L'Ibère sera rude
Régulièrement éliminés de façon prématurée lors des grandes compétitions européennes, les Espagnols espèrent ne pas devoir subir une nouvelle fois ce sort lors de la prochaine Coupe du Monde. Si l’équipe n’a pas beaucoup évolué depuis l’Euro 2000, elle a tout de même vu l’éclosion de quelques jeunes très prometteurs. Elle peut aussi se prévaloir de certains acquis en termes de qualité de jeu. Elle compte enfin s’appuyer sur des joueurs au talent confirmé, évoluant dans les meilleurs clubs du continent. Mais ces conditions idéales seront-elles suffisantes pour apporter enfin à l’Espagne un premier titre mondial?
Surmonter la culture de la loose
C’est une chose entendue: l’Espagne n’est pas performante lors des grandes compétitions internationales. Hormis un Euro remporté dans les années 60, les joueurs ibériques ont toujours échoué relativement loin du but. Si la grosse désillusion vécue lors du Mondial Français est dans toute les mémoires (les Espagnols avaient été éliminés dès la première phase), les autres compétitions disputées récemment n’ont pas été plus concluantes. Quarts de finaliste des deux derniers Euros et absents du précédent, quarts de finaliste également aux Etats-Unis et éliminés dès les huitièmes quatre ans auparavant en Italie… L’énumération pourrait durant durer longtemps sur le même mode…
Si ces échecs n’ont pour la plupart rien de scandaleux, ils ont cependant profondément marqué les mentalités espagnoles. La plupart des amateurs de ballon rond de la péninsule portent un jugement très critique sur leur sélection. Il lui est d'abord reproché son manque de vécu international, au contraire de l’Argentine par exemple, véritable référence outre-Pyrénées. Au petit jeu des pronostics, les hommes de Bielsa sont ainsi donnés favoris par une large partie de l’opinion, au même titre que la France ou l’Italie. Quant aux Espagnols, ils se voient modestement derrière ce trio, à la bataille avec le Brésil ou l’Allemagne pour les places d’honneur. L’objectif de Camacho est d’ailleurs clair pour ce prochain Mondial: proposer du beau jeu, bien avant d’espérer pouvoir soulever pour la première fois le trophée suprême.
En Espagne, c’est aussi la mentalité des joueurs qui est montrée du doigt. A l’image de ce que déclarait récemment le sélectionneur Antonio Camacho dans une interview accordée au journal As, "Le joueur espagnol n’assume pas ses responsabilités. Sans Rivaldo et Kluivert, le Barça est une autre équipe. Sans Figo et Zidane, il en est de même pour le Real". Ce serait donc dans la capacité de ses joueurs nationaux à se comporter en leaders que se trouverait la clef de la réussite.
Une voie royale ?
Côté adversaires, on ne peut pas vraiment dire que le tableau proposé aux espagnols soit particulièrement difficile. On pourra toujours objecter que ce semblait déjà être le cas en 1998. Il n’en reste pas moins que la Slovénie, le Paraguay et l’Afrique du Sud ne constituent pas exactement des foudres de guerre. Les premiers avaient d’ailleurs déjà été les victimes des hommes de Camacho à l’Euro 2000. Quant aux Paraguayens, ils auront peut-être du mal à renouveler leur performance de 1998, qui les avait vu barrer la route des huitièmes à ces mêmes Espagnols… En cas de qualification, même si celle-ci n’est évidemment pas acquise, les Espagnols devraient affronter vraisemblablement le Cameroun (champion d’Afrique) ou l’Allemagne. Par la suite, le tableau pourrait leur proposer en quarts et demi-finale l’un des autres représentants de l’Europe du Sud, le Portugal ou l’Italie. Bref, une montée en puissance progressive…
France 1998, Espagne 2002 ?
On conclura par un petit clin d’œil à la sélection espagnole: ce qui est frappant dans sa situation actuelle, c’est la similitude qui peut être faite avec les Bleus période pré-98.
D’une part, le complexe d’infériorité dont sont victimes les joueurs ibériques n’est pas sans rappeler celui que l’ont pouvait observer dans l’hexagone avant "notre" coupe du Monde. Dans ce contexte, quelques excellents footballeurs espagnols passent presque, aux yeux des supporters, pour de sympathiques faire-valoir…
Par ailleurs, le parcours ante-mondial de la Seleccion présente une certaine similitude avec celle des Bleus: si les Ibériques n’ont pas mis beaucoup de trophées dans la vitrine, ils ont visiblement repris le flambeau des Français pour ce qui est du titre de "champions du monde des matchs amicaux". Les Bleus sont d’ailleurs les mieux placés pour juger de cette réputation, eux qui avaient été défaits 2buts à 1 à Valence en mars 2001. Le bilan de la sélection est globalement plus que rassurant. Depuis l’arrivée de Camacho à sa tête, les Ibériques ont remporté 24 victoires pour seulement six défaites (et 7 matchs nuls). Sans oublier que son prédécesseur, Javier Clemente, présentait déjà le meilleur parcours de tout le temps pour un sélectionneur national. Bref, outre "l’accident français" de 1998, le profil espagnol n’est pas loin de celui que présentaient les Bleus avant leur victoire.
D’ailleurs, le palmarès des Espagnols est en parfaite adéquation avec celui de l’Equipe de France avant juillet 1998: un seul et unique trophée, glané lors d’un Euro victorieux.
La sélection espagnole pousse enfin le mimétisme jusqu’à singer l’équipe de France en ce qui concerne certains dilemmes. A l’instar de ce qui s’était passé pour Barthez et Lama en 98, le sélectionneur se voir aujourd’hui pressé de toutes parts pour nommer un numéro 1 entre Molina, Canizares et Casillas dans la cage…
Bref, autant de petits détails qui nous rappellent de bons souvenirs… L’Espagne serait-elle sur la voie d’un premier sacre historique?