La Gazette > 34e journée
Comme le FC Nantes, la Ligue 1 se rapproche de sa fin. Mais ne l'achevons pas tout de suite: la Gazette mijote à petit feu...
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> Ribéry à la vitesse de l'instinct
> La minute pathologique de Djibril Cissé
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> L'envers du championnat
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Auteur : Le Feuilleton de la L1
le 4 Mai 2007
Jusqu'ici, tout va bien: les Lyonnais sont champions mais ils ne sont pas encore maquillés comme des élèves de maternelle un jour de kermesse. Mais les gagnants de cette fin de saison semblent devoir être les Girondins, qui en sont à leur troisième victoire consécutive. Mais juste derrière Lens, défait à Lescure, Marseille et Rennes profitent des trois points engrangés pour prétendre encore à la C1.
Éparpillés au centre du tableau, on repère les déçus des dernière semaines, Lille et Saint-Étienne, qui devancent encore des Monégasques et des Auxerrois très requinqués, eux. Le FCSM reste placé...
Les résultats de la journée
Marseille-Sochaux : 4-2
Troyes-Sedan : 3-2
Lyon-Le Mans : 2-1
Bordeaux-Lens : 1-0
Valenciennes-Monaco : 2-2
Nice-Auxerre : 0-0
Lorient-Saint-Étienne : 0-0
Toulouse-Paris SG : 1-3
Nantes-Rennes : 0-2
Lille-Nancy : 0-1
Les gestes de la journée
> la volée plat du pied de Gomis qui échoue sur la barre de Riou.
> la talonnade de Makiese qui trompe sept Nancéiens aux abords de la surface pour lancer merveilleusement Bodmer seul face à Grégorini.
> l’opiniâtreté de Mansaré qui se débarrasse de quatre Parisiens sur le flanc gauche avant de tromper Landreau. Une belle action individuelle qui aurait gagné à ne pas être outrageusement comparée à celle de Messi, elle-même exagérément comparée à celle Maradona.
> le coup du foulard d’Emana, auteur d’un geste souvent décrié par les rationalistes qui fustigent son manque d’efficacité, quand le Toulousain l’utilise à bon escient pour inscrire un but en angle fermé que le corps arbitral annulera par erreur.
> le lob sans contrôle de Rothen, alliage de malice, de toucher et de précision qui faisait la joie des Monégasques du temps de leur apogée.
> la patate de Barbosa des vingt mètres en pleine lucarne sedanaise.
> l’ouverture en profondeur d’Utaka dans le rond central qui lance Briand sans contrôle dans le dos de la défense nantaise comme un numéro dix à l’ancienne.
> les politesses entre Rodriguez et Beye dont Leroy ne se formalise pas pour ouvrir la marque au Vélodrome.
> le tacle glissé et désespéré de Cana sur sa ligne pour sauver un ballon qu’il avait ôté des mains de Carrasso et propulsé vers son but vide.
> l’ouverture de Taiwo de soixante mètres que Ribéry n’aura même pas à contrôler pour caviardiser Cissé tellement elle était précise.
- Liloundouala ?
- Non.
- Loudindouda ?
- Non.
- Louyoulouna ?
- Non.
La bannette
L’entraîneur qui découvre le string
Elie Baup (tfc.fr) : "C’était très serré et ça va être comme ça jusqu’au bout".
Le copain du père Noël
Jean-Marc Furlan (sport24.com) : "On a rêvé de la victoire sans penser à autre chose et puis voilà".
Le joueur acculé
Franck Signorino (Ouest-France) : "On a pour ainsi dire un rôle d’arbitre à jouer".
Le remake foiré de « Rrrrrrrrrrrrrrr »
Yann Lachuer (Canal+) : "Notre mage de manœuvre est très troite".
L’entraîneur banane
Michel Der Zakarian (Cana+) : "Devant, les équipes se sont fait un peu la cerise".
Le pet de protestation
Laurent Banide (L'Équipe) : "Valenciennes a réagi avec les tripes".
Le crépuscule politique de Pierre Mauroy
Claude Puel (L'Équipe) : "Lille n'était pas dans un grand soir".
L'analyse tactique de la Ligue 1
Christian Gourcuff (L'Équipe) : "La déception domine".
Ribéry à la vitesse de l’instinct
Cette saison, on aurait presque pu diagnostiquer le syndrome du feu de paille à propos de Franck Ribéry, révélation absolue de l’exercice précédent qui en a été réduit à plus de discrétion dans la foulée d’un Mondial réussi. Entre méforme physique et blessures, ce joueur au jeu si peu économique a logiquement peiné à renouer avec son niveau de performances passé. Et le mirage de son association avec Djibril Cissé, qui a fait long feu, n’a pas favorisé une réévaluation à la hausse – sans pour autant que la cote du joueur décline sur le marché des transferts.
Le temps d'avance
Mais le parcours sinueux du Boulonnais ne s’accommode pas d’une trajectoire classique. Et son but de dimanche, point d’orgue d’un match accompli, a montré qu’il applique le même principe à celle du ballon. Point de slalom à la Messi ni de gri-gri à la Ronnie dans ce geste simplissime qui fait pourtant partie de ces fulgurances capables de nous faire frissonner. Une pénétration dans l’axe gauche, une feinte et un crochet... Jusque-là, rien que de très normal. Mais au lieu de déclencher une frappe du gauche, comme attendu (et comme celle de Nasri dans une position analogue, quelque temps auparavant), Ribéry casse le tempo de son action, intervertit jambe d’appui et jambe de frappe en plaçant un doux extérieur du droit dans sa foulée.
Le geste ne nécessite qu'une consommation minimale d’énergie pour un joueur en fin de match, qui vient de s’arracher une énième fois et s’en remet à un alliage d’adresse et de vitesse d’exécution, sans élégance particulière. C’est le ballon, malgré sa lenteur, qui prend un temps d’avance décisif sur le cortex du gardien, réduit à l’état de spectateur. Même le spectateur, justement, aura eu un temps d’incompréhension au départ de la balle, bluffé lui aussi par le coup de patte, avant qu’un ultime rebond sur le poteau n’accorde la réussite à ce trait de génie.
Ralentir le jeu !
La semaine passée, c’est Pauleta qui, d’une remise instantanée, offrait à Jérôme Rothen – moyennant un contrôle réussi – le luxe de pouvoir ajuster une frappe "limpide". À l’heure où le rythme des matches est de plus en plus intense et où les schémas tactiques laissent de moins en moins de temps et d’espace aux joueurs (1), la conquête du dixième de seconde d’avance est un enjeu qui redonne paradoxalement à l’instinct du jeu et à la technique individuelle tout leur sens. Car le premier permet parfois à la seconde de s’exprimer. Le football actuel laisse souvent l’impression d’un gâchis en ne laissant plus la moindre place à la virtuosité, exception faite de quelques génies d’autant plus isolés. Ralentir le jeu: voilà une piste pour la réforme des règles, histoire de revaloriser la technique au détriment de la puissance athlétique et des diktats tactiques. Histoire de permettre aux techniciens de garder un temps d’avance.
(1) Lire la Chronique tactique de Michel Brahmi, dans le numéro 31 des Cahiers (“La crise du temps et de l’espace“).
La minute pathologique de Djibril Cissé
La scène se déroule sur OMtv: le consultant Jean-Marc Ferreri est interrompu dans son analyse d’après match. Loin du studio, mais face caméra dans les couloirs du Vélodrome, Djibril Cissé se saisit du micro de l’homme de terrain d’OMtv (Jean-Charles De Bono), une bouteille de soda à la main...
Jean-Marc Ferreri : "Faire sortir un attaquant pour faire rentrer un milieu de terrain, bravo, coaching gagnant d’Albert Ém..."
Djibril Cissé : "Burp!"
Jean-Marc Ferreri : "Et on est content pour l’ancien Auxerrois Djibril Cissé..."
Jean-Charles De Bono : "Oui, Djibril..."
Djibril Cissé : "Buuurp!"
Jean-Charles De Bono : "J’ai presque envie de te laisser le micro. Ça va ou quoi?"
Djibril Cissé : "Burp! Buuurp!"
Jean-Charles De Bono : "Il a des petits problèmes d’estomac, Djibril Cissé..."
My Taiwo is rich
En NBA, on décerne en fin de saison le trophée du "Most Improved Player", attribué au joueur ayant le plus progressé dans son jeu le temps de la saison (l’an passé, c’est le Français Boris Diaw qui a obtenu cette récompense). Si ce trophée devait être attribué en L1, il n’y aurait peut-être que Fodé Mansaré ou Achille Emana pour disputer la victoire à Taye Taiwo. Le Nigérian est en effet passé en quelques mois du statut de défenseur gaguesque au placement hasardeux, à l’assurance digne de Fred Déhu et dont les centres en tribune faisaient les gorges chaudes des commentateurs jusque sur ces pages, à celui de titulaire intraitable dans son couloir gauche.
Arrivé à l’OM en 2004, il avait avant tout impressionné par un physique qui lui valut rapidement le surnom de Goldorak. Ses premières sorties laissèrent apparaître un joueur mal dégrossi, à la technique approximative mal compensée par une frappe de mule. Son début de saison 2006/07 ne fut pas plus porteur d’espoir jusqu’à la catastrophique rencontre au Vélodrome face à Lyon, durant laquelle il fut asphyxié par Govou, puis expulsé après une faute grossière sur celui-ci.
Progression au sprint
Six mois plus tard, à seulement vingt-et-un ans, Taiwo est devenu quasi-infranchissable en un contre un, et a résolu une grande partie de ses problèmes de placement, notamment grâce à la présence à ses côtés de Julien Rodriguez, qui l’aura aidé à se stabiliser. Ses centres trouvent ses attaquants plus souvent que les supporters et il exprime une technique fine qu’on aurait crue impossible en début de saison. Ses deux ouvertures millimétrées, lors de la victoire phocéenne face à Sochaux, ont été décisives et avec trois buts et deux passes décisives depuis le début de la saison, l’arrière gauche marseillais est devenu un maillon indispensable du dispositif marseillais, aussi bien offensivement que défensivement.
À un poste où les grands spécialistes ne sont pas si nombreux en Europe, la L1 peut s’enorgueillir de compter dans ses rangs un joueur qui, s’il progresse autant dans les six prochains mois que dans les six derniers, n’aura déjà plus de rival au niveau national.
L'équipe pauvre type
Nos peu charitables confrères ont encore enfoncé Mauro Cetto, capitaine courageux qui les affronte pourtant en salle de presse. Ils se sont aussi tapé quelques petits jeunes, comme le Niçois Apam ou le Parisien Mulumbu, et un petit vieux: Caçapa, en rupture de ban(c) à Lyon.
Mais c'est quasiment une dream team qui anime l'attaque avec Monterrubio à la baguette, Cousin et De Melo sur les côtés pour alimenter Pagis (auquel on aurait pu préférer Elmander, aussi mal noté que le Marseillais). Comme quoi, rien n'est acquis dans l'œil des journalistes: ainsi, le plombisable Damien Grégorini a-t-il été crédité d'un 6,5 dans L'Équipe et de quatre étoiles dans FF. Et c'est l'excellent Teddy Richert qui encaisse.
Rennes de Bretagne
Longtemps le Stade rennais fut considéré comme le faire-valoir du FC Nantes Atlantique. Spécialistes de l’ascenseur D1/D2 dans les années 1980, les Rennais déclenchaient les sarcasmes du peuple jaune par leur inconstance crasse, d’autant plus miséreuse que les voisins de Loire jouaient les premiers rôles en D1, au cours de périodes fastes enluminées de générations sublimes allant de José Touré à Patrice Loko. Mais aujourd’hui, dans cette vaine lutte clochemerlesque pour la suprématie bretonne, la tendance s’est inversée. Le vent a tourné aussi violemment que l’ouragan de 87 sur la pointe du Raz.
Titillage de C1
Le match de samedi fut un condensé de l’inversion des valeurs brezhoneg. À la Beaujoire, les si titrés Canaris furent coulés sous l’Erdre par les fringants Rouges d’Ille-et-Vilaine, sur deux actions d’école, dont la seconde ponctuée d’une glissade de Barthez, dont-au-sujet-duquel-n’est-ce-pas-bien-sûr. Banderoles moqueuses des supporters rennais, rixe puis fuite de Fabulous Fab (tiens, ça rappelle le sobriquet de Fabiano époque Stade rennais), humiliante lanterne rouge, à dix places des Morbihannais de Gourcuff. Aucun outrage n’est épargné aux Jaunes à l’issue de ce derby en forme d’obsèques. Rennes en revanche, profite du surplace forcené des poulidors de L1 pour titiller, cette saison encore, la Ligue des champions.
Chats poreux
Mais le constat dépasse largement ce match symbolique. Nantes est en déliquescence, s’est sauvé de justesse en 2005et va choir en L2. Rennes au contraire s’est stabilisé et structuré au plus haut niveau national – malgré quelques relents de n’importe quoi, tel le limogeage de Cueff pour services bien rendus. Rennes recrute aussi plus judicieusement que son voisin (Moreira faisant figure de contre-exemple), postule désormais régulièrement à l’Europe et, comble de la volte-face, Rennes forme plus brillamment et plus efficacement que Nantes. Malgré les théories scientifiques irréfutables de Pierre Desproges (qui concluait, preuves à l’appui, que les Nantaises ont des chats poreux, vive la Bretagne), on débat toujours le point de savoir si Nantes est en Bretagne. En revanche, il est acquis que Nantes est en L2. Et ça, pour la Bretagne, c’est Vilaine.
L’envers du championnat
C’est la consternation dans le petit monde de l’envers du championnat. Douze ans après, Fabien Barthez était sur le point de retrouver l’échelon supérieur avec son nouveau club. Des mois de travail pour retrouver son formidable niveau de Manchester, un investissement sans relâche pour faire oublier le grand Stojkovic à la Beaujoire, tout ça pour se voir privé de la dernière ligne droite vers le premier sacre de sa carrière, c’est dur. Très dur.
Rappelons qu’il y a douze ans, il n’avait pas connu cette joie avec l’OM, accédant à la L2 sur tapis vert au sein d’un effectif qui n’était pas taillé pour atteindre le haut niveau. Une vieille frustration mâtinée d’un sentiment d’injustice que Barthez pensait avoir réparé en choisissant son nouveau club avec le plus grand soin.
Mais il n’aura finalement pas supporté l’engouement local d’un peuple qui se croit déjà arrivé, au point de venir chaudement congratuler Barthez à la sortie du stade. Un manque de professionnalisme insupportable. Car il reste encore quatre journées aux Nantais avant de s’assurer la première place du classement et savourer l’incroyable exploit. L’expérience a prévalu pour Barthez dont le départ brutal souligne le manque de sang-froid local si près du but . Dans quatre journées, ils auront tout loisir de festoyer, de chanter, ou même de ressortir Georges Eo pour allumer le feu micro en main…