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Libéral devant la défense

Bibliothèque – Imprégné d'un libéralisme sans complexe, le livre Les attaquants les plus chers ne sont pas ceux qui marquent le plus porte sur l'application des statistiques au football... et s'avère tout à fait passionnant.

Auteur : Thomas Fourquet le 13 Dec 2013

 

 
Correspondant à Paris et spécialiste football du Financial Times, Simon Kuper n’est pas ce qu’on appelle un romantique du ballon rond. En fait, on pourrait lire ce bouquin, co-écrit avec l'économiste Stefan Szymanski, comme une tentative de régler définitivement son compte au romantisme, de le laisser pour mort dans une ruelle sombre, le crâne éclaté à coups de batte de base-ball.


Le base-ball est justement le point de départ de cet ouvrage, et plus précisément l’épopée de Billy Beane, le manager des Oakland Athletics qui a révolutionné l’approche du jeu au début des années 2000. Retracée dans l’excellent film Moneyball (avec Brad Pitt et Jonah Hill), il s’agit d’une histoire particulièrement édifiante, une sorte de conte de fées pour tous les statisticiens à lunettes du globe: comment une application intelligente et systématique des statistiques a permis de transformer une équipe moyenne en machine à gagner.
 

 

Les attaquants les plus chers ne sont pas ceux qui marquent le plus



Conclusions édifiantes

En 18 chapitres alertes et pédagogiques, chacun traitant d'une question précise ("Les hommes préfèrent les blonds", "Le plus mauvais business du monde", "L'entraîneur sert-il à quelque chose?"), Kuper et Szymanski présentent les résultats de cette approche appliquée au football – que ce soit le jeu lui-même ou le business qui l'entoure. La matière est austère, mais la lecture tout à fait passionnante, au point que même le cédéfiste le plus intransigeant y trouvera son compte – à son corps défendant bien sûr! En effet, bien que leur parti pris soit pour le moins contestable (en quelques mots, un club de foot devrait être géré comme n'importe quelle entreprise), leurs conclusions sont malgré tout édifiantes. En voici quelques-unes, choisies parmi les très nombreux faits et anecdotes, résultats pour la plupart d'études universitaires, présentés dans l'ouvrage.

Le constat le plus notable est sans doute le suivant: le facteur explicatif dominant des résultats d'un club est la masse salariale. Cela semble tomber sous le sens, mais en réalité les auteurs vont beaucoup plus loin: la compétence de l'entraîneur n'entre à peu près pour rien dans les performances, pas plus que le montant des transferts – même si cette variable est évidemment corrélée à la masse salariale. Ces conclusions sont l'aboutissement de la méthode de la régression linéaire, qui vise à isoler les variables explicatives d'un résultat. La méthode semble un peu cavalière (d'après des personnes plus compétentes en maths que moi), mais elle a le mérite de donner à réfléchir.
 

Autre point marquant: la surexposition médiatique du football masque le fait qu'il s'agit en réalité d'un business de dimensions extrêmement modestes. "Le Real Madrid a le même chiffre d'affaires que la 132e entreprise finlandaise", lit-on page 52. Ce qui n'est pas si étonnant quand on songe au fait qu'il est parfaitement possible de suivre toute l'année son club préféré sans débourser un centime – ou au "pire" en achetant un maillot et en prenant un abonnement saisonnier. Au fond, les clubs n'ont pas grand-chose à vendre, et les perspectives de développement sont peu nombreuses au-delà de la trilogie droits télé / recettes de stades / merchandising et sponsoring.
 


Le modèle de la régularité

Les auteurs dessinent en creux l'idéal d'un club aux résultats réguliers, raisonnable et malin sur le marché des transferts et réalisant un modeste profit annuel – le mieux que l'on puisse espérer compte tenu des caractéristiques du secteur évoquées au paragraphe précédent. Le livre est donc un plaidoyer pour les gestionnaires, ces jeunes managers cravatés tant redoutés et détestés des supporters, que Kuper et Szymanski opposent aux anciens joueurs et "historiques", figures sans doute symboliques mais responsables de la gestion calamiteuse et amateuriste de la plupart des clubs de foot. Les auteurs manifestent un dédain sans complexe pour les aspects historiques et affectifs de la vie des clubs, si importants dans le football anglais. D'ailleurs, expliquent-ils, le fameux attachement à vie pour un club, parfois transmis de père en fils, est un mythe: les supporters sont en réalité très versatiles et avant tout attirés par le succès.

Le principal reproche qu'on pourrait leur adresser est justement cette préférence pour la régularité, appréciable en gestion mais pas très excitante en termes sportifs. En fait, reconnaissent-ils, un président de club doit arbitrer entre la saine gestion et la gloire. La saine gestion, c'est Arsenal et Lyon dans les années 2000: une régularité remarquable, en championnat comme en Ligue des champions, mais finalement peu de performances marquantes, et surtout un plafonnement (les quarts de finale de la Ligue des Champions pour Lyon, la troisième ou quatrième place du championnat pour Arsenal). La gloire, c'est Liverpool: deux finales de C1, dont une remportée au bout d'un match mythique, mais aucun championnat, des sommes phénoménales dépensées en transferts, une gestion chaotique. On l'aura compris, les auteurs affichent nettement leur préférence pour le premier modèle, en minimisant de manière assez curieuse les succès de Rafael Benitez (une Ligue des champions et une finale en trois ans!).

Alors oui, le football que Kuper et Szymanski appellent de leurs vœux n'est guère enthousiasmant. Ce n'est certes pas celui des Cahiers; mais pas non plus celui des sugar daddies qui mettent la main, les uns après les autres, sur les clubs les plus prestigieux pour en faire des marques internationales au service de leur image. Une lecture très agréable et un utile point de départ pour réfléchir à l'avenir qui se dessine.

Les attaquants les plus chers ne sont pas ceux qui marquent le plus (titre anglais: Soccernomics) de Simon Kuper et Stefan Szymanski – De Boeck, 2009, 412 p.
 


Dans le chapitre intitulé "Quand l'économiste a peur des penalties", Kuper et Szymanski racontent que, avant la finale de la Ligue des champions de 2008 entre Chelsea et Manchester, l'économiste Ignacio Palacios-Huerta a envoyé la note suivante à Avram Grant en prévision d'une éventuelle séance de tirs au but:
1. Van der Sar plonge très souvent à droite face à un droitier et à gauche face à un gaucher (c'est le "côté naturel" du tireur, celui qu'il choisit la plupart du temps);
2. La majorité des penalties arrêtés par Van der Sar étaient à mi-hauteur;
3. Lorsque Cristiano Ronaldo s'arrête dans sa course d'élan, il tire dans 85% des cas à droite;
4. Tirer en premier est un avantage décisif, c'est donc ce qu'il faut choisir si l'on remporte le tirage au sort.
Comme on le sait, la finale s'est jouée aux tirs au but. Voici comment elle s'est déroulée.
En dépit du résultat final, c'est un bon exemple de ce que les stats peuvent apporter au football.

 

Réactions

  • José-Mickaël le 14/12/2013 à 09h20
    Bien dit Dugamaniac !

    Sens de la dérision : ce qu'il faut comprendre, je crois, c'est que le football bien géré à la Arsenal ou à la Olympique Lyonnais n'est pas la meilleure idée pour apporter de la passion. Bien sûr ça ne veut pas dire qu'il faut tomber dans l'excès inverse. L'exemple de l'article, avec l'opposition entre Liverpool et Arsenal, est à mon avis très éclairant.

  • Gumindinho le 21/12/2013 à 23h15
    Salut,

    Je suis l'auteur de l'article (et nouvel inscrit sur le forum !). En fait je pense m'être mal exprimé en parlant de la compétence de l'entraîneur José-Mickaël et A la gloire de Coco Michel : pour les auteurs, la corrélation est très faible entre l'identité de l'entraîneur et les résultats. En revanche, la corrélation entre la masse salariale et les résultats est extrêmement forte. Les auteurs en concluent que la variable explicative la plus importante est bien le salaire (et non les transferts, pour lesquels la corrélation est faible) : donc José-Mickaël, ils sautent le pas de la corrélation au facteur.
    Enfin, pour être clair, je ne partage pas la conception du football de Kuper et Szymanski. D'ailleurs j'écris ce message en écoutant la pub pour l'amical PSG-Real à Doha dans quelques jours qui tourne sur BeIn Sport. C'est pas rigolo.
    Mais ils donnent quelques exemples très pertinents d'une utilisation bien comprise des statistiques. Parmi les exemples que j'aurais dû mentionner dans le compte rendu il y a celui-ci : quelqu'un a prouvé que les footballeurs noirs étaient sous-payés jusqu'aux années 90 en comparant les résultats d'équipes aux masses salariales comparables. Il en ressortait que plus l'équipe comptait de joueurs noirs, meilleurs étaient les résultats. Donc en procédant par induction, on en déduisait que les footballeurs noirs n'étaient pas rétribués à leur valeur réelle. Je trouve que ce n'est pas bête du tout comme démarche.
    En fait la question de fond, c'est comme tu l'as dit dugamaniac, la question de la rationalité. Le foot c'est irrationnel, mais les propriétaires des clubs recherchent au contraire de la rationalité, à gérer leur club comme une entreprise. La plupart du temps d'ailleurs ils n'y arrivent pas ! Mais même quand ils y arrivent, on peut se demander si c'est vraiment souhaitable au fond, et si c'est ce qu'attendent les supporters. Pour Kuper et Szymanski, on peut trouver la martingale en suivant l'exemple de Billy Beane : trouver les joueurs sous-évalués par le marché, par exemple de jeunes sud-américains, ce que Lyon a très bien fait pendant longtemps. ça a marché pour Lyon qui a fait preuve d'une régularité extraordinaire en Ligue des champions, mais régularité signifiait aussi plafonnement. Et au fond ça ne fait pas tellement rêver : qui a envie d'aimer un club qui joue juste à son niveau ? On veut des victoires improbables et des défaites retentissantes.

    Voili voilou

La revue des Cahiers du football