Design et football : la rencontre
L'exposition "Design & foot – un enjeu collectif" ouvre ses portes à la Cité du design de Saint-Étienne. À la jonction des deux univers: des ballons étranges et une réflexion sur l'esthétique du football.
Auteur : Jérôme Latta
le 21 Avr 2011
Il n’aura pas fallu très longtemps pour que le football entre à la toute récente Cité du design de Saint-Etienne, distante de quelques centaines de mètres du stade Geoffroy-Guichard. Commissaires de l’exposition L’Objet du design l’an passé au même endroit, les Sismo (Antoine Fenoglio et Frédéric Lecourt) se sont rendus à l’évidence en proposant “Design et foot, un enjeu collectif” dans la grande salle de la Platine, le bâtiment audacieux allongé devant l’ancienne Manufacture des armes et cycles.
Un mariage logique, mais inédit, puisque comme l'explique le premier cité, les deux mondes sont au départ très éloignés l'un de l'autre... alors qu'ils sont de plus en plus appelés à collaborer.
Le football y est abordé au travers de dizaines d’objets et d'installations, des plus triviaux (bancs de touche, sifflets, poteaux de corner, genouillères...) aux plus emblématiques (ballons, maillots, stades…). Segmentée géographiquement en plusieurs thèmes, l’exposition recouvre les aspects liés au terrain et à la pratique, aux aspects sociaux et culturels ou aux réinterprétations artistiques. Autant de motifs d'excitation pour l'amateur de football, ou de controverses esthétiques – à l'image de la "marinière" créée par Nike pour l'équipe de France.
Un football pro en panne de créativité
Dans l'interview qu'il nous a accordée, Antoine Fenoglio n'a pas éludé la question de la laideur endémique que nous déplorons souvent concernant les équipements. "La 'peau' peut être très laide, et l'intérieur très réussi", pondère-t-il, mais en faisant le constat de l'absence de démarche réfléchie de la part des clubs, concernant aussi bien les espaces (bâtiments sportifs, vestiaires, sièges sociaux) que les tenues et les produits dérivés. L'absence de prise de risque dans le football professionnel et chez les équipementiers laisse aux pratiques "hors-terrains" le soin de privilégier la créativité: "La très forte visibilité du football au travers des équipements, de la publicité, le côté guerrier, les bagnoles de sport..., cache une sorte de faiblesse sur l'ensemble de la démarche". L'esthétique ordinaire du footballeur tend ainsi à privilégier une esthétique du gladiateur, "alors que la culture du football pourrait insuffler autre chose que la puissance ou la force".
Jouer au Barbie Foot
L'exposition, en balayant une multitude d'aspects (et en présentant de vraies réussites), ouvre donc le débat, notamment sur les liens entre les marques et le design – avec par exemple le succès de la "Kage" de Décathlon. Pour le côté ludique et le clin d'œil, on peut s'essayer à tirer sur une cage dotée d'un poteau rond et d'un poteau carré, jouer au Barbie Foot et même au cécifoot. Plusieurs œuvres de designers et de plasticiens sont exposées, dont nous vous proposons une sélection ci-dessous.
Les manifestations consacrées en France à la culture football sont rares, celle-ci représente l'aboutissement d'un véritable travail de réflexion et offre une vision à la fois originale et foisonnante de ce sport. À deux stations de tramway d'un stade mythique, on pouvait trouver pire lieu de rencontre.
Lire l'interview d'Antoine Fenoglio, commissaire et scénographe de l'exposition, pour apprendre notamment comment Mustapha Bayal a mis un coup de tête dans un ballon de 1,75 mètre de long, montrant ainsi l'artiste qui se cache en lui (sur Une balle dans le pied).