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Saint-Diego

Le génie n'a rien à voir avec les bonnes manières, ni avec la toxicologie… Maradona a illuminé le football de sa mauvaise étoile, et peu importe la chute quand on est allé si haut.

Auteur : Grégory Protche le 12 Fev 2003

 

(Texte paru dans Get Busy n°2)

 

1986: la féerie est pour cette fois. À Mexico, Diego Maradona s'offre la planète foot. Et jongle avec mieux que Charlot. Héritier du Roi Pelé, Prince de la balle, et Baron de la gruge. 1990: Italie. Diego pleure. Il laisse les Allemands gagner pour faire rire les Italiens.

 

1994: Diego découvre l'Amérique, et, après avoir purgé une suspension pour coke, il entre en cours de jeu contre la Roumanie. Amorti de l'extérieur, petit crochet pousse-pousse, de l'extérieur toujours, et frappe fouettée. Sous les hourras d'une foule, au fond, ravie de retrouver son chéri. Diego "Montana", hurle aux caméras, "le monde est à moi!" Ses coéquipiers sourient. Sans lui, ils sont une équipe nationale. Avec lui, ils sont l'Argentine.

 

 

Mais le monde du foot en a marre de se pincer le nez chaque fois que Diego shoote. Ils ont décidé de soigner l'image du sport, en enfonçant, définitivement, celui de Diego dans une scarfacienne montagne de coke. Ils répondent ainsi à plein de questions jamais posées. Pourquoi un doué doit-il être exemplaire? Même poudré à mort, le but contre les Roumains, qui d'autre le met? Qui dans le foot est assez clean pour le juger? Quand on se conduit gentiment, qu'on a bon esprit, qu'on joue sans came ni talent en équipe de France, on apporte quoi à qui? À 6 ans, lorsqu'on le filmait en train de jongler, c'était déjà la blanche qui faisait de lui un demi-dieu? Sera-ce toujours le sort réservé à celui qui fait d'un sport collectif un art individuel?

 

Oui, à Boca Juniors, au Barça, à Naples, ou en équipe d'Argentine, ils étaient onze, mais dix des onze jouaient pour le 10! Maintenant que Diego Armando Maradona est mort au champ du déshonneur sportif, on va peut-être enfin pouvoir parler de tout ce qu'il a apporté. De son œuvre, de son lyrisme catho-latino, de ses frasques pour fresque, de ses dribbles, de son rire gâté d'enfant qui n'a pas grandi. Il était temps.

 

D'abord, ne confondons plus le dopage qui fit de Ben Johnson un surhomme, et la poussière d'ange qui, chaque jour davantage, ramène Diego à des proportions humaines. De même que le coupable, comme on se plaît à nous le répéter, n'est pas le dealer, mais le camé et la société qui le fabrique, ce n'est pas que Maradona sniffe la vraie question. Ça, c'est un fait, une affaire personnelle, entre Dieu et lui... Le vrai drame, c'est qu'une société démocratique avancée n'ait d'autres exemples d'ascension sociale à offrir à sa jeunesse qu'un sport où "il y a beaucoup d'appelés et peu d'élus". Elle est là, sur le plan moral, la terrible victoire de l'Oncle Sam et de son modèle.

 

 

Ça, c'est plus honteux que la came qui coule des yeux bouffis de Maradona. On ne peut pas indéfiniment accuser le symptôme d'être une cause. Un gosse ne devrait rien avoir à foutre des démêlés de Diego 1er avec la drogue. Il devrait juste jouir de le voir faire l'amour à huit défenseurs anglais en 86, comme lui dans sa cour de récréation. Le sport n'est pas, n'a jamais été, ne sera jamais autre chose qu'un moyen de se défouler. En tout cas pas un moyen de s'intégrer, de s'en sortir, une école de la vie, ou Dieu sait quelle autre baliverne de sociologue tiré d'affaire.

 

Si un enfant rêve de devenir architecte, peut-être Maradona peut l'y aider en le rendant heureux. Mais si ce même enfant rêve de devenir Maradona, l'architecture, même en rêve, il n'y aura pas accès. Le foot, c'est un sport. Et, quelques secondes durant, quand Maradona joue au plus fin, au plus "wané", ça peut devenir... autre chose! Quand, de la main gauche, il écartèle le gros Shilton: un hommage aux burlesques. Quand, sans élan et sans regarder, il lance Caniggia à cinquante mètres de là: un éclair bleu et blanc dans la grisaille verte. Quand Diego et ses grosses cuisses pleines de poils court plus vite que la lumière: la fin du monde pour le reste du monde. Quand il se met, au lieu de s'échauffer, à jongler avec son talon cent fois de suite: un conte de Noël pour les grands au mois de juillet.

 

 

On ne demande pas à un ange, même issu d'un quartier défavorisé, de devenir éducateur. C'est un destin de perdant. De boxeur français. En même temps qu'un très suspect moyen de canaliser les énergies banlieusardes... Que les présidents argentins aient besoin d'un Maradona, blanc comme de la poudre aux yeux, pour policer la marmaille, ça regarde les Argentins.

 

Mais il n'est plus tolérable d'entendre un Thierry Roland regretter haineusement que Maradona finisse si mal. Qu'est-ce que ça peut bien lui foutre à lui!? Quand encore il ne vient pas pontifier que Maradona "ternit" l'image du sport et offre un bien triste exemple pour la jeunesse... Lui qui travaille sur une chaîne où le spot de pub en finale de la coupe d'Europe est facturé à 800 000 balles, qui a à son actif plus de bévues verbales qu'un Le Pen en grande forme, et qui tait depuis tant d'années tout ce qu'il sait sur les enculés argentiers du si dégueulasse football!

 

Seuls les fans de Diego ont le droit de lui reprocher quelque chose. Comment insulter assez pour les faire taire ceux qui cautionnent, en le commentant, un sport dont la pourriture n'est plus à démontrer, et qui s'en tirent en tirant sur son dernier bon-mauvais génie? Les anges, c'est comme Dieu. Ils ne sont pas forcément bons, sympas et gentils comme au catéchisme. Les anges doivent être justes. Diego Maradona jouait juste. Il nous a été envoyé pour nous faire rêver. Il l'a fait. Le rôle d'un génie, c'est de faire évoluer sa discipline. Point de morale là-dedans. Flaubert l'a dit. Et si Maradona n'est pas Baudelaire, rien ne l'oblige non plus à se conduire comme Mère Teresa.

 

 

Dans la vie d'une Humanité, un Maradona, ça s'étudie. C'est précieux. Même ses relations avec la schnouff sont passionnantes, pour peu qu'on les dé-moralise. La grâce dans un mètre soixante-trois, ça c'est de l'énigme physiologique à résoudre. La simultanéité entre la pensée et l'action, ça mérite bien quelque analyse qui ne serait pas sanguine. La beauté, nichée au creux d'un coup de pied, ça s'estime, ça se note. Les incidences, en termes de dribbles, de déséquilibre, d'un très bas barycentre, ça se documente. Pour une fois que le virtuel servirait à quelque chose d'essentiel! On prendrait une action de Maradona, et, au ralenti, on la regarderait sous tous les angles différents possibles, et peut-être qu'enfin on comprendrait...

 

C'est ça aimer le foot. Ce n'est pas seulement se branler sur les victoires d'un petit club bien de chez nous, avec un budget bien petit, et un entraîneur bien Guy Roux, qui ferait la nique aux PSG et à l'OM. En vérité, le seul crime de Diego Armando Maradona, c'est d'avoir été trop beau. Et d'avoir, comme Muhammad Ali avec la Boxe, fait renaître le foot, avant de le tuer.

 

Ce n'est pas grave, l'Amérique latine est sûrement déjà enceinte. Maradona, comme Ayrton Senna, est de ces hommes qui meurent de leur art. D'autres préfèrent en vivre. Comme certains adultes racontent des histoires aux enfants, il y a des enfants de 35 ans qui rendent les enfants et les adultes heureux.

 

Alors, au lieu de vengeressement pleurnicher sur sa fin, d'ironiser grassement sur sa brioche, de le pointer du doigt pour crime de lèse-exemplarité, de moquer la vulgarité de sa compagne, au lieu, en somme, de le condamner parce qu'on n'est pas capable de le juger, réjouissons-nous, même si nous ne le verrons plus sur un terrain: Diego Maradona est vivant. Le Pape et Castro l'ont rencontré.

 

Réactions

  • No Fun le 14/02/2003 à 17h05
    Et pourtant, kalle, il était connu pour ça et s'est effectivement pris des jaunes en EdF pour cette raison (j'avoue que de mémoire je ne pourrai pas te citer les matches). Il a du apprendre ça dans le Calcio avec la Juve.

  • kalle le 14/02/2003 à 17h12
    Mouais..............
    Bon, c'est pas l'image qu'il m'a laissé.
    Je retiens de lui le phénoménal tireur de coup-franc, le numéro 10 dans toute sa splendeur, les ouvertures de 60 mètres dans les pieds des attaquants en mouvement, le buteur, le capitaine, l'artiste.
    En 2 mots classe et efficacité.
    Le plus grand joueur Français et un des 10 meilleurs footballeurs de tous les temps.
    Mais je m'emballe, je m'emballe...... ;-)

  • No Fun le 14/02/2003 à 17h26
    Tout à fait d'accord avec toi. Pour moi il est même juste derrière Maradona et Pelé. J'ajoute à ta liste, l'intelligence du jeu.

    Je disais juste que l'aspect tricheur/menteur que l'on reproche à Maradona sur les terrains, on pourrait le reprocher à beaucoup de grands footballeurs.

  • harvest le 14/02/2003 à 23h38
    C'est vrai , maintenant je regrette d'avoir été si dur envers l'auteur de ce texte. Je réalise seulement ce soir que cette personne est peut-être un simple lecteur des cahiers du football comme moi; une personne que j'ai peut-être contribué à meurtrir, simplement parce que j'ai été énervé à la lecture de son élan passionel pour un joueur que je n'ai jamais apprécié. Excuses , sincérement.

  • Le Plan le 15/02/2003 à 16h53
    Bon, maintenant Harvest tu pardonne a Diego et on en parle plus...

  • touffik le 15/02/2003 à 20h58
    Bien vu Le Plan ! :-)
    Cet article m'a fait bien plaisir. Lu juste avant de filer au taf avant-hier, du coup avec bonne humeur.
    J'ai sur mon disque dur les buts de Diego contre la Grece (fabuleux Redondo !!) et surtout contre l'Angleterre, avec le commentaire. Il ne s'eloigne jamais trop de mon historique. C'est un rapport affectif.
    Quand je repasse le debut de l'action, 10 metres avant la mediane, je suis toujours incredule. Il ne va pas le mettre ! Il ya trop de monde ! C'est trop loin ! C'est trop fort ! Et chaque fois, avec la même aisance, sans un regard pour ses adversaires ou coequipiers, il le met. Le ballon s'ecarte un peu... Il revient vite coller "el genio del futbol mundial" devant un blanc medusé, puis ne le lache plus que pour les filets.
    C'est incroyable, je vous jure ! Même au ralenti !
    J'a l'impressioni qu'il s'arrete pour faire son drible, que ce n'est plus lui qui court mais le terrain qui scrolle en dessous.
    Buruchaga court toute l'action a ses côtés, il part même de plus loin. Il accelere s'attendant a recevoir la boulle, mais Maradona s'en fout. Avant le dernier drible, deux argentins sont seuls tout devant les filets. Ce dernier drible ne sert a rien, mais merde, ce qu'il est bon ! Quand l'Anglais le met enfin a terre, il est deja trop tard. Diego se releve tres tres vite et court vers le coin de lien se precipite derrière lui, un defenseur Anglais regarde le poteau depité, le tacleur reste a terre et taper sur ses jambes...
    Le foot est un sport collectif. Je crois que Diego s'en fout, et je m'en rejouit. Gamin, je ne pouvais pas le blairer. Je l'ai insulté après la vicoire contre le Bresil de 90. Je n'ai compris que plus tard ce roi du coup de rein. Je m'en rejouit aussi. Un bon ami argentin, assez mediocre footballeur mais excellent cuisinier, m'a initié à la poetique Maradonesque en préparant une omelette Norvegienne. L'omelette etait tres bonne (juste flambée comme il faut), et tout en la mangeant, il m'a parlé d'une ôde de Garcia Marquez au 10 de génie. Je l'ai égaré depuis, à mon grand regret, mais c'etait rien chouette à lire. Un peu comme le laïus d'Enzo qui me fait toujours chaud au coeur. Oh ! Enzo ! Mà quess tu fous là ? On parle de Diego et tu continues à bouder ! ;-)
    Une dernière chose me tient coeur. Je n'arrive pas à comprendre qu'on se pose la question de la légitimité d'un article sur Maradona sur un site de foot. Je veux dire, y a pas besoin d'une occase pour en parler, nan ? Au pire, on a qu'a dire que chaque jour est l'anniversaire de celui où Diego Armando Maradona, El Pibe de Oro, à marqué le but le plus fabuleux qu'il m'ait été donné de voir, sur un terrain Mexicain.

  • Le Plan le 16/02/2003 à 18h55
    Touffik, Buruchaga a dit que ce qu'il trouvait le plus incroyable a propos ce but, c'est que Maradona est alle le voir a la fin du match pour lui dire qu'il avait passe toute l'action a se demander quand etait le meilleur moment pour lui donner la balle. Ce qui emerveille Buruchage c'est que Diego ne s'est pas contente d'un maillot raye dans son champs de vision, il a identifie son coequipier.

  • Konotcho le 10/06/2004 à 18h25
    Pour moi, Maradona "l'homme" a été submergé par Maradona le "génie", je m'explique : comment en effet ce jeune gamin des rues a-t-il pu construire sa personnalité et son équilibre mental alors que son exceptionnel talent précéda les étapes essentielles de sa formation intellectuelle? Sans qualifier el pibe de oro de débile mental, et loin de moi cette idée, je crois qu'il n'a pas pu ou qu'il n'a pas su gérer sa vie personnelle comme il se le devait. Cela explique en grande partie l'image de ce joueur légendaire aux comportements de gamin impulsif et grandiloquent. Cette image de l'homme Maradona peut toucher pour sa fragilité, sa candeur ou au contraire déplaire pour son immaturité et son insolence. Quoiqu'il en soit personne ne conteste aujourd'hui le génie de Maradona le footballeur.
    J'ajouterai cependant que l'homme Maradona bien qu'il soit injuste de le juger pour la simple raison qu'il ait été le plus grand footballeur au monde, n'est pas aussi mauvais qu'on peut parfois en donner l'impression. Diego n'était pas l'égoiste orgueilleux comme on l'affirme bien souvent ; son comportement était celui d'un véritable capitaine, meneur d'hommes. Son immaturité l'a parfois amené à certaines erreurs dans ce domaine, mais l'homme ou le grand enfant n'est pas prétentieux. C'était un joueur instinctif sur le terrain et en dehors, l'homme se comportait de la même manière : si l'un de ces équipiers était expulsé, Diego manifestait une grande tristesse particulièrement touchante de la part d'un si grand talent... Parfois aussi Maradona n'avait pas le recul nécessaire afin de comprendre les comportements des supporters et autres personnes : à la coupe du monde 1990 en Italie, il vie très mal le manque de fair-play des tifosis et répond très souvent violemment à ces insultes... mais Maradona c'est aussi l'enfant qui pleure en finale contre la RFA, alors qu'il a déjà tant gagné et tant prouvé au monde entier.
    Plus que jamais je revois Diego Armando Maradona comme un grand enfant au talent incommensurable, qui par son enthousiasme naïf fut victime des vicissitudes de son temps et du milieu footballistique.

  • dt le 28/10/2004 à 11h39
    Le roi Diego….qui n’a jamais vu jouer Diego Armando Maradona, ne sait pas ce qu’est le football.
    Un jeu , un jeu simplement, fait de pichenette, d’extérieur du gauche, de petit pont, de passe aveugles,de reprise de volée….
    De douleur, de doute, de joie, de tristesse, de victoire et de défaite aussi…
    Une vrai comédie humaine, qui se joue à 22, et où Diego était le roi.
    Il nous délivrait ces messages par des transversales paraboliques, des crochets courts, des sombreros, des passes tendues et d’innombrables gestes insensés.
    Diego le thaumaturge, à chaque fois qu’il caressait un ballon il en faisait un miracle, une promesse, un don…
    Nous nous sommes trompés avec Diego, nous nous trompons d’ailleurs avec les footballeurs….ils ne sont pas des exemples, Diego n’était pas un exemple…..il est !!!
    C’est un homme comme nous, emplis de contradictions, de bonté, de fureur, de tristesse mais aussi d’espoir et de joie….
    Il déclara à la télévision Argentine ,à 14 ans, son rêve d’enfant : je veux gagner la coupe du Monde………
    Et il l’a gagna, en invitant le monde entier à danser le tango avec lui, lors du match conte l’Angleterre où il inscrivit son fabuleux but après avoir esquivé, driblé et feinté l’Angleterre toute entière !!!
    ….Diego c’est un rêve d’enfant.

La revue des Cahiers du football