort l'arbitre
Aux oubliettes, le code de bonne conduite ratifié par nos dirigeants. René Ruello, un récidiviste, s'excite contre la porte du vestiaire de M. Coué sans plus de retenue qu'un supporter énervé. Cela ne choque pas grand monde. L'essentiel, c'est que les arbitres continuent de la fermer et portent leur pub sans renâcler.
Incivilités en col bleu
René Ruello s'est donc signalé par un geste d'une stupidité assez confondante à la mi-temps de Rennes-PSG, en claquant rageusement la porte du vestiaire des arbitres. Une crise de nerfs de petit patron contrarié qui le ridicule doublement: non seulement sa réaction est aussi bête qu'irresponsable, mais elle est aussi totalement injustifiée. Le président rennais aurait bien fait de visionner le ralenti, qui lui aurait montré que ni Alex ni Aloisio n'étaient hors-jeu sur le second but parisien. Il aurait aussi pu attendre la fin du match pour faire le bilan des coups de sifflets, puisque les raisons de l'annulation du but d'Aloisio (à 2-0 en début de seconde mi-temps) sont restées obscures (une pression de dirigeant?). La faute d'El Karkouri en fin de match valait effectivement un coup de pied de réparation, mais il n'aurait rien réparé du tout en termes de justice. On ne peut que regretter l'enchaînement d'erreurs de M. Coué, mais dans un environnement qui désigne systématiquement les arbitres à la vindicte, est-il encore permis de juger de leurs prestations, aussi mauvaises soient-elles?
Ruello n'en est pas à son coup d'essai en matière de hooliganisme patronal, il est même surprenant qu'il se soit retenu aussi longtemps, car sa douteuse personnalité a tendance à émerger chroniquement. En septembre 2000, il s'était attaqué à Gallardo de manière parfaitement gratuite, quelques mois à peine après l'affaire OM-Monaco. Son stupéfiant appel au lynchage du meneur de jeu argentin était alors apparu comme le produit d'un glissement très sensible. Depuis quelques années, quelques autocrates supportent en effet de moins en moins que des aléas sportifs perturbent leur business plan (lire "Dirigeants : fermez-la!"). Surtout que finalement, un arbitre est peut-être moins corruptible qu'un juge de Tribunal de commerce.
Le code de la déroute
On se souvient brusquement qu'à l'intersaison, sous la pression d'un corps arbitral excédé et en raison d'incidents multipliés de la part des dirigeants (lire "L'arbitre aussi rage"), la Ligue avait adopté un "code de bonne conduite" qui avait été l'occasion de grandes déclarations d'intention et qui avait été signé par tous les responsables. Ce code aura fait long feu, il n'y a pas même un journaliste pour rappeler son existence…. Il est allègrement bafoué chaque semaine, particulièrement par les bancs. Il aurait mieux valu adopter celui que nous proposions en mai dernier, qui prônait le zéro tolérance pour la délinquance en costard-cravate ou survêtement (lire "Code de bonne conduite prêt à l'emploi").
Le statut (quo) des arbitres
En attendant, les imitateurs de Jean-Michel Aulas (lire "La méthode JMA") peuvent continuer à pourrir la vie des arbitres et à fragiliser leur position. Ces derniers s'étaient mobilisés l'an dernier devant les attaques des clubs et le laxisme des commissions de discipline, réclamant leur indépendance financière vis-à-vis de la Ligue et refusant d'arbitrer le Strasbourg-Metz à huis clos. Visiblement, devant les résultats, ils ont cette fois choisi de se résigner et de retourner à leur traditionnelle impuissance politique. Vedettes humiliées, mais vedettes quand même en ce grand cirque médiatique.
200 cm2 de pub, ça fait combien en euros ?
D'ailleurs, la Fédération et la Ligue viennent de ratifier un protocole d'accord financier qui entérine la publicité sur les maillots des hommes anciennement en noir. Les sommes touchées seront affectées à un fonds de développement et de formation de l'arbitrage. La tentative de détournement de fonds orchestrée par le bureau de la Ligue a donc tourné court (il voulait capter une partie de l'argent et l'affecter… aux indemnités des arbitres! -— lire "Marque jaune et cartons rouges"). Mais aucun problème de fond n'est réglé et dans quelques jours, on verra MM. Kalt, Bré, Glochon et confrères promener sur le terrain 200 cm2 de surface publicitaire sur leur manche, afin d'assurer l'avenir de leur profession. Il faudra aussi mettre le logo sur la porte de leurs vestiaires, comme ça on le verra à la télé quand un président s'y attaquera.