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Le génie se meurt ? Ah mais l'mage rit le 15/02/2024 à 07h31

Je ne sais pas si vous connaissez le Projet Voltaire, un projet privé qui est vendu aux universités en leur faisant croire que leurs étudiants amélioreront grandement leur orthographe.
Un premier article d'évaluation indépendante vient d'être publié et même si la méthodologie utilisée a ses limites, divulgâchage, ça ne marche pas aussi bien que le disent ceux qui vendent le projet (en même temps la vente de ce genre de méthodes n'est pas aussi réglementée que celle des médicaments, alors pourquoi se priver - pas besoin d'évaluation de leur efficacité pour les vendre).

lien

ps : comme c'est un article publié dans une revue de spécialistes, j'ai opté pour ce fil sans être certain que cela soit exactement le bon.
Franco Bas résilles le 15/02/2024 à 07h40

Merci, je vais lire ça avec intérêt.
Sans rapport mais quand même : voilà quelques années, une officine de cours particuliers et de rattrapage scolaire avait fait distribuer partout sur les pare-brises rennais un papier publicitaire format carte postale.
On y lisait (de mémoire, mais je garantis la formulation à 99%) : "Des problèmes en maths ? Et si vous en parliez enfin à de vrais professionnels ?"
Le génie se meurt ? Ah mais l'mage rit le 15/02/2024 à 08h03

En réponse à Franco Bas résilles le 15/02/2024 à 07h40
(voir le message)

Pour le projet Voltaire, ils mettent en avant des experts sur leur site. Bien évidemment aucun scientifique (ah si un docteur en histoire) spécialisé dans l'acquisition du langage écrit. Par contre ils sont tous passionnés d'orthographe...
Raspou le 15/02/2024 à 08h57

En réponse à Le génie se meurt ? Ah mais l'mage rit le 15/02/2024 à 07h31
(voir le message)

Je ne connaissais pas le projet Voltaire avant ce matin, donc aucune idée de son efficacité éventuelle, mais "l'évaluation" à laquelle tu renvoies ne répond en rien à la question de savoir si leur approche fait progresser les étudiants. Elle répond par la négative à la question "est-ce que deux mois de PV amène les étudiants au niveau où on aimerait qu'ils soient?", ce qui n'a quand même pas beaucoup d'intérêt d'un point de vue scientifique. Le gars est honnête, il le dit dès le début: "Mon étude n'a pas pour visée de comparer un groupe témoin à un groupe test pour voir si le PV est plus efficace qu'une autre méthode. Elle n'a pas non plus pour objet d'évaluer la progression du niveau des étudiants grâce à l'utilisation de la plateforme. Je souhaite savoir si le PV permet d'atteindre un niveau convenable en situation de rédaction."

Le plus étonnant étant son choix de faire un pré-test et un post-test de nature très différente, avec au début une dictée tirée d'un article du Monde et à la fin une dictée du brevet des collèges, la seconde pouvant être notée sur 10 selon le barème du BdC. C'est assez mystérieux de ne pas avoir choisi une dictée de nature similaire en pré-test, qu'au moins il ait eu des notes de pré-test et de post-test comparables (ce qui n'aurait pas suffi à conclure sur l'efficacité du PV, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit).

L'absence de protocole permettant de mesurer l'efficacité du PV fait que l'intérêt de l'étude réside principalement dans l'évaluation du niveau d'un groupe d'étudiants en première année de science du langage, lesquels ont donc eu en moyenne 6/10 à une dictée de fin de troisième, avec un quart d'entre eux qui ont eu moins de 5/10. Certes, le PV n'a pas fait de miracles, ou n'a eu aucun impact, ou a eu un impact limité, ou a eu un impact négatif (on n'en sait rien), mais ça soulève peut-être d'autres petites questions soit sur notre système éducatif (si l'on est pessimiste), soit a minima sur le niveau des étudiants en sciences du langage à l'Université de Lorraine (si l'on est optimiste).
Franco Bas résilles le 15/02/2024 à 09h16

Alors je suis d'accord sur les biais de l'étude, mais son intérêt est de ne pas se borner à la maîtrise de l'orthographe en situation de dictée (ce qui engendre bien des biais aussi), mais de se demander si la transposition lors d'une rédaction est efficace.
Je ne m'étendrai pas sur le niveau des étudiants, mais il existe une pression réelle pour utiliser le projet Voltaire (et pourquoi Voltaire plutôt que Mérimée ?), en particulier dans le supérieur, comme une sorte d'externalisation de la remédiation orthographique... un peu comme si on s'en remettait à une IA pour faire progresser les élèves de classe de seconde (oui, je suis informé qu'Attal...).
Et bien entendu, comme toutes les plate-formes de ce type, le PV a un "business plan", comme on dit...
Édit : les autres remédiations plus ou moins "externalisées", comme à Rennes les remises à niveau assurées par des profs du secondaire pour les entrants en fac de droit, n'obtiennent pas forcément de meilleurs résultats, on n'en sait rien à vrai dire, mais le PV a la prétention, pas si bien démontrée scientifiquement, de "marcher"..
Franco Bas résilles le 15/02/2024 à 09h28

J'ajoute qu'il y a maintenant des ouvrages pour se préparer au certificat Voltaire, et que l'entreprise a réussi, en se faisant intégrer sur des espaces numériques d'universités, à gagner une légitimité quasi monopolistique sans jamais que les bénéfices de cette formation "automatisée" ne fassent l'objet d'évaluations sérieuses.
Je me réjouis donc que la recherche en vienne à se pencher sur le sujet.
Franco Bas résilles le 15/02/2024 à 09h43

Pardon pour mon omniprésence, elle est temporaire.
Le Projet Voltaire prétend avoir vu son efficacité "prouvée scientifiquement" par le CNRS.
Voici l'étude en question :
lien
Il se trouve qu'elle permet surtout d'établir que
- "le fait de travailler l'orthographe, la conjugaison et la grammaire bénéficie plus fortement aux étudiants initialement plus faibles" ;
- "une meilleure maîtrise de la langue permet [...] d'améliorer sensiblement les résultats obtenus à l'issue de la première année universitaire" (tu m'étonnes !) ;
- "un encouragement fort à améliorer orthographe, conjugaison et grammaire peut parfois conduire à diminuer les notes des étudiants qui sont initialement les meilleures dans ces domaines, s'ils consacrent moins de temps de travail sur les autres matières" !
En gros, avec des actions ciblées on obtient des résultats. Mais la part de la motivation vs celle de la plate-forme par elle-même, ce n'est pas tranché du tout, non plus que la comparaison entre cette plate-forme et d'autres modes d'intervention...
Franco Bas résilles le 15/02/2024 à 09h48

En réponse à Franco Bas résilles le 15/02/2024 à 09h43
(voir le message)

(je sors, je ne voulais pas vous laisser séduits par le beau mythe)
Dédie mon Stück le 15/02/2024 à 10h11

Le projet Voltaire peut quand même s'enorgueillir sur sa page d'accueil d'avoir été "Élu « meilleur service d'apprentissage en ligne toutes disciplines confondues » par l' EFFEP (European foundation for e-learning projects)" ce qui peut impressionner.

L'EFFEP n'a en effet décerné son label que 6 fois depuis 2009. Dont une pour un organisme qui n'a visiblement pas jugé bon de renouveler son label passés les 4 ans de sa validité, deux pour le projet Voltaire lui-même (qui a renouvelle le sien, donc), et encore une autre pour "Projet Voltaire - Les Fondamentaux" un organisme dont on ne doutera pas de l'indépendance.

EFFEP qui ne se contente pas de remettre des labels au rythme effréné de 4 par décennie en moyenne, mais qui manifestement organise aussi chaque année un concours national d'orthographe française pour les lycéens luxembourgeois. Le "Concours Voltaire 2024" est d'ailleurs ouvert, n'hésitez pas à en faire part à vous amis adolescents du Grand-Duché.

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Bon bref, je me moque mais ce genre de pratique ne doit pas être si exceptionnel. En lisant quelques uns des témoignages choisis d'utilisateurs du projet Voltaire, ça donne l'impression que c'est le côté "apprendre en s'amusant" qui vend. Et du coup ce n'est pas forcément étonnant que ça marche d'un point de vue commercial.

J'ai même envie de dire que, plutôt que de démonter leur méthode, on pourrait se pencher sur la question de savoir quelles alternatives sont ou peuvent être proposées. Quand on arrive à l'âge adulte, qu'on est neuro-typique (?) et qu'on n'a pas la moyenne sur une dictée de brevet, c'est qu'on ne voit pas l'intérêt de l'écrit de manière générale. C'est donc bien sûr la motivation qu'il faut attaquer le problème, et les progrès, s'il y en a d'envisageables, ne peuvent de faire qu'au long cours après avoir pris des habitudes de lecture et d'écriture régulière.

Ce qui rejoint bien les critiques de l'article partagé (merci Raspou!), à deux mois il n'y a rien à mesurer dans les performances orthographiques, c'est évident. Je soupçonne l'auteur de simplement avoir voulu valoriser le travail effectué, soit qu'il constituera une étude pilote pour une publication plus poussée, soit que le thème va être abandonné. Je serais lui, j'essaierais de mesurer plutôt d'éventuels changements de comportements vis à vis de l'écriture et de la lecture chez les participants, ça me paraît plus constructif.

Édit: et Franco qui n'arrête pas. Tiens je vais voir si le projet Voltaire a un module détection de contrepèterie
Raspou le 15/02/2024 à 10h18

En réponse à Franco Bas résilles le 15/02/2024 à 09h43
(voir le message)

L'étude TEPP (un bon labo) est sérieuse et intéressante, quand même, rien à voir avec l'autre. OK, elle ne dit pas si l'approche Projet Voltaire est plus efficace qu'une autre, on ne sait donc pas si on obtiendrait les mêmes résultats en encourageant les étudiants en difficulté orthographique à aller sur une autre plateforme, à participer à des sessions de soutien en personne ou à lire les livres de Balthazar, mais le fait est que les encourager à aller sur le site du PV améliore à la fois leur orthographe et leurs résultats dans les différentes disciplines... C'est quand même un résultat notable et facile à transcrire en une politique de soutien ciblé.