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Le football sur tapis vert

Annonçant une manne financière aussi considérable que les risques de corruption, "l'ouverture" du marché des paris sportifs en ligne ne va faire que des gagnants... sauf les parieurs, évidemment.
Auteur : Jérôme Latta le 12 Avr 2010

 

Adoptée par l'Assemblée nationale après un long processus législatif  (lire "2010, année de la licence"), la loi qui libéralise les paris sportifs et met fin aux monopoles publics pourrait providentiellement entrer en vigueur le 1er ou le 10 juin, juste avant une Coupe du monde qui va servir de rampe de lancement à un phénomène dont l'on va constater la mise sur orbite dès la prochaine saison de Ligue 1....
Les trois poids-lourds européens d'Internet Bwin, Betclic et Unibet et des dizaines de challengers vont donc disputer à la Française des jeux et au PMU (1) les parts d'un marché des paris sportifs en pleine croissance, qui atteindrait 1,6 milliards d'euros en 2015 pour près de quatre millions de joueurs. Première priorité: faire fonctionner très vite l'Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel), qui délivrera les agréments après étude des candidatures d'une cinquantaine d'opérateurs.


"Assécher" les paris illégaux
Sans trop insister sur la rente qu'encaissera l'État au passage (2), la majorité a souligné sa volonté, avec cette "ouverture maîtrisée", d'encadrer un secteur qui draine déjà des millions de parieurs français vers des sites de fait illégaux, en "asséchant" ce marché gris. L'encadrement réside en particulier dans la limitation des types de jeux autorisés (3). Les opérateurs privés, globalement satisfaits, ont regretté un cahier des charges techniques assez lourd (4), ainsi que le taux de retour aux joueurs, plafonné à 85% en raison de prélèvements plus importants (7,5% des mises) que dans la moyenne européenne. Ils craignent que les parieurs continuent de parier illégalement "à l'étranger"...
Le PS, qui a porté un recours devant le Conseil constitutionnel, a dénoncé un "cadeau aux amis du Fouquet's" (5) et un texte qui dérégule plus qu'il n'encadre. Mais la bataille d'amendements menée par les socialistes est restée vaine, et l'inertie de leurs homologues de la majorité a permis de respecter un calendrier très tendu.

paris_sportifs2.jpg


Ce n'est plus du sport, mais c'est encore de l'argent
Pour les médias spécialisés, il s'agit là d'un afflux de ressources publicitaires majeures (6), bienvenu dans un contexte économique alarmant mais qui aura des conséquences éditoriales lourdes, que l'on mesure déjà avec la multiplication des contenus liés aux pronostics: les opérateurs sont à la recherche de partenariats leur permettant de bénéficier d'une marque médiatique déjà établie, et d'accéder à son audience ou son lectorat. Il est à craindre que de nombreux supports poussent un peu loin l'adaptation à cette demande en consacrant une large part de leurs contenus à un domaine qui ne ressortit plus de très près à "l'information".
Le groupe Amaury est prêt à lancer sa plateforme sajoo.fr au travers d'une société commune avec Bwin (7), et compte bien profiter des synergies avec ses titres. "Sajoo est un relais de croissance. L'objectif est d'en faire le quatrième pilier du groupe après ASO, Le Parisien / Aujourd'hui en France et L'Équipe", a confié aux Échos Christophe Blot, directeur délégué.


Double jackpot pour les clubs
"Nous en avons assez d'être sous la pression permanente de quelques intérêt particuliers, ceux de M. Aulas et de ses amis, qui voudraient légiférer à notre place", a déclaré le groupe PS lors de l'examen de la loi, tandis que le député Gaëtan Gorce demandait ce qui avait été entrepris pour que le président lyonnais "soit sanctionné pour incitation à parier sur des sites illégaux" (cités par Renaud Lecadre dans Libération). Même si les enjeux dépassent largement la courbe de l'action OL Groupe, le fait est que le dispositif est doublement rémunérateur pour les clubs. Ils vont d'abord pouvoir bénéficier des opérateurs en tant que sponsors, la croisade vestimentaire de Jean-Michel Aulas trouvant là sa victorieuse conclusion – retardée mais providentielle pour des clubs français qui peinent à valoriser leurs maillots. Ils percevront aussi les droits d'exploitation versés par les sociétés de paris dans des conditions qui restent à négocier, en ce qui concerne le football, entre ceux-ci et la Ligue. De bonnes discussions en perspective, surtout lorsqu'il s'agira, ensuite, de répartir ce nouveau pactole entre les clubs.


L'odeur du book
Frédéric Thiriez le claironne: "Le risque de fraude sera réduit au minimum". Ce qui revient à reconnaître le risque, et à n'offrir que des promesses quant à son ampleur. Car la fraude et la corruption vont de pair avec les paris sportifs: "Plus l'offre de paris est importante, plus les risques de matches truqués augmentent", concluait le rapporteur de la loi lui-même, Jean-François Lamour, en septembre dernier. L'ancien ministre est cité par lemonde.fr, dont l'article donne aussi la parole au consultant Christian Kalb: "On peut parier sur n'importe quoi, sur les divisions amateurs, beaucoup plus faciles à corrompre, et sur n'importe quel geste de jeu" (8).
La porte ne s'ouvre donc pas qu'aux industriels du pari qui ont pignon sur rue, mais aussi aux innombrables organisations criminelles, dont beaucoup sont basées en Asie, qui parasitent le système à distance (lire "La corruption pour les nuls"). La vaste affaire de corruption révélée fin 2009 dans une douzaine de championnats européens démontre la réalité des dangers. Aussi ne peut-on parler que de "garde-fous" et... parier sur leur efficacité en sachant qu'elle sera de toute façon relative.


"Une part de rêve"
Les psychologues, eux, s'inquiètent du développement massif et prévisible de nouvelles addictions au jeu: les pratiques en ligne impliquent une consommation à domicile, avec de l'argent dématérialisé, et l'impossibilité d'empêcher les joueurs compulsifs ou les mineurs de participer... Le nombre des "accros" aux jeux de hasard est déjà estimé entre 500.000 et 900.000 en France, et ce ne sont pas les prétentions à un "jeu responsable", dans un contexte de concurrence publicitaire et commerciale acharnée, qui vont le faire diminuer. La libéralisation aura aussi des conséquences sanitaires considérables.

Les jeux d'argent n'offrent que le hasard à leurs clients, et réservent la certitude des profits à ses organisateurs. "Il s'agit d'assurer une part de rêve" aux Français, a déclaré le nouveau ministre du Budget François Baroin, qui a défendu le projet au Parlement. La nature du rêve vendu aux citoyens s'en trouve dévoilée: une illusion livrée aux marchands. Cette industrie-là et celle du football étaient faites pour se rencontrer.


(1) Le PMU, pour se diversifier, va proposer des offres "sport" en collaboration avec des sociétés britanniques, et vient de conclure un partenariat avec la FFF.
(2) Les opérateurs étant domiciliés en dehors de la France, ils ne paieront toutefois que des taxes, pas d'impôts.
(3) L'Arjel délivrera des licences de cinq ans renouvelables, pour trois catégories de jeux: sport, paris hippiques et poker – excluant notamment les autres jeux de casino et les loteries.
(4) Il prévoit un système informatique accessible à l'Arjel et un coffre-fort électronique conservant la trace de toutes les transactions.
(5) Martin Bouygues, François Pinault, Stéphane Courbit, Patrick Le Lay, Vincent Bolloré, Alexandre Balkany (fils de Patrick) ou Dominique Desseigne, considérés comme des proches ou des soutiens de Nicolas Sarkozy, ont des intérêts économiques (quand ce ne sont pas des conflits d'intérêts) auxquels bénéficiera cette libéralisation.
(6) Du moins durant la période initiale de forte concurrence: le marché publicitaire dégonflera lorsque des opérateurs dominants se seront dégagés.
(7) Le concurrent Betclic, qui appartient au groupe Mangas Gaming de Stéphane Courbit, s'est allié à Europe1, Sportingbet au Monde – pour ne prendre que ces exemples.
(8) L'Arjel prévoit d'interdire les paris sur des faits de jeu anodins qui prêtent plus le flanc aux manipulations.

Réactions

  • Pascal Amateur le 12/04/2010 à 18h04
    Quand l'ecstasy puis la coke se sont "démocratisées", la consommation a explosé. Il faudrait être aveugle, à mon sens, pour penser que l'offre n'entraîne pas la demande. Se limiter à un raisonnement keynésien basique (la demande entraîne l'offre) paraît problématique. Car si l'offre ne créait pas de la demande, pourquoi y aurait-il une offre ??
    Donc la consommation augmentera, et l'addiction aussi, vu qu'elle est liée à ladite consommation.

  • Mangeur Vasqué le 12/04/2010 à 19h06
    L’article de Simon Kuper (écrivain / journaliste sérieux, d’après ce
    que j’en sais) sur le trucage des matchs dans l'avant-dernier Four Four Two est inquiétant.
    (« Match-fixing : it’s happening right now »sous-titre : There’s a world Cup looming, but no-one seems worried about cheating »).

    Il commence ainsi :

    « Hier soir, une source bien informée m’a parlé d’un club qui s’est acheté une finale de coupe d'Europe. Les adversaires de ce club
    lors de cette finale venaient d’une ville pauvre. Le club riche y fit envoyer des camions de nourriture et gagna aisément le match.
    Le trucage de match est devenu le principal adversaire du football,
    plus dangereux que le dopage, les dettes ou les hooligans.
    Le trucage de match ne touche pas que le championnat de Macédoine ou la troisième division russe. Aujourd’hui, il a lieu dans probablement la plupart des championnats européens (et bien au-delà), et même lors de coupes du monde. Pourtant, bizarrrement, on en parle presque pas ».

    Etc.

    Kuper offre une brève histoire du jeu / des paris sur le cricket dans les pays asiatiques depuis l’avènement de l’internet (pas mal de scandales sur les matchs de cricket), et précise que les Asiatiques préférant le foot maintenant (en tous les cas financièrement), ils se tournent vers ce sport.

    Il donne un aperçu de la taille de ce marché en Asie : les 2 principales sociétés de paris asiatiques ont chacune un CA comparable à celui de Walmart ! Le montant total mis sur un match écrase souvent le total des salaires des joueurs. Le trucage est ainsi inévitable, conclut-il.

    Il parle du bouquin de Declan Hill évidemment (sorti ici mais bien amputé, nos « libel laws » – diffamation écrite – étant bien plus sévères qu’ailleurs), de ce qu’a révélé Appiah à Hill, etc.

    Il raconte la 2ème div hollandaise, où, selon lui, on voit pas mal d’Asiatiques avec tout un attirail d’écoute sur eux traîner dans les stades bataves (visiblement en train de relayer des infos quelque part).

    Bon, il parle de pas mal de choses, du Calciopoli, de Hoyzer, et de novembre dernier quand 17 personnes soupçonnées de trucage dans divers championnats européens (et matchs qualificatifs de LdC) furent arrêtées en Allemagne et Suisse.

    Et les déclas de Peter Limacher (UEFA) : le plus gros scandale de pari de l’histoire du foot européen. Mais qui n’entraîna aucune enquête…

    Et Kuper de parler de toutes ces rumeurs sur certains matchs touchant des Ventre-Mousistes de PL.

    C’est un article excellent, je ne vais pas tout résumer, mais il a l’air bien informé.

    Pour ceux qui lisent l’anglais, ça vaut le coup de s’abonner à FFT, c’est vraiment excellent.

  • Qui me crame ce troll? le 12/04/2010 à 21h03
    Fier Panpan
    lundi 12 avril 2010 - 16h15
    je suis abasourdi par le niveau d'argumentation style "on n'est pas en chine, on va pas interdire des trucs"... c'est du premier degré ?
    ----
    Et niveau argumentation, "ya risque d'addiction, donc faut interdire", ça se situe où sur ton échelle de valeur?

    José-Mickaël
    lundi 12 avril 2010 - 17h53
    Ce n'est pas une question de bien et de moche, mais de quantité (et de facilité). Pour l'instant, l'offre en matière de paris est relativement modeste (tiercé, loto, loto sportif...). Si on ajoute les paris en ligne, ça va exploser, donc on va multiplier les risques d'addiction (surtout qu'il y a clairement une demande), vous ne croyez pas ?
    ----
    Vous faites comme si les paris en ligne n'existaient pas déjà c'est ça?
    S'il y a une autorité pour réguler tout ça, c'est peut-être plus intéressant que pas d'autorité et un joyeux foutoir où M l'addict peut dépenser tout son argent?


    Pascal Amateur
    lundi 12 avril 2010 - 18h04
    Donc la consommation augmentera, et l'addiction aussi, vu qu'elle est liée à ladite consommation.
    -----
    Je serais curieux de savoir quels sont les pourcentages d'addicts par rapport aux addicts ('tain je trouve pas le terme français correspondant) du tabac, de l'alcool, des achats compulsifs de vêtements en période de solde, des jeux à gratter, du canabis etc

  • José-Mickaël le 13/04/2010 à 00h42
    Qui me crame ce troll?
    lundi 12 avril 2010 - 21h03
    > Vous faites comme si les paris en ligne n'existaient pas déjà c'est ça?

    Non, non, je fais comme s'il existait une situation acceptable (interdit de faire de la pub pour les paris en lignes, jeux gérés et contrôlés par l'État, etc.)

    > S'il y a une autorité pour réguler tout ça, c'est peut-être plus intéressant que pas d'autorité et un joyeux foutoir où M l'addict peut dépenser tout son argent?

    Sauf que ce n'est pas ce qui est envisagé. Ce serait le cas si l'État avait le monopole des paris en ligne, or il s'agit au contraire de privatiser ça.

  • José-Mickaël le 13/04/2010 à 00h46
    Oups, je ne suis pas clair : il s'agit de privatiser rien du tout. Je recommence : il s'agit de permettre au secteur privé d'organiser des jeux et des paris en ligne.

  • Qui me crame ce troll? le 13/04/2010 à 09h57
    La pub est déjà autorisée : je secoue mon maronnier depuis Real-OL mais le maillot madrilène arborait un joli écusson d'un site de paris en ligne. Comme les sites de l'OL, du PSG ou de l'OM. Après je ne sais pas réglementairement comment c'est possible (partenariat?). D'après l'article, il y aura une "Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel), qui délivrera les agréments après étude des candidatures d'une cinquantaine d'opérateurs."

  • parisansgain le 13/04/2010 à 18h14
    Troglodyt
    lundi 12 avril 2010 - 12h02
    Il faut aussi souligne la probité des Cahiers, qui préfèrent nous mettre des scanners déshabillant, des machines à pets, des prêts à la consommation surpayés, et des yaourts aux saveurs à l'harmonie douteuse ; plutôt que de succomber à la facilité des publicités pour les sites de paris en ligne.

    ----------------------

    gasp c'est exactement ce que je voulais poster après avoir lu l'article, heureusement que j'ai lu les réactions avant de poster...

La revue des Cahiers du football