La Ligue 1 est un roman à feuilleter épisode après épisode, écrit avec des plumes dans le coup.
Thérapie par les mots
Bien que le football soit une comédie écrite avec les pieds, criblée de dialogues convenus ânonnés par les cabotins sans grand talent, il conserve indéfiniment son pouvoir comique. Et pour se spécialiser dans la psychologie du footballeur, il n'est pas non plus besoin de faire de longues études…
À Marseille, il n'y a pas que les maillots qui sont cousus de fil blanc, la dramaturgie de la succession d'Alain Perrin l'est aussi. Une fois admis le diagnostic de son message ne passant plus au travers des conduits auditifs encombrés de ses joueurs, il suffisait de changer de langage pour que tout s'éclaircisse. Les joueurs ne parlaient pas le Perrin? Heureusement, l'Anigo est limpide, c'est un parfait mélange entre l'inévitable lexique "guerrier" et le discours amoureux. Le minot tord le coup aux doutes sur sa stature, et il a du "supplément d'âme" à revendre. Son équipe a assimilé cet enseignement avec une facilité déconcertante, traduisant ses préceptes aussi bien sur le terrain que devant les micros. En une seule interview (FF de mardi), Christanval postule au rôle de premier de la classe: "envie" (3X), "sublimés" (2X), "détermination" (2X), "engagement" (2X), "être positif", "mettre le pied", "jouer sans frein", etc.
C'est aussi ça la magie du football, cette façon de révolutionner une équipe juste avec des mots, capables de débloquer des joueurs totalement inhibés par un manque de communication… Et comme l'auto-persuasion est contagieuse, L'Équipe a estimé, au terme d'un match remporté laborieusement sur une frappe dévissée, que "le remplacement d'Alain Perrin par José Anigo a eu un effet bénéfique pour l'OM". Il faut dire qu'ils auraient l'air bête de dire le contraire, maintenant. Par contre, dans quelques mois…
Les supporters niçois ont plaidé la cause d'Everson et Abardonado. |
Lyon libéré ?
Sur la foi de trois très jolis buts, marqués avec une aisance remarquable, on peut penser que l'Olympique lyonnais est entré dans sa phase préférentielle, celle du finish parfait. La thèse vaudrait d'autant mieux que le club se sentirait paradoxalement libéré par l'avance monégasque, qui met finalement plus de pression sur le leader… Le paradoxe se prolonge cependant dans le constat que, comme le fait remarquer Le Guen,
"il y avait sans doute moins de reproches à faire à l'équipe au niveau du jeu, lors des trois matches précédents, où nous n'avions pourtant pris que deux points". Les mauvaises langues diront que l'entraîneur n'est jamais aussi critique que lorsque Dhorasoo et Carrière marquent un match de leur empreinte (un but et deux passes décisives), mettant le doigt sur ses choix les plus contestés… Mais c'est justement dans cette fin de championnat que les éternels problèmes de riche de l'OL ont de fortes chances de se transformer en atouts décisifs.
Tablettes de la loi
En déclarant à la presse
"Ils me font chier à L'Equipe et à France Football en m'attribuant six buts, moi je dirai plutôt huit", Alexander Frei a soulevé un grave conflit d'autorité. Cette récrimination en effet été l'occasion de découvrir que si la Ligue attribue sept réalisations à l'attaquant suisse, le quotidien et l'hebdomadaire sportif s'en tiennent à six. Ce n'est pas la première fois que ce genre de divergence se produit, mais il serait temps de savoir si l'instance supérieure du football professionnel réside à Issy-les-Moulineaux ou rue Léo-Delibes à Paris.
Philippe Genin et Alexander Frei : entre ces deux grands timides, le trouble est palpable. |
Le poids Richard
Malgré un début de redressement de son image, qui a étrangement correspondu avec le départ de Patrick Proisy, le Racing Club de Strasbourg souffre de l'inconstance de ses résultats, et en particulier de ses faiblesses défensives: le jeu tourné vers l'avant prôné par Kombouaré, et qui a eu ses moments de réussite, pâtit encore d'un manque de réglages, de la jeunesse de l'effectif et de circonstances qui ont notamment obligé l'entraîneur à multiplier les tandems en défense centrale. Mais c'est encore Richard Dutruel qui écope le plus, auteur d'erreurs individuelles assez accablantes. Des manquements d'autant plus gênants qu'ils font suite aux hésitations du club alsacien en début de saison concernant le titulaire du poste, et entretiennent la tendance du RCS à héberger des gardiens aux qualités aléatoires… Toujours est-il que chaque semaine, l'ex-Barcelonais reçoit des volées de bois vert de la part d'une presse locale peu charitable (que l'on peut notamment consulter sur le site des
Dernières nouvelles d'Alsace), pointant par exemple
"la coupable incurie d'un Richard Dutruel, à la main tremblotante sur l'ouverture du score".
Sponsor personnel : Avec Richard Dutruel et Tryba, les portes et les fenêtres sont toujours ouvertes. |
Les observations en vrac
> Quatre jaunes et deux rouges : Lens n'a pas encore compensé l'absence de ses Africains, mais celle de Cyril Rool, si.
> Ecker a négocié son impunité avec les arbitres en début de saison?
> Depuis un an, Sytchev multiplie les frappes de 30 mètres pour inscrire un but d’anthologie et il finit par marquer en se prenant lui-même à contre-pied…
> Victoire de Toulouse et du Mans à l’extérieur. Plus de doute possible: il y a vraiment une conspiration en haut lieu pour discréditer la Ligue 1.
> Pas de bol : cette semaine, Vincent Hardy aurait pu dire "Franco" à la place de "Francia" sans que personne ne s’en aperçoive, mais il ne présente plus Téléfoot.
> Après plusieurs saisons en Liga, Richard Dutruel est capable d'interpréter l'Arconada avec beaucoup de maîtrise.
> Incroyable ! Didier Drogba prouve qu’il est possible d’être aussi prétentieux que Thierry Henry dans la célébration d’un but.
> Pavon menace d’envoyer l’équipe bis des Girondins pour jouer le match en retard contre Lyon, mais plusieurs mères se sont déjà opposées à ce que leur fils rate les cours en pleine semaine.
Toutes les traditions ne se perdent pas à Canal+ : Philippe Doucet est clairement l'héritier capillaire de Philippe Gildas. |
Le Top vannes auto-dérisoires
Jean-Claude Plessis : "L'entraîneur n'est pas en danger".
Peguy Luyindula : "La vérité, c'est que mon pied gauche n'a pas voulu que mon pied droit marque"
Bruno Basto : "On ne va pas prendre la grosse tête".
La déclaration née d'hier
José Anigo (AFP) : "Même si nous sommes là simplement depuis 48 heures, nous n'avons rien lâché jusqu'au bout".
La déclaration du génie du coaching
José Anigo (AFP) : "Il y a eu un esprit extraordinaire, y compris dans les vestiaires à la mi-temps, où j'ai dit aux joueurs que l'égalisation de Lens n'était pas la fin du monde".
La déclaration bridée
Fabrice Fiorèse (Le Parisien) : "On peut courir pendant des heures, mais impossible d'accélérer, comme des diesels". Fallait pas prendre Volvo comme sponsor.
La déclaration du fayot
Après son but, Sytchev se précipite vers Anigo pour lui dire "c’est pour toi".
Un irresponsable a tenté de retenir Éric Deflandre à Lyon. |
La déclaration qui ne fait même plus rire
Guy Roux (Est républicain) : "Vous allez rire, mais je pense qu'avec 38 points, nous ne sommes plus très loin d'avoir ce qu'il faut pour rester en Ligue 1".
La déclaration certifiée conforme
Juninho (site officiel de l’OL) : "Le plus important est de prendre les matches les uns après les autres".
La déclaration qui ne connaît pas son bonheur
Bertrand Marchand : "On a raté le coche". Ne te plains pas, à Marseille, ils n'ont pas raté le coach.
La déclaration qui annonçait la couleur
Johnny Ecker (FF) : "Il y a de l'agressivité à l'entraînement, il faut qu'on puisse la retransmettre en match".
Sylvain Franco : enfin un footballeur français capable de rivaliser avec les plus jolis Italiens. |
La déclaration du poète disparu
Thierry Goudet (L'Équipe) : "Les joueurs sont meilleurs dans les duels, ils sont plus tueurs dans l'âme".
La déclaration égarée
Jean-Christophe Devaux (DNA) : "Nous sommes tombés sur l'école de Guy Roux". Le chauffeur du bus croyait que la Meinau était à Colmar?
La déclaration mobilière
Laszlo Bölöni (L'Équipe) : "Ce succès nous remet dans un fauteuil". C'est vrai qu'à Rennes, on est content de s'asseoir dans le ventre mou.
La déclaration du maître nageur
Pierre Laigle : "Il faut sortir la tête de l’eau". Doumeng n’a toujours pas pied à La Mosson?
Diriger le PSG : un bonheur communicatif. |
La déclaration agacée
Bertrand Marchand (Ouest-France) : "Ce qui est vraiment très agaçant, c'est de constater qu'on n'arrive pas à jouer un match sans prendre des buts".
La déclaration des soirées pluvieuses
Gervais Martel : "Tous ces cartons, ces expulsions, vous avez vu ? C'était le jeu des sept familles". D'après leur banderole "Encore 1000 bornes pour nos guignols", tes supporters avaient plutôt envie de jouer à un autre jeu de société.
La déclaration avec l’accent québécois
Didier Deschamps (C+) : "C’était un match difficile avec le vin".
La déclaration au charbon de bois
Vahid Halilhodzic (L'Équipe) : "J'espère que c'est le dernier joker que nous avons grillé". Le premier, c'était Hakan Yakin?
On a retrouvé l'autre personne qui, avec Thierry Goudet, croit au maintien du Mans en L1. |